Extrait : ...Alors que l'Afghanistan est souvent surnommé notre "guerre oubliée", l'intervention militaire étatsunienne au Niger n' a jamais été sur notre radar national...
Des commandos morts au Niger, un échec bipartisan de la stratégie et de la responsabilisation
Article originel : Dead Commandos in Niger a Bipartisan Failure of Strategy and Accountability
Par Bonnie Kristian*
Reason
Traduction SLT
Tant de questions et aucune n'a été posée au nom du peuple par le Congrès.
Quand des nouvelles ont annoncé que quatre commandos de l'armée étatsunienne ont été tués par des tirs ennemis au Niger la semaine dernière, les Etatsuniens pourraient être pardonnés si leur première question était :"Où?". Alors que l'Afghanistan est souvent surnommé notre "guerre oubliée", l'intervention militaire étatsunienne au Niger n' a jamais été sur notre radar national.
Il y a une bonne raison à cela : la présence des troupes étatsuniennes au Niger s'étend maintenant à trois administrations présidentielles, mais leur mission n' a jamais fait l'objet d'une autorisation du Congrès ni d'un examen public de la nécessité d'une telle intervention.
La tragédie de cette embuscade nous invite à corriger cette lacune, en commençant par un examen des faits. Les troupes étatsuniennes, actives au Niger depuis 2005, ont été déployées pour la première fois par le président George W. Bush pour former les forces locales et soutenir les efforts antiterroristes de Paris dans l'ancienne colonie française et dans les pays voisins, dont le Mali. En 2007, la mission a été placée sous l'égide du Commandement africain, ou AFRICOM, le nouveau centre de commandement continental du Pentagone.
Le président Obama a envoyé d'autres soldats étatsuniens au Niger en 2013, pour "appuyer la collecte de renseignements et faciliter l'échange de renseignements avec les forces françaises menant des opérations au Mali et avec d'autres partenaires de la région". Un an plus tard, Obama étendit les opérations de drones au Niger.
Aujourd'hui, le président Trump semble se contenter de contenir cette escalade illicite. Une importante base étatsunienne est en construction pour servir de plaque tournante à l'activité des drones dans toute la région, tandis que les troupes étatsuniennes sur le terrain au Niger sont très occupées par l'arrivée d'extrémistes venus de la Libye voisine, qui reste dans le chaos depuis l'éviction, facilitée par les États-Unis, de l'homme fort Mouammar Kadhafi en 2011.
Le recours à des forces spéciales est essentiel pour que Washington puisse affirmer à tort qu'il s'agit d'un projet mineur qui ne mérite pas d'être examiné par les civils. L'attaque qui a tué quatre Etatsuniens et un nombre inconnu de soldats nigériens la semaine dernière révèle que ce n'est pas le cas. "Les Etats-Unis ne sont pas en guerre en Afrique", a déclaré le général de brigade, Donald C. Bolduc, de l'armée étatsunienne après avoir visité le continent en 2016, "mais ses forces partenaires le sont". L'embuscade au Niger montre que c'est une distinction sans différence. Notre partenariat est suffisamment important pour que les Etatsuniens soient dans la ligne de mire.
Et à cela, nous devons nous demander pourquoi Washington s'est engagé dans une intervention irresponsable, coûteuse et dangereuse au Niger ? Quels sont les intérêts vitaux de la sécurité nationale des États-Unis dans ce pays africain ? Serait-on vraiment moins en sécurité sans cette mission ? Combien dépensons-nous pour cette entreprise et combien de temps cela prendra-t-il ? Pourquoi les troupes étatsuniennes doivent-elles risquer leur vie pour compléter une intervention française beaucoup plus importante ? Quels sont les objectifs de Washington ? Et si cette intervention est si vitale pour notre sécurité existentielle, pourquoi est-elle si silencieuse ?
Plus largement, en tant qu'historien militaire retraité, le colonel Andrew Bacevich a demandé : "Dans quelles circonstances les Etatsuniens peuvent-ils s'attendre à ce que les nations [comme le Niger] assument la responsabilité de gérer leurs propres affaires ? En d'autres termes, quand les forces étatsuniennes rentreront-elles à la maison ?" Est-ce "le rôle des États-Unis d'assurer la police de vastes pans de la planète à perpétuité" et, dans l'affirmative,"quel enchaînement d'actions ou d'étapes planifiées est censé donner des résultats?"
A toutes ces questions, je soupçonne que l'administration Trump, comme les administrations Obama et Bush avant elle, n'a pas pu répondre à la curiosité du public à propos du Niger, et c'est pourquoi elle a choisi, comme ses prédécesseurs, de ne pas parler du Niger du tout.
C'est une excuse regrettable pour justifier la stratégie et la responsabilité dans un domaine politique extrêmement important où, comme nous l'avons malheureusement appris par expérience ce mois-ci, des vies sont en jeu. Le Congrès devrait exiger des réponses de la branche exécutive à ces questions cruciales avant qu'une autre vie ne soit sacrifiée ou que de l'argent ne soit alloué.
*Bonnie Kristian est membre de Defense Priorities. Elle est auteure collaboratrice de The Week et chroniqueuse à Rare, et ses écrits ont également été publiés dans Relevant Magazine et The American Conservative, entre autres.