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Soixante ans d'occultation : l'enquête de la Knesset révèle que les bébés yéménites enlevés ont été tués et exploités dans des expériences médicales financées par des Instituts Nationaux de Santé (AHT)

par Richard Silverstein 25 Juin 2017, 15:07 Israël Expérimentations médicales Yemen Bébés Israélafrique Colonialisme Racisme USA Collaboration Histoire Articles de Sam La Touch

Soixante ans d'occultation : l'enquête de la Knesset révèle que les bébés yéménites enlevés ont été tués et exploités dans des expériences médicales financées par des Instituts Nationaux de Santé
Article originel : 60 Years of Cover-up: Knesset Inquiry Reveals Abducted Yemenite Babies Murdered in Medical Experiments and Exploited in Paid National Institutes of Health Experiments
Par Richard Silverstein
American Herald Tribune


Traduction Alice pour SLT

L'assemblée législative et le Parlement israélien, la Knesset, après soixante ans de dissimulation, a exposé un des scandales les plus choquants de l'histoire de la médecine israélienne. À la fin des années 1940 et au début des années 1950, inspirées par la philosophie de Ben Gourion, Israël a dû remplir lui-même son espace colonisé via l'immigration juive pour rivaliser avec les Arabes, en amenant par ponts aérien des dizaines de milliers des Juifs yéménites. Cela a été célébré comme une grande opération humanitaire dans laquelle les Yéménites ont été "sauvés" d'une vie de misère et de la victimisation antisémite dans leur pays natal.

Dans les quelques mois qui ont suivi leur arrivée, des rapports ont commencé à circuler sur la disparition de bébés dans des hôpitaux et des cliniques médicales. Le décompte final des disparus s'est élevé en centaines, peut-être même en milliers de bébés qui ont été soi-disant enlevés à leurs parents ou même tués. Les parents pour leur affliction n'ont reçu aucun mot de ce qui était arrivé; aucun acte de décès; aucune explication. Même des décennies plus tard, après trois commissions d'enquête différentes sur trente ans, les résultats des enquêtes ont été scellées et les victimes n'ont rien appris. L'État a refusé d'accepter la responsabilité et il n'a pas non plus indemnisé les victimes pour leurs souffrances et pertes personnelles. C'est peut-être le scandale médical le plus grand dans l'histoire israélienne, se classant au niveau des expériences étatsuniens sur la syphilis à Tuskegee de par sa déviance et sa mortalité.

NdT : L'étude de Tuskegee sur la syphilis (1932 – 1972) est une étude clinique menée à Tuskegee, Alabama par des médecins américains pour mieux connaître l'évolution de la syphilis lorsqu'elle n'est pas traitée. Les participants à cette étude sont des métayers afro-américains pauvres qui se sont vu refuser le traitement de cette maladie, pourtant disponible dès 1943 grâce à la pénicilline. Après une trentaine d'années pendant lesquelles les institutions sanitaires ont laissé faire, le scandale éclate dans les années 1970 lorsqu'un médecin en santé publique, nommé Peter Buxtun, révéla à la presse l'existence de celle-ci après avoir vainement tenté d'alerter ses autorités de tutelle. Ce scandale est à l'origine du rapport Belmont de 1979, rédigé par le Département de la Santé, qui établit les principes fondamentaux de la bioéthique en ce qui concerne l'expérimentation humaine. À cette occasion fut créé l'Office for Human Research Protections chargé de l'examen des protocoles expérimentaux et du respect des principes éthiques. (Wikipedia).

De plus, ce scandale a aussi impliqué les Instituts nationaux de santé étatsuniens, qui ont payé presque 1 millions de dollars aux hôpitaux israéliens (en valeur actuelle) pour fournir des foetus de bébés yéménites morts et des cadavres des adultes qui ont été utilisés dans des expériences médicales pour déterminer pourquoi les Yéménites ne développent pas de maladies cardiaques. Un médecin a cherché à prouver que les Yéménites étaient de descendance africaine. Pour se faire, il a testé le sang de Yéménites morts pour déterminer s'ils avaient l'anémie drépanocytaire. Il a même écrit un article médical concernant ses recherches. Dans leur témoignage, les médecins qui ont fait cette recherche ont déclaré qu'ils avaient appelé les Yéménites Kushim, qui est grossièrement l'équivalent de "nègre" ou "N ***o."

Israël HaYom, qui a d'abord révélé l'histoire, a d'abord cherché la réponse d'un porte-parole du NIH (National Institutes of Health des Etats-Unis) qui a répondu que ces informations ne pouvaient être diffusées sans une demande au FOIA (Freedom Of Information Act). C'est ce que je suis en train de faire maintenant. Il est extrêmement important d'exposer indépendamment le rôle que des médecins ou des chercheurs aux États-Unis ont joué dans ce désastre.

Des enfants vivants (voir photo) ont été aussi utilisés pour des démonstrations d'anatomie dans lesquelles les parties de leurs corps étaient mentionnés avec les noms d'organes divers. Vraisemblablement, ceci a dû servir de démonstration vivante pour les étudiants qui pouvaient voir où les organes étaient situés sur leur corps vivant.

Soixante ans d'occultation : l'enquête de la Knesset révèle que les bébés yéménites enlevés ont été tués et exploités dans des expériences médicales financées par des Instituts Nationaux de Santé (AHT)

Dans ces expériences, les parents des enfants n'ont jamais été informés et n'ont donc jamais donné leur consentement. Des chercheurs ont simplement utilisé des Yéménites, morts ou vivants, au profit de la médecine. Ces expériences ont été considérées comme plus importantes que les ressentiments des parents.

Le nouveau rapport explique pourquoi tant d'enfants yéménites sont morts : étant donné qu'aucun membre du personnel médical israélien ne parlait yéménite et que les patients ne parlaient pas l'Hébreu, le personnel ne pouvait pas connaître les noms des enfants. Au lieu de cela, ils les ont numérotés. Le système de numérotation était souvent défaillant et les numéros des patients étaient souvent commutés, mal placés ou perdus, ce qui a mené à des erreurs dans la dispensation des traitements. En conséquence beaucoup sont morts. Le personnel médical a décidé qu'il pourrait en tirer opportunité en transportant rapidement les corps pour des autopsies ou des études post-mortem.

Un des rapports les plus macabres concerne quatre bébés qui ont été hospitalisés parce qu'ils étaient sous-alimentés. Bien qu'ils soient en condition stable, les docteurs ont décidé de leur injecter une "protéine sèche." Dans les mots 'feutrés' du directeur de l'hôpital Rosh HaAyin :

Mendel a déclaré, "je me rappelle un ou deux cas dans lesquels le docteur Matot a donné des instructions de faire une injection de protéine sèche que nous séparerions. Le sérum, plasma sec … et les résultats n'étaient pas bon."

Le protocole inclut une lettre du docteur Kalman Jacob Mann, le directeur médical adjoint de l'hôpital, à l'adresse de Mendel, daté du 21 novembre 1949, avec la mention : "j'ai visité notre hôpital de Rosh Haayin et j'ai constaté que ce matin quatre bébés qui avaient reçu le traitement actif étaient morts. Ces bébés étaient dans des conditions plus ou moins équilibrées selon leur condition physiopathologique, mais après qu'ils aient été injectés avec des solutions diverses, leur état s'est dégradé et ils sont morts."

Le Likud MK qui menait l'enquête a appelé de tels actes : des "meurtres".

Dans le nouveau témoignage, l'avocat pour le compte de la commission d'enquête a interrogé le docteur Mendel sur la pratique consistant à utiliser des foetus morts pour l'expérimentation :

Quand Nahmani-Roth [l'avocat] lui a demandé si les autopsies non approuvées avaient causé des problèmes avec les parents qui ont voulu voir les corps de leurs enfants, Mendel a répondu, "je ne pense pas, puisqu'après les autopsies nous arrangions le bébé, aussi ils [les parents] pouvaient voir son visage, qui semblait … intact mais c'était complètement légal. Il n'y avait aucun problème."

L'avocat a rétorqué : "non légalement, mais moralement et du point de vue du ressenti des parents. Est-ce qu'il n'est pas possible de considérer que vous conduisiez des autopsies de manière systématique sur des enfants et que vous ne montriez pas les corps à leurs parents ?".

Mendel a aussi déclaré au comité que tout les tests avaient été méticuleusement documentés, mais qu'il avait entendu des rumeurs selon lesquelles "quelqu'un les avait détruits [les rapports] sept ans plus tard."

Dans un certain nombre de cas, le personnel médical a simplement adopté les bébés. Cela de nouveau, n'a jamais été dit aux parents si ce n'est que le bébé était mort. La tragédie n'est pas dans ce cas juste celle des parents, mais des enfants élevés par des parents ashkénases qui ne leur ont jamais dit comment ils sont venus à être leurs parents. Beaucoup de ces enfants ont grandi avec le vécu qu'ils étaient les victimes de cette expérience désastreuse. Mais l'Etat ne leur a offerts aucunes réparations, ce qui n'a fait qu'aggraver les choses.

Un corollaire à cette tragédie est l'affaire des mycoses, dans laquelle des médecins israéliens ont traité des enfants yéménites souffrant de mycoses avec des radiations. Ils l'ont fait à l'époque sans comprendre que le dosage qu'ils donnaient aux enfants étaient toxiques, même mortels et causeraient plus tard des cancers chez beaucoup d'entre eux. L'État a de la même façon nié toute responsabilité pour ce traitement médical désastreux.

Dans cette époque de destructivité et de haîne, il est important de mettre cette histoire dans une perspective appropriée. Il y a ceux qui essayeront de comparer ces expériences avec des expériences médicales nazies sur des enfants juifs et des adultes. Il y aura toujours ceux qui cherchent à prouver que les Israéliens sont similaires aux Nazis. C'est pourquoi il est important de noter que de telles pratiques médicales scandaleuses sont arrivées dans le monde entier y compris ici aux États-Unis. Elles étaient certainement le fruit du racisme et de l'indifférence. Mais les expériences israéliennes, bien qu'immorales, n'ont pas été conduites dans le cadre d'un génocide comme ce fut le cas pour les Nazis.

Cependant, cela ne diminue en aucune façon l'horreur de ce que la médecine israélienne a fait. Cela ne diminue en aucune façon la responsabilité gouvernementale israélienne pour ces crimes. Comme le MK menant cette enquête l'a déclaré : cela relève du meurtre pur et simple. Aussi longtemps qu'Israël supprimera cette histoire cela restera une tâche sombre qui planera sur la nation. C'est encore un autre exemple du racisme profond au coeur de l'entreprise sioniste. Au tout début de l'État israélien, les bébés yémenites ont été traité comme l'équivalent de chair à canon. Vivants, ils ont dû combler le fossé démographique de la population des Juifs israéliens dans la bataille démographique contre les Arabes. Morts, ils ont été utilisés pour "le bien" de la science médicale. Des médecins d'Israël et des politiciens ont traité les Yéménites comme des objets jetables, interchangeables, bons à être manipulés pour le bien de l'Etat.

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