A Dakar, le despote, Idriss Déby se lâche sur ses parrains français.
« Chantez à l'âne, il vous fera des pets. »
Le ministre français de la Défense, Jean Yves le Drian, l’a appris à ses dépens ce mardi 16 décembre lors de la clôture du premier Forum sur la paix et la sécurité à Dakar. En effet, l’enfant-roi des autorités françaises toute tendance confondue, Idriss Déby, a laissé échapper au nez et à la barbe de ses mentors quelques boules puantes incommodant M. Drian tout à sa joie d’avoir réussi son jubilé.
Dans une diatribe acerbe, le voici distillant dans l’auditoire, les effluves nauséabonds de la Franceafrique dont, soit dit en passant, il en est une des plus toxiques émanations.
« Toutes les difficultés sécuritaires de la région saharo-sahélienne sont nées en 2011 de l'intervention militaire occidentale en Libye... Le Mali est une conséquence directe de la Libye, Boko Haram est une conséquence de la Libye...la solution est dans les mains de l'Otan...ce sont eux qui ont créé cela. Nos amis européens et occidentaux ne nous ont pas demandé quand ils ont attaqué la Libye. Non plus quand ils ont divisé le Soudan en deux ».
Ainsi, s’érige-t-il en donneur de leçons. Mais en a-t-il vraiment la légitimité ? Est-il le mieux placé pour faire la morale ? Lui qui, 25 ans plutôt, était catapulté au pouvoir par l’Elysée et depuis, maintenu en place contre vents et marées, mais surtout contre les aspirations de changement démocratique des tchadiens. Lui le fraudeur multirécidiviste aux élections présidentielles tenues dans ce pays depuis 1996 et ce, toujours avec l’appui des successifs gouvernements français. Lui dont le salut en 2006 puis en 2008 contre les rébellions tchadiennes est dû à l’intervention des troupes françaises. Ses « amis européens et occidentaux » avaient-ils demandé la permission aux Tchadiens pour toutes ces interventions ? Mais de cela, le dictateur se garde bien d’en piper mot et ne s’en plaint évidemment pas. Cette pitrerie de Dakar n’est ni plus ni moins qu’une imposture dont le trublion- Président-Général-Sultan a l’art et révèle à suffisance, la nature félonne et foncièrement opportuniste du personnage.
Imposteur en Libye lui, le prétendu fidèle ami du guide libyen qui, avant même que ce dernier ne soit défait, s’était empressé de reconnaître le CNT et d’aller serrer dans ses bras ceux qui « ont fait assassiner Kadhafi ». Quant aux nombreux jeunes tchadiens désœuvrés, qu’il avait enrôlés comme mercenaires aux côtés de Kadhafi, deux semaines plutôt, qu’importe ! Ils passent par pertes et profits.
Imposteur au Mali où, dans une même logique de préserver son pouvoir et redorer un blason terni par 24 ans d’assassinats politiques, il n’a pas hésité un seul instant, à sacrifier des centaines de soldats tchadiens pour la gloire de ceux « qui ont créé le désordre dans la région ». Un convoi de chair à canon, parfait bouclier derrière lequel s’abrite les précieuses vies des militaires français. Des soldats tchadiens qui, pas plus tard que le mois dernier, ont dû menacer de se retirer de Kidal, pour qu’enfin leur solde soit payée. Des soldats disparus dont encore aujourd’hui, veuves et orphelins attendent toujours les indemnités de décès d’un mari ou d’un père. Oui, il est évident que l’engagement au Mali, ne relevait ni d’un acte généreux de défense des droits des Maliens, ni de la lutte contre le terrorisme. Comment peut-on croire que celui qui, dans son propre pays, a fait de la violation systématique des droits fondamentaux de ses concitoyens, un mode de gouvernance, puisse à l’autre bout du monde, aller défendre ces mêmes droits ?
Torture, viols, assassinats, arrestations arbitraires, justice expéditive, insécurité, peur...à Kidal, les militaires tchadiens n’ont pas été particulièrement dépaysés.
Comment admettre que le principal instigateur et soutien de l’horrible secte Boko Haram, se fasse le chantre de la lutte anti-terroriste ? Comment accorder le moindre crédit de pacificateur au père de la tristement célèbre Séléka qui en RCA, sème la mort et la désolation dans tous les foyers ?
En définitive, Dakar n’aura été qu’un épisode de plus des obscénités franco-africaines avec en tête d’affiche, l’hydre tchadien qui heureux de sa misérable prestation, s’en est allé boire son petit lait ou plus exactement, siphonner ses litres de bourbon sec. « On ne tue pas le serpent par la queue, on le tue par la tête ! » a-t-il dit à Dakar. En effet, et dans notre arabe dialectal tchadien, on désigne le serpent par le mot « débib », qui rime étrangement bien avec « Déby ».
Coïncidence ?
Texte / Annette Yoram Laokolé
Coordinatrice du CNCD
Le Chapô est de SLT