RABAT, 25 octobre 2013 (AFP) - Le journaliste marocain Ali Anouzla, dont l'incarcération sur des accusations d'"aide au terrorisme" a suscité de vives protestations au Maroc et à l'étranger, a été remis vendredi en liberté provisoire, selon un photographe de l'AFP. Après plus d'un mois passé dans la prison de Salé, près de Rabat, ce journaliste de renom, directeur de la version arabophone du site Lakome, a quitté les lieux à la mi-journée en compagnie de son avocat Me Hassan Semlali, selon la même source. Des membres de son comité de soutien étaient présents pour l'accueillir à sa sortie de prison. Un peu plus tôt, Me Semlali avait indiqué à l'AFP que la décision de libérer M. Anouzla avait "été prise". "Les formalités sont en cours", avait-il ajouté, alors qu'une demande de remise en liberté avait été déposée mardi auprès du juge d'instruction. M. Anouzla reste toutefois inculpé pour "aide matérielle", "apologie" et "incitation au terrorisme" et une nouvelle audience est prévue mercredi prochain. Aux termes de la loi antiterroriste votée en 2003 après une vague d'attentats à Casablanca, il risque jusqu'à 20 ans de prison, selon Amnesty International. Ali Anouzla, connu pour ses prises de position critiques envers les autorités, a été arrêté le 17 septembre à la suite de la diffusion d'un article sur une vidéo d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi). La version arabophone de Lakome avait, à cette occasion, publié un lien vers le site du quotidien espagnol El Pais, où la vidéo en question était disponible. Inédit, ce document d'Aqmi, d'une quarantaine de minutes, était intitulé "Maroc: le royaume de la corruption et du despotisme". Après plusieurs jours de garde à vue, Ali Anouzla avait été incarcéré à la prison de Salé, où sont détenues les personnes impliquées dans des affaires de terrorisme.
Cette affaire a entraîné plusieurs manifestations au Maroc pour demander sa libération, ainsi qu'un flot de protestations d'ONG internationales.
Les Etats-Unis ont également exprimé leur "inquiétude", tandis que Reporters sans frontières (RSF) avait demandé au chef de la diplomatie française, Laurent Fabius, d'intervenir auprès de son homologue marocain.
Les détracteurs de M. Anouzla lui reprochent d'avoir offert une tribune à Aqmi. Ses soutiens font valoir que Lakome avait d'emblée prévenu qu'il s'agissait d'une vidéo de "propagande".
Les versions arabophone et francophone de ce site indépendant ont récemment été bloquées au Maroc.
Les autorités ont affirmé que cette décision avait été prise conformément à une volonté exprimée par Ali Anouzla dans un communiqué. Mais d'autres responsables de Lakome ont dénoncé une "censure".
Human Rights Watch (HRW), Amnesty International et RSF ont condamné l'inculpation d'Ali Anouzla, "un prisonnier de conscience, détenu uniquement pour avoir exercé sa profession de journaliste", selon Amnesty.