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Togo. La dictature françafricaine des Gnassingbé au pouvoir depuis un demi siècle

par Mondafrique 25 Avril 2015, 19:20 Togo Françafrique France Dictature Elections Faure Eyadema Articles de Sam La Touch

Togo. La dictature françafricaine des Gnassingbé au pouvoir depuis un demi siècle
Togo, les Gnassingbé au pouvoir depuis un demi siècle
Par  Par Louise Dimitrakis 
Mondafrique

Faure Gnassingbé, dont la famille est au pouvoir depuis quarante neuf ans, devrait être élu aujourd'hui samedi 25 avril, à l'issue d'un scrutin fraudé. Peut-on parler encore d'élections et de démocratie ?


Le père Gnassingbé Eyadéma avait été président du Togo de 1967, date de sa prise de pouvoir par un coup d'état (dirigé par la France, note de SLT), jusqu'à sa mort en 2005, soit trente huit ans de règne. Le fils Faure Gnassingbé, qui lui a succédé, grâce au soutien de l'armée (et de l'Etat français, lire également le rapport d'Amnesty international à ce sujet, note de SLT), brigue un nouveau mandat. S'il est élu, ce dont personne ne doute, il entamera sa onzième année de présidence. Soit au total pour la dynastie Gnassingbé, quarante-neuf ans de pouvoir sans partage.

Une démocratie d'opérette

Dans un pays où l'espérance moyenne de vie était en 2012 de 56 ans, il est donc possible de naître et de mourir en ayant connu qu'un seul président, Gnassingbé. Faure, qui n'est pas complètement sûr de son coup, a ordonné la fermeture des frontières terrestres du pays de ce vendredi soir à dimanche matin, "en vue de garantir des conditions optimales de sécurité" durant l'élection présidentielle.

Quand on parle d'élection présidentielle au Togo, il y a un mot de trop. La campagne électorale qui a eu lieu ces dernières semaines singe les grandes dramaturgies électorales des pays développés. On découvre le président sortant Faure Gnassingbé sur le terrain, en hélicoptère et voiture blindée, serrant des mains et distribuant quelques gâteries, mais toujours protégé par plusieurs rangées de gendarmes armés de mitrailleuses lourdes.

Son principal opposant, Jean Pierre Fabre, qui était déja en piste à l'époque de Gnassingbé Eyadéma, le père du président actuel, ne croit guère à la transparence du scrutin. "Nous sommes convaincus de gagner. Mais le pouvoir ne l'acceptera pas, donc il fraudera", proclame publiquement un de ses proches. Frontières fermées, urnes bourrées, gendarmes sur le qui vive, voici la drole de démocratie qui rêgne à Lomé. Seul point positif de cette mascarade, le Togo se trouve pour quelques jours sous les projecteurs internationaux. Si la fraude est trop voyante et les forces de l'ordre trop agressives, l'image du pays sera écornée. Les élections qui fragilisent les pouvoirs africains, sans les menacer vraiment, sont autant de gages que le Sud donne au Nord.

Elections, piège à pognon.

Les parodies démocratiques qui se jouent en Afrique constituent souvent pour les pays occidentaux le signal attendu pour distribuer des aides. Peu importe le flacon, semblent dire les grands donateurs internationaux, pourvu qu'on aie l'ivresse, même frelatée, d'un ersatz de démocratie.

Au Mali après l'opération Serval, les élections avaient constitué aux yeux du pouvoir français une urgence absolue. François Hollande, d'un mot malheureux, s'était dit "intraitable" sur la date envisagée, comme si le Mali n'était pas souverain. A peine remis de dix huit mois d'affrontements, de coups d'Etat et d'intervention étrangère, ce pays avait du organiser aux forceps, en à peine trois mois, un scrutin acrobatique, qui vit le candidat de la France, IBK, tout naturellement élu dans des conditions plus que contestables.

A peine les militaires français avaient mis dans la foulée le pied en Centrafrique, un pays en proie à la guerre civile, François Hollande annonçait là encore de prochaines élections présidentielles. Lesquelles n'ont toujours pas eu lieu. Et pour cause: La constitution centrafricaine n'a toujours pas été ratifiée, la radio d'Etat n'émet pas en de-hors de la capitale, les listes électorales sont inexistantes. Le forum qui devait avoir lieu à Bangui, le lundi 27 avril, pour organiser les modalités de ces élections hypothétiques, vient d'être remis à plus tard.

Ces scrutins qui n'en sont pas, au Togo et ailleurs, ne renforceront ni la paix, ni la stabilité en Afrique de l'Ouest.

En savoir plus sur le rôle de la France lors du coup d'Etat de 2005 mené par Faure Eyadéma pour succéder à son père au travers d'un trucage des élections et d'une répression sanglante des manifestants :

Amnesty International : TOGO : L’Histoire va-t-elle se répéter ? 21 juillet 2005

...Rôle des pays étrangers

De même qu’il est indispensable de mettre en cause les FAT et les milices directement responsables des très nombreuses atteintes aux droits humains commises dans le pays depuis des années, il est également important de réfléchir sur le rôle joué par certains pays étrangers, notamment la France, qui fournissent une assistance militaire au Togo.

La France maintient une coopération militaire avec le Togo depuis des décennies et celle-ci a continué après la décision prise par l’Union européenne en 1993 de suspendre sa coopération. Dans un document publié en 1999, Amnesty International constatait que l’assistance militaire technique de la France au Togo s’apparentait à un soutien tacite au Président Eyadéma(9). Six ans plus tard, la France n’a toujours pas réévalué l’assistance militaire technique avec le Togo et les tâches confiées aux assistants militaires français au sein de l’état-major togolais et des d’autres unités militaires ne semblent pas avoir été modifiées. Les informations disponibles sur le site de l’ambassade de France au Togo concernant la Mission de Coopération Militaire et de Défense française, indiquent que 20 militaires sont actuellement détachés au titre de la coopération militaire au Togo. L’aide directe en matériel s’élève à plus de soixante millions de francs entre 1989 et 2002(10). Amnesty International estime que le montant réel est supérieur aux chiffres communiqués dans les avis. A titre d’exemple, en 1999, le montant d’aide directe au Togo s’élevait à 5 millions de francs selon les rapports parlementaires de l’Assemblée et du Sénat. Or le ministre des affaires étrangères a révélé en réponse à la question écrite d’un député que l’aide matérielle pour le Togo s’élevait à 13,6 millions de francs(11).

Par ailleurs, Amnesty International a fait analyser des balles en caoutchouc ainsi qu’une grenade lacrymogène utilisées à Lomé lors de la répression d’avril. Il en ressort que ces matériels sont de fabrication française.

Amnesty International estime que la France doit s’assurer que les matériels de sécurité et de police qu’elle fournit et la formation qu’elle dispense ne sont pas utilisés pour commettre des violations des droits fondamentaux. L’organisation ne s’est pas prononcée sur la suspension de la coopération de l’UE avec le Togo. En revanche, elle est opposée aux transferts d’équipements ou de compétences dans les domaines militaire, de sécurité et de police lorsque l’on peut raisonnablement estimer qu’ils serviront à commettre des violations des droits de l’homme, comme des mauvais traitements, des actes de tortures, et des exécutions extrajudiciaires. Amnesty International estime qu’il est temps que la France tire les leçons des récentes violations des droits humains commises par les forces de sécurité togolaises et exige que la promotion et la protection des droits humains deviennent une priorité dans les relations entre la France et le Togo...:
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