Comment les Français ont financé sans le savoir la Fondation Clinton
Par Vincent Jauvert
Nouvel Obs
ENQUÊTE. Quel drôle de pacte unit un retraité de la politique française, l'ancien ministre Philippe Douste-Blazy, candidat à la direction de l'OMS, au charismatique 42e président des Etats-Unis et à sa femme, Hillary ?
Avez-vous pris l'avion ces dix dernières années, ne serait-ce qu'une fois ? Oui ? Eh bien, sans le savoir, vous avez financé la très controversée Fondation Clinton. Grâce à vous, la France a même longtemps été la principale donatrice de cette institution caritative, objet d'incessantes attaques de la droite américaine.
Mais rassurez-vous : en donnant votre obole – par un mécanisme que l'on va vous expliquer – à cette ONG admirable mais peu transparente, vous avez fait œuvre triplement charitable. Vous avez contribué à sauver de centaines de milliers d'enfants en Afrique. Au formidable rebond de Bill Clinton sur la scène internationale. Et à l'improbable résurrection d'un homme politique français un peu falot qui avait disparu du paysage en 2007 : l'ancien maire de Lourdes, le cardiologue Philippe Douste-Blazy, alias "Douste Blabla", qui pourrait miraculeusement devenir, en juin prochain, le directeur général de la prestigieuse Organisation mondiale de la Santé (OMS).
Cette histoire à tiroirs, où s'entremêlent nobles sentiments et passions plus vulgaires, commence le 5 juillet 2005 dans la maison des Clinton, à Chappaqua, au nord de New York. Ce jour-là, Philippe Douste-Blazy, que Jacques Chirac vient de nommer patron du Quai-d'Orsay, se présente, un peu ému, chez le couple le plus célèbre de la planète. Celui que la presse surnommera bientôt "Mickey d'Orsay", à cause de ses gaffes à répétition, tient absolument à rencontrer "le plus grand homme politique vivant".
Il parle très mal anglais, mais il rêve de conquérir un tel "allié exceptionnel". Pour le séduire, il a un plan et les poches pleines. Paris mettra bientôt en place une taxe sur les billets d'avion en partance de France (de 1 à 45 euros par vol selon les destinations et les classes). La manne de cette "taxe Chirac" sera considérable : plusieurs centaines de millions d'euros...