Goldman Sachs aussi a blousé Kadhafi… Bakchich.info
La liste des bénéficiaires des largesses et de la naïveté auto-proclamée des dirigeants libyens s’allonge de jours en jours. Tout comme se multiplient de la part du nouveau pouvoir, les invitations à rendre le flouze…
Alors que se fait plus vraisemblable le financement de la campagne électorale de 2007 du Petit Nicolas par une puissance étrangère pas franchement amie, ce qui ne manquera pas de soulever de douloureuses et inédites questions de morale et de droit sur cette rive-ci de la méditerranée, le nouveau pouvoir libyen semble vouloir régler ses comptes avec ceux, et ils sont nombreux, qui se sont goinfrés sur le dos de l’ancien.
Rétrospectivement, il faut admettre que c’était tentant ; notamment pour les banksters qui bavaient comme des épileptiques devant la grosse soixantaine de milliards de dollars d’actifs du fonds souverain libyen dénommé Libyan Investment Authority (LIA) dont la mission consiste à faire fructifier le produit des exportations de pétrole et de gaz du pays.
Une petite entreprise encore classée aujourd’hui malgré une palanquée de moins-values aussi sévères qu’inexpliquées depuis 2009, au deuxième rang en Afrique et au 20ème mondial selon les calculs du Sovereign Wealth Fund Institute qui fait autorité sur le sujet.
Les petits malins qui pensaient que les archives disparaitraient dans l’anéantissement du régime dictatorial de Kadhafi en 2011 risquent d’en être pour leurs frais.
Une nouvelle preuve vient d’en être apportée par la plainte déposée le 21 janvier 2014 devant la Haute Cour de Londres (The Libyan Investment Authority v. Goldman Sachs International – dossier n° 14-310 High Court of Justice, Chancery Division) accompagnée le jour même, d’un communiqué anonyme tout en nuances qui pose le décor : « Goldman Sachs a abusé de la relation de confiance avec le nouvellement créé LIA, le fonds souverain propriété du peuple libyen qui a subi des pertes considérables… »
1,2 milliards de perte pour le fonds libyen, 350 millions d'honoraire pour les banquiers
Une nouvelle qui a semble-t-il réveillé les gendarmes de la bourse de New York (SEC) qui ont décidé de vérifier – avec la pleine coopération du LIA à l’enquête - si la banque qu’on ne présente plus n’aurait pas violé au passage, quelques articles des lois américaines anti-corruption.
Déjà, en mars dernier, l’ancien président du fonds le très rancunier Mohsen Derregia, avait annoncé la couleur en demandant à la Société Générale par quelle malchance les produits dérivés que la banque rouge et noire lui avait fourgués, avaient pu subir une perte de plus d’un milliard de dollars.
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Le record est battu cette fois-ci avec les instruments financiers sans valeur que Goldman Sachs aurait conseillé au LIA d’acheter début 2008 donc au pire moment de la crise financière, qui lui ont fait subir une perte estimée à 1,2 milliards de dollars, tout en faisant rentrer dans le tiroir-caisse de la banque plus de 350 millions d’honoraires. Si l’on peut dire.
En substance, les dirigeants de LIA ont acheté sans bien comprendre où ils mettaient les pieds, des « calls », des options d’achats à long terme de titres de 6 boites ultrasolides : l’assureur allemand Allianz, 3 banques au-dessus de tous soupçons à savoir l’espagnole Santander, l’américaine Citibank et l’italienne Unicrédit, et les deux mammouths de l’énergie que sont l’italienne ENI et – cocorico – notre Electricité de France nationale…
Pour nos lecteurs qui méprisent les arcanes de la haute finance – qui pourrait le leur reprocher par les temps qui courent ? – des « calls » sont des options d’achat. Autrement dit, des contrats donnant à un acheteur, le droit (mais pas l’obligation) d’acheter une action ou tout autre instrument financier désigné, à un prix fixé d’avance et dans un délai maximum fixé d’avance.
Des chocolats pour boucher le trou
L’acheteur réalisera alors un profit si le prix de l’actif financier visé augmente pendant la durée de l’option. Ce que les Libyens n’ont manifestement pas compris, du moins c’est ce qu’ils affirment aujourd’hui, c’est que si le prix de l’action visée ne monte pas, leur investissement réalisé sous cette forme devient sans valeur.
Quand les choses ont commencé à sentir un peu le roussi, les banksters de Goldman Sachs auraient alors offerts aux dirigeants du LIA, des cadeaux un brin humiliants pour des nababs de leur trempe comme des chocolats de luxe et des flacons d’aftershave ainsi qu’une mémorable virée au Maroc. Pour faire définitivement pencher la balance, la banque aurait également financé l’internat à Londres et à Dubaï, de Mustafa Mohamed Zarti, frère cadet du directeur général adjoint du LIA.
« Les circonstances exceptionnelles ont permis à Goldman Sachs de tirer profit des connaissances financières et juridiques extrêmement limitées des dirigeants du LIA pour exploiter sa position d’influence à son avantage d’une manière ayant généré des pertes colossales pour le LIA et des profits substantiels pour Goldman Sachs » a déclaré Abdulmagid Breish, l’actuel président du fonds en commentant le dépôt de plainte du fonds souverain libyen.
Des benêts sachant tout juste faire une addition selon leurs propres aveux, aux commandes d’une soixantaine de milliards de dollars, ça donne forcément des mauvaises pensées aux plus entreprenants des banksters.
C’est sans doute la raison par exemple, pour laquelle les experts de Goldman Sachs ont fortement conseillé à ceux du LIA de prendre au prix attractif de 200 millions de dollars, des options d’achat sur 22,3 millions d’actions Citigroup valorisées à l’époque 5,7 milliards de dollars. Ce serait bien le diable que le paquet de titres Citi ne vaille pas 5,9 milliards à l’échéance de l’option, ont affirmé les banksters aux libyens financièrement mal dégrossis. C’était sans compter avec la découverte des prêts immobiliers faisandés financés par les subprimes empoisonnés de Citi qui ont fini par salement amocher son cours. Et réduire à zéro, la valeur des 200 millions de dollars d’options prises sur l’action Citi. Et ainsi de suite…
«Nous pensons que la plainte est sans fondement et nous allons nous employer à le démontrer » a fait savoir la charmante Fiona Laffan, porte-parole de Goldman Sachs à Londres.
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Les Libyens, nouveaux Grecs
Des propos partiellement démentis par l’annonce, lors de l’assemblée générale annuelle des actionnaires de la banque l’an dernier, selon laquelle « Pour l’ensemble de nos employés, la vente, l’approbation et l’exécution d’une transaction pour un client de Goldman Sachs ont été radicalement modifiées ». Une déclaration qui avait donné lieu à des questions d’actionnaires auxquelles il avait été répondu que « le personnel a reçu une formation afin de s’assurer que nos clients ne sont plus aveuglés par les exposés de nos commerciaux sur les produits complexes ».
Des mots qui n’ont apparemment pas plus réchauffé le cœur des libyens que celui des grecs qui avaient aussi bénéficié, moyennant 300 millions de dollars d’honoraires cette fois, des conseils avisés de Goldman Sachs en 2001 pour maquiller les comptes nationaux afin d’aider à l’admission du pays au sein de l’Union Monétaire européenne…