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La complicité britannique dans la campagne de terreur menée par l'Arabie saoudite contre le Yémen (Medialens)

par Medialens 17 Septembre 2016, 14:03 Yemen Crimes de guerre Grande-Bretagne Arabie Saoudite Crimes contre l'humanité Bombardements Ventes d'armes Impérialisme Articles de Sam La Touch

Les médias Occidentaux 'traditionnels' sont, presque par définition, le dernier espace à consulter pour obtenir un rapport honnête des crimes Occidentaux. Il suffit de considérer le cas épouvantable du Yémen ravagé par la guerre et par la catastrophe humanitaire en cours.

Depuis mars 2015, 'une coalition' d'états arabes sunnites menée par l'Arabie Saoudite et soutenue par les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et la France (ainsi qu'Israël, NdT), a laissé tomber des tonnes de bombes sur le Yémen voisin. L'échelle des bombardements est indiquée dans un article récent de Felicity Arbuthnot - en un an, 330.000 maisons, 648 mosquées, 630 écoles et instituts et 250 installations de santé ont été détruites ou endommagées.

Le but exposé de l'assaut dévastateur de l'Arabie Saoudite sur le Yémen est de rétablir le président Yéménite, Abd-Rabbu Mansour Hadi et de battre les rebelles Houthi qui sont alliés avec l'ancien président, Ali Abdullah Saleh. Les Saoudiens affirment que les Houthis, qui contrôlent la capitale du Yémen, Sanaa, constituent une armée de procuration pour l'Iran : c'est toujours cette même propagande utile pour justifier le soutien occidental et 'justifier' l'intervention.

Philip Hammond, qui était le secrétaire de défense britannique quand les bombardements saoudiens ont commencé en 2015, avait promis :

"Nous soutiendrons les Saoudiens de façon pratique sauf pour l'engagement dans le combat."

Le gouvernement britannique n'a pas menti ; à cet égard au moins. La campagne contre le commerce des armes a révélé que les ventes d'armes britanniques à l'Arabie Saoudite depuis le début des attaques contre le Yémen incluent pour 2.2 milliards de livres (£) d'avions, d'hélicoptères et de drones, ainsi que 1.1 milliards £ de missiles, de bombes et de grenades et presque un demi-million de livres de véhicules blindés et de chars. Il y a seulement quelques jours, il a été révélé que la Grande-Bretagne est maintenant le deuxième plus grand vendeur d'armes dans le monde. Y a-t-il un signe plus clair de la nature corrompue de politique étrangère britannique ?

Peut-être que oui. Le mois dernier, Oxfam a rapporté que plus de 21 millions de personnes au Yémen, sur une population totale d'environ 27 millions, ont besoin d'aide humanitaire, plus que dans d'autre pays. Plus de 6,000 personnes ont été tuées, plus de 3 millions déplacés et plus de 14 millions subissent la faim et la malnutrition.

Amnesty International rapporte que des bombes à fragmentation britanniques ont été utilisées dans des attaques meurtrières sur des civils. Les enfants sont parmi ceux qui ont été tués et mutilés. L'organisation de défense des droits de l'homme a déclaré que le Royaume-Uni devrait arrêter toutes ventes d'armes à l'Arabie Saoudite. Amnesty a aussi appelé à ce que l'Arabie Saoudite soit exclue du conseil des droits de l'homme des Nations Unies à cause de 'ses violations brutales et systématiques de droits de l'homme', tant chez elle qu'à l'étranger.

"Ils appellent cela mort naturelle mais ce n'est pas vrai"

Dans un documentaire en deux parties pour BBC Newsnight l'année dernière, Gabriel Gatehouse a rapporté la situation critique des civils au Yémen, y compris le ciblage des infrastructures civiles par les Saoudiens. Le journaliste de la BBC a aussi fait allusion à 'la dimension britannique' dans laquelle 'les efforts de la coalition saoudienne sont soutenus par la Grande-Bretagne et les États-Unis' (et la France et Israël, NdT), avec des armes fournies par les Britanniques utilisées par les Saoudiens. En dépit d'un travail d'investigation inhabituel, sa critique de la politique étrangère britannique a été occultée et par la suite non entretenue par BBC News (avec des exceptions récentes relativement limitées comme nous en discuterons plus tard).

Peter Oborne est un rare exemple de journaliste occidental informant à partir du Yémen, indiquant explicitement la complicité britannique dans le cauchemar que vit ce pays. Avec son collègue Nawal Al-Maghafi, Oborne note dans un article récent que :

'Nous avons découvert la preuve indiscutable que la coalition, soutenue par le Royaume-Uni, membre permanent du conseil de sécurité de l'ONU, visait des civils Yéménites en infraction flagrante des règles de guerre.'

En même temps, l'Arabie Saoudite a imposé un blocus brutal au Yémen empêchant des matières premières essentielles d'entrer dans le pays. Un docteur de l'hôpital universitaire de Sanaa a déclaré à Oborne :

'Nous ne pouvons pas obtenir de fournitures médicales. Des anesthésiants. Des médicaments pour les reins. Il y a des bébés qui meurent dans des incubateurs parce que nous ne pouvons obtenir de traitement pour les traiter. '

Le docteur estime que 25 personnes mouraient chaque jour à l'hôpital à cause du blocus. Il a continué :

'Ils appellent cela mort naturelle. Mais ce n'est pas vrai. Si nous avions les médicaments ils ne seraient pas morts.

'Je considère que c'est comme s'ils avaient été tués par un raid aérien, parce que si nous avions les médicaments ils seraient toujours vivants. '

Ceci est assez choquant. Mais Oborne ajoute qu'il y a :

'La preuve évidente que la coalition menée par les Saoudiens a délibérément visé des hôpitaux à travers le pays. Quatre hôpitaux de MSF [Médecins Sans Frontières] ont été frappés par des raids aériens saoudiens avant le retrait de cette organisation du pays, malgré que MSF par prudence ait donné ses positions GPS aux autorités saoudiennes.'

Oborne, qui a démissionné de son poste d'analyste politique pour le Telegraph l'année dernière, considère que la complicité occidentale dans le cauchemar que vit le Yémen a joué un rôle central. Il indique que la Grande-Bretagne a continué à vendre des armes en Arabie Saoudite et à ses partenaires, malgré les preuves abondantes des infractions au droit humanitaire international présentées par des organisations de défense des droits de l'homme.

Ceci n'est pas sans rappeler le rôle britannique honteux dans l'armement de l'Indonésie tandis que le gouvernement indonésien a écrasé la tentative d'indépendance du Timor Oriental, tuant autour de 200,000 personnes - environ un tiers de sa population. Noam Chomsky l'a décrit comme 'un massacre' à caractère 'presque génocidaire'. Il a noté que :

'Avant 1998, la Grande-Bretagne était devenue le fournisseur principal d'armes en Indonésie ... malgré les fortes protestations d'Amnesty International, des dissidents indonésiens et des victimes Timoraises. Les ventes d'armes en Indonésie constituaient au moins un cinquième des exportations britanniques (évalué à un milliard de livres), mené par l'aérospatiale britannique '.
(Noam Chomsky, 'Rogue States', Pluto Books, 2000, p. 232).

Dans le cas présent du Yémen, le Ministère des Affaires Étrangères britannique a à plusieurs reprises nié que l'Arabie Saoudite avait violé les droits de l'homme, affirmant jusqu'à il y a deux ou trois mois que la propre 'évaluation' des FO avaient dégagé les Saoudiens de tous méfaits. Comme le note Oborne, cependant, le 21 juillet de cette année, dernier jour d'ouverture du Parlement avant la longue pause estivale:

'Le gouvernement britannique a été forcé d'admettre qu'il avait à plusieurs reprises induit en erreur le Parlement sur la guerre au Yémen. '

Il s'avère qu'aucune des soit-disant 'évaluations' n'avait eu lieu; une reconnaissance réticente et potentiellement destructrice dont les ministres avaient clairement espéré qu'elle puisse échapper tranquillement sans examen minutieux approprié. Oborne le décrit comme 'un moment sombre de l'embarras officiel. ' Vous devez chercher laborieusement dans le site Web de BBC News pour retrouver la mention succinte de cet épisode honteux.

De plus, la Grande-Bretagne a soutenu la résolution du conseil de sécurité de l'ONU soutenant un blocus saoudien et le Royaume-Uni a aussi fourni aux Saoudiens l'intelligence et l'assistance logistique.

'Peut-être de façon la plus cruciale, la Grande-Bretagne et les États-Unis (ainsi que la France et Israël, NdT) ont fourni à l'Arabie Saoudite la couverture diplomatique. L'année dernière, la Grande-Bretagne et les États-Unis ont aidé à bloquer une initiative hollandaise au Conseil des Droits de l'homme de l'ONU pour une enquête indépendante sur les violations du droit humanitaire international.'

Dans un documentaire accompagnant le rapport sur la destruction de la capitale du Yémen, Sanaa, Oborne termine :

"Cette ville ancienne de Sanaa est aussi extraordinaire, aussi inestimable, aussi unique que n'importe lequel des chefs-d'œuvre de civilisation occidentale - comme Florence ou Venise. Imaginez juste le tollé si des bombes étaient déversées sur Florence ou Venise. Mais parce que ceci est l'ancienne Sanaa, au Yémen oublié, personne ne s'en soucie. '


Et le nouveau ministre des Affaires Étrangères britannique, Boris Johnson, a durement rejeté les preuves abondantes des infractions saoudiennes du droit humanitaire international. Le rédacteur Patrick Wintour éditeur du Guardian écrit au sujet de l'affirmation de Johnson que les Saoudiens ne sont pas 'dans une infraction claire' du droit humanitaire :

'Son jugement est basé en grande partie sur une enquête menée par les Saoudien sur huit incidents controversés, y compris le bombardement des hôpitaux.'

Wintour note que Johnson 'défendait la crédibilité d'une enquête menée par les Saoudiens disculpant le ciblage des Saoudiens'. Tout commentaire semble superflu. Il ajoute alors une déclaration de Johnson très révélatrice :

'Ils [les Saoudiens] ont le meilleur aperçu de leurs propres procédures et pourront conduire les enquêtes les plus minutieuses et concluantes. Cela permettra aussi aux forces de la coalition de mettre au point ce qui s'est mal déroulé et appliquer les leçons apprises de la meilleure façon possible. C'est la norme que nous admettons nous-même ainsi que nos alliés.'

En effet, ceci est la même norme que le monde a pu observer avec horreur l'année dernière concernant le terrible bombardement par les USA d'un hôpital de MSF à Kunduz en Afghanistan que les Etats-Unis ont examiné et pour lequel ils se sont en grande partie disculpés.

Boris Johnson écarte les preuves incontestables des infractions sérieuses du droit international dans un mouvement cynique pour maintenir les ventes d'armes britanniques lucratives en Arabie Saoudite et protéger les liens stratégiques avec un royaume brutal de décapiteurs et de tortionnaires. Tout ceci dément son image médiatique soigneusement entretenue comme un ministre aimablement empoté et en grande partie inoffensif. En réalité, il est un politicien dangereux, d'extrême droite avec trop de pouvoir.

Tristement, même le jugement de Peter Oborne, souvent excellent, s'est considérablement altéré suite à son retour du Yémen quand il a appelé Johnson 'à agir courageusement pour remettre à niveau les relations avec Riyad [c'est-à-dire l'Arabie Saoudite]' :

'Boris Johnson a le potentiel d'être un des grands secrétaires étrangers britanniques de l'ère moderne.'

Tristement, ces propos d'Oborne ne semblent pas même être ironiques...

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