Nous devons résister aux tentatives de transformer l'humanitarisme en prétexte pour la guerre, a déclaré Kevin Ovenden, car les guerres créent avant tout des réfugiés.
De l'île grecque de Mytiliene à Munich, nous assistons au pouvoir des gens ordinaires et en somme à un contrepoids collectif face à l'exclusion raciste, à la pauvreté et à la guerre.
En Grande-Bretagne, cela a forcé des journaux notoirement connus pour leurs positions hostiles aux migrants et aux réfugiés, comme le Sun et le Daily Mail, a se montrer hypocritement soucieux de ceux qui bravent la mort dans la mer d'Égée.
Quel que soit les contorsions des tabloïds et des politiciens, ce ne sont pas eux qui ont ce week-end entraîné une recrudescence de la solidarité humaine.
Tout d'abord, les réfugiés et les nouveaux arrivants vers l'Europe se battent pour leurs droits. Et sont en train de gagner de nombreuses batailles. Aucun État ou organisme intergouvernemental ne les a amenés ou transportés à Munich ou vers d'autres villes européennes.
Ils se sont battus eux-mêmes en franchissant les frontières l'une après l'autre pour y arriver.
Cet état de fait, et la réaction choquée à l'image de cet enfant noyé âgé de trois ans, Aylan Kurdi, a apporté une vague de solidarité internationale. Ce qui fait qu'à son tour plus de gens se déplacent.
En Grande-Bretagne, il y a un intérêt croissant pour ceux qui sont piégés dans le camp de Calais qui voudraient traverser la Manche.
Les gouvernements à travers l'Europe ressentent une certaine pression et sont amenés à se positionner sur ce sujet et sur ce qu'il faut faire. David Cameron est en train de préparer une réponse politique.
Lui et une section de l'establishment britannique, y compris la droite du Parti travailliste (comme en France, ndlr), se concertent pour s'en servir d'argument pour bombarder la Syrie. Le dernier en date est l'ancien archevêque de Canterbury, Lord Carey.
La dépravation morale de ce que Cameron (et François Hollande, ndlr) fait est révoltant. Il ne fait même pas l'effort d'essayer de nous convaincre que faire tomber plus de bombes sur la Syrie permettra en quelque sorte de mettre un terme à la guerre multiforme secouant la Syrie que la politique occidentale a contribué à fomenter.
Il sait qu'il n'y a pas des arguments convaincants. Voilà pourquoi il est si nerveux d'intensifier cette guerre. Contrairement à Tony Blair sur l'Irak qui est allé à la guerre en dépit d'une profonde division au Parlement, Cameron dit qu'il n'ira qu'avec le consensus parlementaire.
Alors pourquoi pousser à plus de bombardement, avec tant de doutes, même au sein de la hiérarchie militaire, avec une politique inapplicable visant à la fois au changement de régime et à l'arrêt de l'Etat islamique (EI) ?
Sa stratégie consiste à exploiter la souffrance de millions de personnes en exil afin de justifier une présence militaire britannique accrue au Moyen-Orient, même si cela doit créer encore plus de réfugiés. Il instrumentalise le décès d'Aylan pour cimenter des alliances avec des pays comme l'Arabie Saoudite, qui bombardent le Yémen voisin et refusent de prendre un seul réfugié syrien.
Cet insensibilité et ce cynisme sont stupéfiants. Nous assistons de la part de gens ordinaires à une recrudescence spontanée de solidarité. Cameron (et Hollande, ndlr) cherche à utiliser l'immédiateté du choc migratoire qui se passe actuellement pour instrumentaliser la solidarité en la détournant afin de légitimer un soutien à une guerre plus large et plus intense.
Voilà pourquoi il est absolument important que les mouvements de solidarité populaire empêchent Cameron (et Hollande, ndlr) d'intensifier cette guerre et de le forcer à faire à tout le moins ce que le gouvernement allemand a été obligé de faire en acceptant beaucoup plus de réfugiés .
La plupart des gens sentent à juste titre, l'opportunisme des politiciens qui tentent d'exploiter une tragédie. "Gardez la politique en dehors de ces affaires" est une réaction compréhensible...
Source : Stop The War Is Dropping More Bombs on Syria the Way to Solve the Refugee Crisis?