Gbagbo maintenu en détenu. Le mur se fissure à la CPI
Le Nouveau Courrier
Plus le dossier Laurent Gbagbo traîne en longueur, plus les divergences entre ceux-là même qui statuent sur son cas apparaissent au grand jour. L’affaire « le procureur contre Gbagbo » demeure une véritable attraction juridique et politique.
La CPI est-elle un instrument politique au service d’un néocolonialisme hideux ou une Cour de justice qui doit se contenter de dire le droit, au regard des éléments mis à sa disposition par les deux parties ? Une chose est sûre, les magistrats (très confortablement) payés par cette institution basée à La Haye ne peuvent désormais plus cacher leurs profondes divisions en ce qui concerne le dossier Laurent Gbagbo.
Ce sont les juges de la Chambre préliminaire 1 qui ont été les premiers à afficher des lignes de divergence en leur sein. Alors que ses deux collègues, l’Allemand Hans-Peter Kaul et la Belge Christine Van den Wyngaert mettaient frontalement en cause les graves carences de l’Accusation et refusaient en toute logique de confirmer les charges en l’état, la juge Silvia Fernandez de Gurmendi se fendait d’une opinion dissidente.
On peut dire sans risque de se tromper que c’est son refus de suivre ses collègues qui a accouché du compromis bancal qui consiste à considérer que les preuves du bureau du procureur sont insuffisantes tout en lui donnant l’opportunité – inimaginable dans les grandes démocraties – de revoir sa copie au détriment de l’accusé, qui paie pour les turpitudes de ses contradicteurs et demeure en détention. «Aujourd'hui (lundi 3 juin 2013), la Chambre préliminaire 1 de la CPI, à la majorité, le juge Fernandez de Gurmendi dissident, a ajourné l'audience de confirmation des charges et a demandé au Procureur de fournir des preuves supplémentaires ou de mener une enquête plus approfondie par rapport aux charges présentées contre Laurent Gbagbo conformément à l'article 61 (7) (c) (i) du Statut», indiquait une communiqué de la CPI.
Deux juges disent « non »
Mardi, en appel, deux des cinq juges ont fait exception à une décision unanime sur le rejet de la demande de mise en liberté provisoire du président Laurent Gbagbo. La juge Usacka (Lettonie) a exprimé un avis qui allait dans le droit fil du raisonnement de Maître Emmanuel Altit. Pour elle, la récente jugement d’ajournement de la décision de confirmation ou d’infirmation des charges « a jeté un doute sur les éléments de preuve » de l’Accusation et qu’il y a effectivement changement de circonstances. Le juge Kouroula (Finlande) a de son côté rejeté une bonne partie du raisonnement de ses collègues, qui ont rejeté l’appel de Gbagbo.
C’est suite au refus de la chambre préliminaire d’accorder une liberté provisoire au président Laurent Gbagbo détenu à La Haye, que son avocat, Me Altit, a interjeté appel devant la chambre d'appel de la Cour pénale internationale (Cpi). Celle-ci s’est réunie, hier mardi 29 octobre, pour analyser la requête du conseil du célèbre prisonnier de Scheveningen. Il ressort de la décision rendue qu’aucune liberté provisoire ne sera accordée au président Laurent Gbagbo. Il doit être maintenu encore en prison en attendant une autre décision le 11 novembre prochain.
Alors que la Cpi reconnaît qu’il y a insuffisance de preuves contre le président Laurent Gbagbo, elle s’échine à le garder dans les liens de la détention. Au même moment, cette Cour est tentée de desserrer l’étau autour de certaines personnalités telles que le président kenyan et son vice-président sur qui elle fait planer, comme sur le président Gbagbo, des faits allégués de crimes contre l’humanité. En plus de faire du deux poids deux mesures, la CPI se situe ouvertement dans un schéma juridico-politique contre le président Laurent Gbagbo à qui elle reproche sa popularité. Les parrains d’Alassane Ouattara craignent des troubles qui pourraient, selon les raisonnements de leurs esprits enfiévrés, être déclenchés à la suite de la libération du président Laurent Gbagbo.
Et déboucher sur son retour au pouvoir.
Le cas Laurent Gbagbo à la CPI renvoie indubitablement l’image d’une prise d’otage par les puissances occidentales. Et c’est pour cette raison qu’il suscite de la sympathie visà-vis du captif de La Haye. Dans une interview accordée au Nouveau Courrier, le mercredi 23 octobre dernier, Michel Galy, analyste, politologue français a révélé qu’ «il est bien connu qu’il y a une solidarité internationale envers Gbagbo, non seulement de ces chefs d’Etat ouest-africains mais de certains nombre de leaders d’opinion, d’hommes politiques ou intellectuels internationaux, en France en particulier»
Saint-Claver Oula