Le Figaro : La CIA aurait rencontré Ben Laden en juillet
© Le Figaro via Global Research
Dubaï, l’un des sept émirats de la fédération des Emirats arabes unis, au nord-est d’Abu Dhabi. Cette ville de 350 000 habitants a été le théâtre discret d’une rencontre secrète entre Oussama ben Laden et le représentant de la CIA sur place, en juillet. Un homme, partenaire professionnel de la direction administrative de l’hôpital américain de Dubaï, affirme que l’ennemi public numéro un a séjourné dans cet établissement hospitalier du 4 au 14 juillet.
En provenance de l’aéroport de Quetta au Pakistan, Oussama ben Laden a été transféré dès son arrivée à Dubaï Airport. Accompagné de son médecin personnel et fidèle lieutenant, qui pourrait être l’Égyptien Ayman al-Zawahari – sur ce point les témoignages ne sont pas formels -, de quatre gardes du corps, ainsi que d’un infirmier algérien, Ben Laden a été admis à l’hôpital américain, un bâtiment de verre et de marbre situé entre Al-Garhoud Bridge et Al-Maktoum Bridge.
Chaque étage comporte deux suites «VIP» et une quinzaine de chambres. Le milliardaire saoudien a été admis dans le très réputé département d’urologie du docteur Terry Callaway, spécialiste des calculs rénaux et de l’infertilité masculine. Joint par téléphone à de multiples reprises, le docteur Callaway n’a pas souhaité répondre à nos questions.
En mars 2000 déjà, l’hebdomadaire Asia Week publié à Hongkong s’inquiétait de la santé de Ben Laden, faisant état d’un grave problème physique précisant que ses jours étaient en danger à cause d’une «infection rénale qui se propage au foie et nécessite des soins spécialisés». Selon des sources autorisées, Ben Laden se serait fait livrer dans son repaire afghan de Kandahar l’ensemble d’un matériel mobile de dialyse au cours du premier semestre 2000. Selon nos sources, le «déplacement pour raison de santé de Ben Laden» n’est pas le premier. Entre 1996 et 1998, Oussama ben Laden s’est rendu plusieurs fois à Dubaï pour ses affaires.
Le 27 septembre, quinze jours après les attentats du World Trade Center, sur demande américaine, la Banque centrale des Emirats arabes unis a annoncé avoir ordonné le gel des comptes et des investissements de 26 personnes ou organisations soupçonnées d’entretenir des contacts avec l’organisation de Ben Laden, notamment auprès de la Dubaï Islamic Bank.
«Les rapports entre l’Emirat et l’Arabie Saoudite ont toujours été très étroits, expliquent nos sources, les princes des familles régnantes qui avaient reconnu le régime des talibans se rendaient souvent en Afghanistan. Un des princes d’une famille régnante participait régulièrement à des chasses sur les terres de Ben Laden qu’il connaissait et fréquentait depuis de nombreuses années.» Une liaison aérienne entre Dubaï et Quetta est d’ailleurs quotidiennement assurée par les compagnies Pakistan Airlines et Emirates. Quant aux avions privés émiratis ou saoudiens, ils desservent fréquemment Quetta où ils ne sont la plupart du temps ni enregistré ni consigné dans les registres de l’aéroport.
Durant son hospitalisation, Oussama ben Laden a reçu la visite de plusieurs membres de sa famille, de personnalités saoudiennes et émiraties. Au cours de ce même séjour, le représentant local de la CIA, que beaucoup de gens connaissent à Dubaï, a été vu empruntant l’ascenseur principal de l’hôpital pour se rendre dans la chambre d’Oussama ben Laden.
Quelques jours plus tard, l’homme de la CIA se vante devant quelques amis d’avoir rendu visite au milliardaire saoudien. De sources autorisées, l’agent de la CIA a été rappelé par sa centrale le 15 juillet, au lendemain du départ de Ben Laden pour Quetta.
A la fin juillet, les douaniers émiratis arrêtent à l’aéroport de Dubaï un activiste islamiste franco-algérien, Djamel Beghal. Début août, les autorités françaises et américaines sont alertées. Interrogé par les autorités locales à Abu Dhabi, Beghal raconte qu’il a été convoqué en Afghanistan fin 2000 par Abou Zoubeida – un responsable militaire de l’organisation de Ben Laden, Al Quaida. La mission de Beghal: faire sauter l’ambassade des Etats-Unis, avenue Gabriel, près de la place de la Concorde, à son retour en France.
Selon différentes sources diplomatiques arabes et les services de renseignements français eux-mêmes, des informations très précises ont été communiquées à la CIA concernant des attaques terroristes visant les intérêts américains dans le monde, y compris sur le territoire de l’Union. Un rapport de la DST daté du 7 septembre rassemble la totalité de ces données, précisant que l’ordre d’agir devait venir d’Afghanistan.
En août, à l’ambassade des Etats-Unis à Paris, une réunion d’urgence est convoquée avec la DGSE et les plus hauts responsables des services américains. Extrêmement inquiets, ces derniers présentent à leurs homologues français des demandes de renseignements très précises concernant des activistes algériens, sans toutefois s’expliquer sur le sens général de leur démarche. A la question «que craignez-vous dans les jours qui viennent?», les Américains opposent un mutisme difficilement compréhensible.
Les contacts entre la CIA et Ben Laden remontent à 1979 lorsque, représentant de la société familiale à Istanbul, il commença à enrôler des volontaires du monde arabo-musulman pour la résistance afghane contre l’Armée rouge. Enquêtant sur les attentats d’août 1998 contre les ambassades américaines de Nairobi (Kenya) et de Dares-Salaam (Tanzanie), les enquêteurs du FBI ont découvert que les traces laissées par les charges proviennent d’un explosif militaire de l’armée américaine et que cet explosif a été livré trois ans auparavant à des Afghans arabes, les fameuses brigades internationales de volontaires, engagés au côté d’Oussama ben Laden durant la guerre d’Afghanistan contre l’armée soviétique.
Poursuivant ses investigations, le FBI découvre des «montages» que la CIA avait développés avec ses «amis islamistes» depuis des années. La rencontre de Dubaï ne serait donc que la suite logique d’une «certaine politique américaine».
The Guardian (November, the 1rst, 2001) CIA agent alleged to have met Bin Laden in July French report claims terrorist leader stayed in Dubai hospital.
Two months before September 11 Osama bin Laden flew to Dubai for 10 days for treatment at the American hospital, where he was visited by the local CIA agent, according to the French newspaper Le Figaro.
The disclosures are known to come from French intelligence which is keen to reveal the ambiguous role of the CIA, and to restrain Washington from extending the war to Iraq and elsewhere.
Bin Laden is reported to have arrived in Dubai on July 4 from Quetta in Pakistan with his own personal doctor, nurse and four bodyguards, to be treated in the urology department. While there he was visited by several members of his family and Saudi personalities, and the CIA.
The CIA chief was seen in the lift, on his way to see Bin Laden, and later, it is alleged, boasted to friends about his contact. He was recalled to Washington soon afterwards.
Intelligence sources say that another CIA agent was also present; and that Bin Laden was also visited by Prince Turki al Faisal, then head of Saudi intelligence, who had long had links with the Taliban, and Bin Laden. Soon afterwards Turki resigned, and more recently he has publicly attacked him in an open letter: "You are a rotten seed, like the son of Noah".
The American hospital in Dubai emphatically denied that Bin Laden was a patient there.
Washington last night also denied the story.
Private planes owned by rich princes in the Gulf fly frequently between Quetta and the Emirates, often on luxurious "hunting trips" in territories sympathetic to Bin Laden. Other sources confirm that these hunting trips have provided opportunities for Saudi contacts with the Taliban and terrorists, since they first began in 1994.
Bin Laden has often been reported to be in poor health. Some accounts claim that he is suffering from Hepatitis C, and can expect to live for only two more years.
According to Le Figaro, last year he ordered a mobile dialysis machine to be delivered to his base at Kandahar in Afghanistan.
Whether the allegations about the Dubai meeting are confirmed or not, the wider leaks from the French secret service throw a worrying light on the rivalries and lack of coordination between intelligence agencies, both within the US and between western allies.
A familiar complaint of French intelligence is that collaboration with the Americans has been essentially one-way, with them happy to receive information while giving little in return.
Traduction :
Selon le journal français, Le Figaro, deux mois avant le 11 septembre, Oussama Ben Laden s'est envolé à Dubaï pour 10 jours afin d’être soigné à l'hôpital "Américain", où un agent de la CIA local lui rendit visite.
Les révélations sont connues comme émanant du renseignement français qui est désireux de révéler le rôle ambigu de la CIA, et d'empêcher Washington d’étendre la guerre en Irak et ailleurs.
Il a été rapporté que Ben Laden est arrivé à Dubaï le 4 juillet de Quetta au Pakistan avec son docteur personnel, une infirmière et quatre gardes du corps, pour être traité au département d’urologie. Alors qu’il était là-bas plusieurs membres de sa famille et des personnalités saoudiennes ainsi que de la CIA, lui ont rendit visite.
Le chef de la CIA a été vu dans l’ascenseur, pour aller voir Ben Laden, et plus tard, cela a été prouvé, il s'en est vanté à ses amis à propos de cette visite. Très peu de temps après, il fut renvoyé à Washington.
Les sources du renseignement ont déclaré qu’un autre agent de la CIA était aussi présent ; et que Ben Laden a aussi reçu la visite du Prince Turki al Faisal, alors directeur des Renseignements saoudiens, qui a des liens profonds avec les Talibans et Ben Laden. Peu après Turki démissionna, et plus récemment il l’a publiquement attaqué dans une lettre ouverte : « tu es une graine pourrie, comme le fils de Noé ».
L’hôpital "américain" de Dubaï a catégoriquement nié que Ben Laden ait été soigné là-bas.
La nuit dernière Washington a démenti cette histoire.
Des jets privés appartenant à de riches princes des pays du Golfe volent fréquemment entre Quetta et les Émirats, souvent pour des « voyages » luxurieux dans des territoires favorables à Ben Laden. D’autres sources confirment que ces voyages ont fourni des opportunités aux Saoudiens pour contacter les terroristes et les Talibans, depuis leur lancement en 1994.
D’après Le Figaro, l’année dernière Ben Laden a commandé une machine à dialyse mobile afin qu’elle soit livrée à sa base de Kandahar en Afghanistan.
Que les allégations au sujet de la réunion de Dubaï soient confirmées ou non, les fuites des services secrets français jettent une lumière inquiétante sur les rivalités et le manque de coordination entre les agences de renseignement, tant au sein des Etats-Unis qu’au sein des alliés occidentaux.
Les renseignements français se plaignent souvent que la collaboration avec les Etatsuniens se fait essentiellement à sens unique, ces derniers étant heureux de recevoir des informations tout en en donnant peu en retour.
Source : Guardian le 1er Novembre 2001
Le point de vue de Libération (1er novembre 2001) : Ben Laden et la rumeur de Dubaï
Sous le titre «Juillet 2001: Oussama ben Laden rencontre la CIA à Dubaï», le Figaro affirmait hier en Une que le «représentant local de la CIA» aurait rencontré le chef d'Al-Qaeda à l'hôpital américain de l'émirat, «où [Ben Laden] a été soigné pour une maladie rénale entre le 4 et le 14 juillet 2001». Mais l'information selon laquelle Ben Laden souffrirait de troubles rénaux avait déjà été publiée le 6 février 2000 par le journal arabe Al-Hayat. Et le directeur de l'hôpital de Dubaï, Bernard Koval, a démenti formellement auprès de l'AFP ces «informations erronées et fallacieuses». Ben Laden «n'a jamais fait partie de nos patients et n'a jamais été soigné ici», assure-t-il. Le Figaro cite en fait comme seule source «un partenaire professionnel de la direction administrative de l'hôpital» qui aurait vu le supposé «agent de la CIA [...] empruntant l'ascenseur de l'hôpital pour se rendre dans la chambre d'Oussama ben Laden». Cet agent serait «connu de beaucoup de gens à Dubaï» (sic), mais son nom n'est pas cité. Ce curieux article (qui invoque aussi pêle-mêle un «rapport de la DST» et «diverses sources diplomatiques arabes»), conclut que «la rencontre de Dubaï ne serait que la suite logique d'une "certaine politique américaine"» et va jusqu'à suggérer que la CIA était au courant des attentats qui allaient frapper le territoire américain le 11 septembre, rumeur fort répandue... à Dubaï.