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La CIA contre l’Equateur (TeleSur)

par TeleSur 7 Février 2017, 18:53 CIA Equateur Armée US Impérialisme USA Articles de Sam La Touch

La CIA contre l’Equateur
TeleSur

Traduction : Françoise Lopez pour Bolivar Infos

 

La CIA contre l’Equateur (TeleSur)
Le livre « La CIA contre l’Amérique Latine, chapitre spécial Equateur » de Jaime Galarza et Francisco Herrera, révèle l’intervention et l’ingérence de cet organisme dans la région grâce au témoignage de Philip Agee, espion de la CIA de 1963 à 1968 qui a travaillé plusieurs années en Equateur.

 

Le but de la CIA était la rupture des relations de l’Equateur avec Cuba et le renversement du président équatorien Carlos Arosemena. Ces deux objectifs furent atteints. « Dans les deux cas, la CIA a basé sa campagne sur l’anticommunisme et a utilisé un incroyable enchevêtrement de mensonges, de falsifications, de terrorisme, d’actes sanglants, d’achat et de vente de consciences, » raconte le livre. Dans la liste des collaborateurs et des informateurs de la CIA en Equateur de ces années-là, figuraient 200 hauts fonctionnaires parmi lesquels le sénateur Reinaldo Varea Donoso qui recevait 800 dollars par mois de l’agence.

L’ex agent détaille les méthodes de travail des services spéciaux des Etats-Unis en Amérique Latine pour déstabiliser les Gouvernements de la région qui représentent un danger pour les « intérêts » de Washington. Parmi ces méthodes, il y a entre autres la manipulation de l’opinion publique, l’infiltration de partis politiques et d’organisations, la réalisation d’attentats terroristes faussement attribués à des mouvements de gauche, les pots-de-vin, l’espionnage de la correspondance.

 

La CIA a plus de 70 bases militaires en Amérique Latine et entraîne à l’Ecole des Amériques (Institut de Sécurité et de Coopération de l’Hémisphère Occidental) 1 500 militaires par an en moyenne en provenance d’Amérique Latine et des Caraïbes, à l’exception du Nicaragua, du Venezuela, de la Bolivie, de l’Equateur, de l’Argentine et de Cuba. Elle finance également des ONG et des partis d’opposition contre les Gouvernements qu’elle considère comme « hostiles » aux intérêts des Etats-Unis.

 

L’Equateur sans bases militaires étrangères

Sur ordre du Président Rafael Correa en juillet 2009, les Etats-Unis ont retiré leur base de Manta (nord de l’Equateur) à l’expiration du bail de 10 ans accordé en 1999 par le président de l’époque Jamil Mahuad. La présence des troupes états-uniennes était condamnée par des organisations politiques et sociales qui dénonçaient des violations des Droits de l’Homme. La base militaire de Manta ou base militaire Eloy Alfaro, inaugurée par l’Armée de l’Air équatorienne le 28 octobre 1978, fonctionnait sur une zone accolée à l’aéroport international du même nom, dans la ville de Manta (Nord).

Depuis 1999 et pendant 10 ans, grâce à un accord inter-gouvernemental, l’utilisation comme l’accès à la piste et une partie de la base de Manta ont été cédés à l’armée de l’air des Etats-Unis sous prétexte de lutter contre le trafic de drogues dans le nord-ouest de l’Amérique du Sud. Manta devait servir de base d’opérations pour le Plan Colombie, un accord signé entre la Colombie et les Etats-Unis présenté en 1998 par le président colombien Andrés Pastrana comme un programme de développement économique sans drogues dont la véritable intention était l’implantation des forces états-uniennes dans ce pays.

L’accord entre l’Equateur et les Etats-Unis, appelé Accord d’Ortíz parce qu’il avait été signé par le chancelier équatorien du Gouvernement de Mahuad, Benjamín Ortíz, est entré en vigueur le 12 novembre 1991 malgré le rejet des mouvements sociaux qui le considéraient comme un risque pour la souveraineté à cause de la présence de militaires étrangers dans le pays. Un accord a été ratifié sous le Gouvernement de Gustavo Noboa (2000-2003) pour remettre gratuitement, en plus de la base aérienne, le port de Manta et les installations annexes à la base. Cet accord garantissait aux Etats-Unis :

  • Le survol du territoire du pays et le même traitement que pour les avions appartenant à l’Armée Nationale d’Equateur dans les ports du pays.
  • La réception et l’émission de télécommunications sans inspections, sans licences, sans règles, sans droits, sans impôts directs ou indirects, sans charges perçues par l’Equateur.
  • L’immunité du personnel qui opérait dans le cadre de l’accord et de leur famille qui, en cas d’arrestation par les autorités équatoriennes devaient être remis immédiatement aux officiers états-uniens.
  • Les Nord-américains qui travaillaient sur la base pouvaient entrer et sortir du pays avec des papiers états-uniens sans payer d’impôts et beaucoup moins de taxes sur leurs revenus, leurs propriétés, leurs possessions, sur l’usage ou la cession des biens en Equateur liés à leur présence.

 

Une décision souveraine

Face à cette situation, le Gouvernement de Rafael Correa, arrivé en 2007, décida de revoir l’accord avec les Etats-Unis et les forces états-uniennes qui se sont vues obligées d’abandonner enfin les installations le 18 septembre 2009. Correa a assuré qu’il ne permettrait pas l’installation de bases militaires étrangères dans son pays.

Tant que je serai Président, je ne permettrai pas qu’il y ait des bases étrangères sur le sol de la patrie, je ne permettrai aucune ingérence dans nos affaires, je ne négocierai pas notre souveraineté et je n’accepterai pas de tuteurs pour notre démocratie. »

Cette décision de ne pas proroger l’accord avec les forces militaires des Etats-Unis a été applaudie par la majorité des organisations sociales qui ont travaillé pour que la nouvelle constitution comprenne l’interdiction d’installer des bases étrangères en territoire équatorien. Le Gouvernement de Correa a également rétabli l’ordre à Manta où, à cause de l’installation de l’Armée des Etats-Unis, avait été mise en évidence une augmentation de l’exploitation sexuelle des femmes et des fillettes ainsi que du trafic de drogues et de la traite des personnes, entre autres délits.

 

Conséquences de l’accord

La Base de Manta a été la clef du Plan Colombie à cause de son excellente situation pour opérer dans la zone grâce au système intégré d’intelligence électronique qui donnait des informations en temps réel sur les mouvements des FARC pour qu’elles soient utilisées par les 3 bataillons anti-insurgés de 1 000 hommes chacun entraînés par les Etats-Unis. Les données : Pendant cet accord, 16 nouveaux postes militaires équatoriens ont été créés sur la frontière avec la Colombie.

Les dégâts subis par l’Equateur à cause de la régionalisation du Plan Colombie sont incontestables car, sous prétexte de lutte contre la drogue, on a persécuté la rébellion colombienne, ce qui a conduit l’Equateur à un conflit frontalier. Des sources équatoriennes officielles assurent que, sur cette base, a été organisée l’attaque perpétrée le 1° mars contre un campement des Forces Armées Révolutionnaires de Colombie (FARC) au cours de laquelle furent assassinés une trentaine de guérilleros pendant qu’ils dormaient, parmi lesquels le commandant Raúl Reyes.

Les Etats-Unis le nient mais les preuves recueillies sur le lieu du bombardement valident ce soupçon : 5 bombes intelligentes ont été lancées d’avions à grande vitesse et avec une marge d’erreur d’1 mètre, ce qu’aucune force militaire latino-américaine ne possède. L’enquête a révélé que les pilotes qui ont dirigé le bombardement étaient états-uniens, sans doute faisaient-ils partie de l’entreprise DynCorp qui fournit du matériel et avait des contrats dans le cadre du Plan Colombie.

Des indices ont démontré au Gouvernement équatorien que sur cette base se sont entraîné des mercenaires pour être envoyés en Irak et ont été organisés les vols de fumigations qui ont causé des ravages dans les réserves forestières de l’Amazonie. Le nombre de travailleurs sexuels et de night-clubs a aussi augmenté ainsi que l’exploitation sexuelle des femmes et des fillettes. Partout dans le monde où s’installe une base militaire nord-américaine, la prostitution, le trafic de drogues et la traite des personnes augmentent comme l’ont dénoncé les auteurs des « Tentacules de l’Empire. »

Subic Bay, aux Philippines, était la plus grande base états-unienne d’Asie avec 15000 « marins » et fonctionnaires états-uniens. Dans la ville la plus proche, Olongapo, on estime qu’il y avait environ 1 000 bordels dans lesquels 16 000 femmes étaient exploitées sexuellement. En 1992, une grande campagne contre la présence militaire nord-américaine organisée par des organisations de la société civile a réussi à ce que le Gouvernement des Philippines ne renouvelle pas la concession de la base militaire états-unienne bien que l’industrie du sexe ait cessé. 

Les bateaux militaires américains menèrent à bien 45 approches illégales de bateaux transportant des émigrants équatoriens ou des pêcheurs. Au moins 8 bateaux équatoriens ont été détruits entre 2001 et juin 2005 sans qu’aucune peine n’ait été prononcée à cause de l’immunité des Etats-uniens. L’expropriation de plus de 24 000 ha à cause des activités sur la Base de Manta a privé de nombreux paysans de leur terre. Etant donné la militarisation du port de Manta, les pêcheurs locaux n’ont pas pu mener à bien leur travail, ce qui a provoqué une augmentation du chômage, des migrations et la pauvreté.

 

 

L’Empire yankee ne pardonne pas d’être expulsé

Le dirigeant de la Révolution Bolivarienne Hugo Chávez a dit en 2010 que « l’empire yankee ne pardonnera jamais à Rafael Correa de l’avoir chassé de Manta et d’avoir commencé la Révolution Citoyenne. » Dès lors, les Etats-Unis ont essayé de déstabiliser ce pays, une preuve en fut la tentative de coup d’Etat du 30 septembre 2010 contre Correa. Cependant, le peuple équatorien est sorti pour défendre sa souveraineté.

 

Le 30 septembre 2010, des membres de la Police Nationale équatorienne se sont soulevés contre le Gouvernement légitime et constitutionnel du président Rafael Correa à cause de privilèges économiques qui leur étaient supprimés à cause d’une nouvelle règle (Loi sur les Services Publics) récemment approuvée par le Parlement.

Les putschistes prirent le Régiment Quito et, dans une attitude courageuse et responsable, Correa s’est rendu sur place pour leur expliquer que « maintenant, le minimum que gagne un policier est de 700 dollars mais que se passe-t-il ? Avant, il y avait une série de rafistolages, on leur donnait 160 dollars par mois mais on donnait un petit jouet à Noël à leur fils et cela les contentait et ils trompaient la police. Maintenant, nous disons : vous avez un salaire digne et vous, vous achetez le jouet à votre fils. »

Malgré les efforts du Président, le plan pour le renverser (et l’assassiner) était en marche. Il a été agressé avec des gaz lacrymogènes, on a essayé de lui blesser un genou récemment opéré, il a été amené à l’hôpital du régiment et finalement séquestré par un groupe de policiers. Correa fut sauvé par les forces d’élite du Groupe d’Opérations Spéciales (GOE), non sans avoir été victime auparavant d’une tentative d’assassinat puisque les policiers putschistes postés devant l’hôpital ont réussi à toucher plusieurs fois la voiture du Président. Le bilan de cette tentative fut de 5 morts et 193 blessés.

Le Gouvernement des Etats-Unis a dit avant le retour de Correa au Palais de Carondelet « qu’ils suivaient la situation de près », des déclarations ambigües qui ne sont faites que quand la conspiration n’est pas encore terminée. Ce fait met en évidence que ce n’était pas la première fois qu’un Gouvernement équatorien était agressé par les Etats-Unis et leurs agents spéciaux.

L’ex agent de l’Agence Centrale de Renseignement (CIA), Philip Agee, a raconté dans les années 70 dans son livre « Journal de la CIA » comment celle-ci a dirigé l’opération destinée à briser le Gouvernement progressiste de José María Velasco Ibarra pour le chasser par la force un an à peine après le début de son 4° mandat 1960. Agee raconte comment la CIA a pénétré et infiltré des organisations sociales, des mouvements politiques, des médias et des syndicats (de droite et de gauche) et qu’ils ont même réussi à influencer et à recruter des agents à l’intérieur des institutions publiques pour détruire l’Etat de l’intérieur.

L’écrivain états-unien John Perkins a raconté dans son livre « Confessions d’un tueur à gages économique » (2004) que Washington a assassiné le président Jaime Roldós Aguilera, un progressiste équatorien qui ne suivait pas les ordres du fonds Monétaire International (FMI) et qui est mort dans un accident d’avion suspect en 1981, à peine deux ans après son arrivée à la présidence.

En 2008, Perkins a raconté dans une interview que le Gouvernement de Correa était menacé à cause de ses politiques anti-néolibérales, de ses relations avec les Gouvernements révolutionnaires du Venezuela, de Cuba et de l’Iran et de sa politique destinée à reprendre le contrôle de l’industrie pétrolière en Equateur pour la réorienter au profit des grandes majorités historiquement exclues.

 

Les plans d’assassinat de chefs d’Etat de la CIA

Dans une interview qui lui a été accordée à la veille des élections présidentielles de 2012, le journaliste Jorge Gestoso a demandé à Rafael Correa s’il craignait d’être assassiné. Celui-ci lui a répondu : « C’est une possibilité qui ne peut être exclue. »Correa a rappelé la tentative de coup d’Etat contre lui survenue le 30 septembre 2010 au cours de laquelle il a été retenu prisonnier pendant plus de 10 heures par des membres de la police. « Bien que la presse veuille nier ce qui est irréfutable, les photos des six marques de balles sur le capot de la voiture présidentielle sont là. Les ordres étaient : « Tuez le Président ! » raconte-t-il.

De même, il a soutenu les dénonciations du journaliste chilien Patricio Mery Bell concernant des opérations de la CIA et de la DEA (Agence Antidrogues des Etats-Unis) pour introduire 300Kg de drogue par mois au Chili et financer avec les excédents la déstabilisation du Gouvernement équatorien. Il n’a pas non plus écarté la possibilité qu’il y ait des plans d’assassinat du chef d’Etat dans son pays et a soutenu les dénonciations concernant l’ingérence de la CIA faites par Craig Murray, ex ambassadeur britannique en Ouzbékistan.

Les activités de la CIA n’ont jamais cessé ni en Equateur ni en Amérique Latine car il a été démontré que peu importe la souveraineté quand le but est que prévale la domination de l’empire dans la région mais aussi qu’il y a toujours eu des personnages capables de trahir leur pays pour se mettre au service des intérêts étrangers.

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