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Un député français au sujet des Algériens : « On ne sait pas comment avancer avec eux ! » (Middle East Eye)

par MEE 26 Janvier 2017, 03:30 Guy Tessier Jean Glavany Rapport France Algérie Stigmatisation

Deux députés français ont présenté le rapport de leur mission parlementaire au Maghreb. Ils soulignent « la grande fragilité » de pays qui, pour l’Europe, présentent un caractère stratégique

Guy Teissier, député dans les Bouches-du-Rhône et président de la communauté urbaine Marseille Provence Métropole, présente le rapport de la mission parlementaire Europe-Maghreb le 18 janvier à l'Assemblée nationale (capture d'écran)

 

Après avoir mené pendant six mois une mission parlementaire dans les pays du Maghreb, deux députés français – Jean Glavany, député de gauche, du Parti socialiste (PS) et Guy Teissier, député de droite (Les Républicains) – ont présenté la semaine dernière leur rapport d’information devant l’Assemblée nationale.

« L’actualité de cette région est souvent éludée par l’actualité au Moyen-Orient mais les pays d’Afrique du nord, ont pour les Français et pour l’Europe, un caractère stratégique », souligne Guy Teissier. En tant que pays émergents, ils constituent « un espace de croissance potentiellement vital » et leur position stratégique, entre Méditerranée et Sahel, les met au premier plan des question migratoires et sécuritaires.

Pourtant, comme le souligne Jean Glavany,  « Si on regarde le cœur du Maghreb, cette trilogie Tunisie-Algérie-Maroc, on découvre une double fragilité politique et sécuritaire. Je suis frappé de voir à quel point tout tourne autour des hommes et de leur fragilité ». Et de citer en exemple le président Béji Caïd Essebsi, « 89, bientôt 90 ans », le chef d’État algérien Abdelaziz Bouteflika, dont la santé est une source de préoccupation et le roi du Maroc Mohammed VI, « un roi courageux, moderne, visionnaire à certains égards », mais « un roi malade – tout le monde sait qu’il souffre d’une maladie à évolution lente, qu’il est soigné à coups de cortisone et que lui aussi représente des pouvoirs personnels sur lesquels pèsent beaucoup de points d’interrogation. »

L’Algérie, en « danger de délitement »

« La question qui préoccupe tous les esprits, c’est la succession d’Adelaziz Bouteflika », affirme le député de droite. Tout en notant que de nombreux mouvements internes ont eu lieu dans les administrations, dans l’armée et dans les milieux économiques, le parlementaire précise que « ces mouvements sont difficiles à interpréter tant leur finalité est opaque ».

La baisse de la rente pétrolière a été « une catastrophe ». « Nous avons trouvé un pays une impression de fonctionnement mais où tout semble artificiel, sous une chape de plomb. » Et le rythme de la croissance est « trop faible » pour résorber le chômage qui touche 30 % des 16- 24 ans.

« Cette fragilité économique est d’autant plus inquiétante que la société est marquée par des mouvements centrifuges importantes », relève encore le rapporteur. « Ces forces font peser sur le pays un danger de délitement et d’un retour aux solidarités régionales vécues comme plus protectrices dans un contexte économique dégradé. »

Quant à la relation bilatérale, marquée par des moments de crispations et de réconciliation, Guy Teissier la résume par cette phrase : « Je t’aime moi non plus ». « Il y a une espèce de discours permanent avec la rue, les acteurs économiques, les journalistes, un besoin de France et en même temps un repoussoir de France, on ne sait pas bien comment avancer avec eux. Ils voudraient de la France, sans les Français».

 

Le Maroc est entré « dans l’ère du bipartisme »

En saluant Mohammed VI, qui, dès 2011, « a entamé une réforme politique intelligente », les députés estiment que le Maroc « bien engagé sur la voie des réformes » est aussi entré dans une ère nouvelle », celle du bipartisme, avec d’un côté le Parti de la justice et du développement et de l’autre le Parti authenticité et modernité (PAM, socio-libéral).

Malgré des avancées importantes en matière d’éradication de la pauvreté, de baisse de l’analphabétisme, l’amélioration de la couverture santé et le relogement de 50 % des habitants des bidonvilles, ils notent toutefois que « les demandes d’accès à la justice sociale, à l’éducation, à l’emploi, à la dignité, n’ont pas trouvé toutes leurs satisfactions ».

Et qu’il existe, comme dans les pays voisins, une fracture importante entre le nord « riche, plus actif, où se concentrent les écoles, les milieux culturels, intellectuels » et le sud « qui peine à être mis au niveau de ce que connaît la partie nord du pays ».

« Je ne parle pas du grand sud, où le Maroc peine à hisser l’ancien Sahara espagnol au même niveau que le reste et qui leur coûte deux points de PIB », rappelle Guy Teissier.

 

Tunisie : un gouvernement et une armée à la peine

« Le pays, symbole de la révolution arabe, a achevé sa transition démocratique mais la démocratie reste extrêmement fragile », souligne Guy Teissier. Si les revendications de dignité de justice sociale sont « en partie satisfaites », « beaucoup reste à faire vu les conditions de vie qui ne cessent de se dégrader depuis 2011 ».

Au point qu’ils estiment « grand », le risque de nouvel épisode « d’éruption sociale » dans un contexte où se cumulent chômage, difficultés économiques, colère populaire et où les autorités « peinent à trouver une réponse rapide et efficace. »

Au plan sécuritaire, le risque de déstabilisation reste selon eux aussi très important. « L’armée tunisienne peine à éradiquer ces bourgeons de terrorisme pour la plupart affiliés à al-Qaïda ou à l’État islamique ». Ils reconnaissent que les forces de sécurité ont fait « des efforts de mise à niveau » mais qu’elles n’ont « ni les capacités ni l’organisation nécessaires pour contrecarrer les terroristes qui veulent voir le modèle tunisien tomber ».

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