Dans son dernier bilan annuel, Reporters sans frontières (RSF) fait reculer la France à la 45èmeplace au classement mondial de la liberté de la presse. La raison avancée est des plus claires : « L’appropriation des médias par une poignée d’hommes issus de la finance et de l’industrie constitue la principale raison du recul relatif de la France. Le phénomène, déjà prégnant ces dernières années, s’est accentué. »

Publié chaque année depuis 2002 à l’initiative de Reporters sans frontières (RSF), le Classement mondial de la liberté de la presse est un outil de plaidoyer essentiel fondé sur le principe de l’émulation entre Etats. Sa notoriété lui confère une influence croissante auprès des autorités publiques nationales. Trop de chefs d’Etat ou de gouvernement redoutent chaque année sa parution. Le Classement est une référence, citée par les médias du monde entier et utilisée par les diplomates et les organisations internationales telles que les Nations unies et la Banque mondiale.En France comme à l’étranger, le paysage médiatique se confond de plus en plus avec le classement des grandes fortunes. À l’instar de Xavier Niel, une poignée de milliardaires s’est emparée de la majorité des grands médias français : « Quand les journalistes m’emmerdent, je prends une participation dans leur canard et ensuite ils me foutent la paix ». Un phénomène de concentration de la propriété des médias qui n’est pas nouveau mais qui s’est accéléré dangereusement ces dernières années : rapprochement progressif de Libération, L’Express, RMC et BFMTV au sein du groupe de Patrick Drahi ; fusion de L’Obs et du Groupe Le Monde contrôlé par le trio Bergé/Niel/Pigasse ; rachat du Parisien/Aujourd’hui en France par Bernard Arnault, déjà propriétaire des Échos et de Radio classique ; mariage forcé entre I-Télé, Canal+ et Direct Matin sous la férule de Vincent Bolloré…

 

Ces grandes manœuvres ont des répercussions déjà bien visibles sur la qualité de l’information et sur les conditions de travail des journalistes, accélérant des phénomènes qui témoignaient déjà d’une dégradation de l’information et de ses conditions de production : conflits d’intérêts, course au clic et à la rentabilité, censure et autocensure des journalistes, licenciements politiques, plan sociaux […]