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Syrie : Les Tomahawks de Trump et le double langage – L’utilisation d’armes radiologiques et chimiques pour faire un profit ? (Global Research.ca)

par Global Research.ca 23 Mai 2017, 19:04 Tomahawk Trump Impérialisme Syrie USA

Syrie : Les Tomahawks de Trump et le double langage – L’utilisation d’armes radiologiques et chimiques pour faire un profit ? (Global Research.ca)

« Il y a deux siècles, une ancienne colonie européenne a décidé de combler son retard par rapport à l’Europe. Elle y est parvenue tellement bien que les États-Unis d’Amérique sont devenus un monstre dont l’ignominie, la répugnance et la barbarie qu’elle a empruntées à l’Europe ont pris des proportions effroyables. » Frantz Fanon, 1961. (1925-1961.)

Bien que l’attaque totalement illégale des USA contre la base aérienne de Shayrat en Syrie, en réponse à une prétendue attaque à l’arme chimique par le gouvernement syrien, n’ait pas tenu compte des délibérations du Congrès, d’un mandat des Nations Unies ou de la règle de droit, il semble bien que le choix de la date n’était pas fortuite.

Outre le fait que le 6 avril (heure des USA) marquait le centenaire de l’entrée des États‑Unis dans la Première Guerre mondiale, lorsque les 59 missiles de croisière ont frappé le sol syrien à l’aube du 7 avril en Europe et au Moyen-Orient, cette date marquait le 61e anniversaire de la reconnaissance officielle de l’indépendance de la Syrie arrachée à la France. En 2003, c’est à la même date que Bagdad est tombée aux mains des envahisseurs illégaux qu’étaient les USA, le R.‑U. et la Pologne, qui ont tous alors commis le « crime international suprême » défini à Nuremberg.

Par ailleurs, c’est aussi un 7 avril qu’Attila le Hun, « fléau de Dieu », a mis à sac la ville de Metz et a ravagé de nombreuses cités de la Gaule en 451.

Petit rappel – Le 12 septembre 2013, le président al-Assad s’est engagé à remettre toutes les armes chimiques de la Syrie, en étant entendu que les États‑Unis cessent de menacer son pays et de fournir des armes aux terroristes.

Le 23 juin 2014 à 23 h 32, l’ex-secrétaire d’État John Kerry a écrit ceci sur Twitter :

« Aujourd’hui, les 8 % restants d’armes chimiques déclarées sont sortis de Syrie. Excellent travail par toutes les personnes concernées. »

Puis nous avons appris ceci :

« Nous avons conclu un accord qui a permis d’éliminer 100 % des armes chimiques », a affirmé Kerry à l’émission « Meet the Press » de la chaîne NBC en juillet 2014.

Kerry parlait de l’accord conclu entre les USA et la Russie en septembre 2013, lorsque les Russes ont accepté d’aider à retirer et à détruire tout le stock d’armes chimiques de la Syrie.

Puis encore ceci :

« Cet après-midi, les derniers produits chimiques inventoriés pour être retirés de la Syrie ont été chargés à bord du navire danois Ark Futura », a confirmé Ahmet Üzümcü, directeur général de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC), en juin 2014.

Cela dit, le chaos qui a suivi en cherchant à trouver des pays où les armes seraient éliminées n’augurait rien de bon pour leur élimination en toute sécurité, et semait même des doutes quant à la certitude que des quantités ne seraient pas tout simplement vendues à des groupes terroristes. Par exemple, soixante conteneurs ont été :

« (…) transférés d’un cargo danois à un navire américain dans le port italien de Giola Tauro, en Calabre, d’autres envois étant attendus. »

Entre autres nombreux problèmes, le port a été accusé d’être :

« une plaque tournante des cargaisons de cocaïne vers l’Europe par la ‘Ndrangheta, la mafia calabraise. »

Ce n’est certes pas l’endroit le plus sûr où stocker des composants chimiques recherchés par des criminels bien nantis. (Pour tout savoir sur le chaos incroyable qui a entouré le retrait des armes chimiques par l’OIAC, cliquez sur le lien de la note 1.)

Comme d’habitude, le principe du double langage s’applique. Le même article rapporte qu’en ce qui concerne les armes chimiques :

« Israël domine le Moyen-Orient, ses capacités de destruction massive étant demeurées intactes. C’est ce qu’a fait remarquer Bob Rigg, ex-inspecteur des armes en Irak pour l’ONU, ancien rédacteur principal de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques et ancien président du comité consultatif national sur le désarmement de la Nouvelle-Zélande :

À l’heure actuelle, Israël détient un monopole sur les armes nucléaires au Moyen‑Orient. Une fois la destruction des armes chimiques de la Syrie complétée, Israël bénéficiera d’un quasi-monopole régional sur la deuxième arme de destruction massive en importance, à savoir les armes chimiques. Outre Israël, l’Égypte est la seule puissance régionale à posséder une capacité de frappe au moyen d’armes chimiques. »

La « communauté internationale », qui est maintenant dirigée par un « Agent Orange » à la Maison-Blanche, est particulièrement sélective dans ses accusations de possession d’armes de destruction massive. Par exemple, en 2009, Human Rights Watch, dans un document détaillé faisant 71 pages qui a causé un choc (2), rapportait ceci :

« L’usage à répétition d’obus au phosphore blanc par Israël sur des secteurs densément peuplés de Gaza pendant sa récente campagne militaire s’est fait sans discernement et constitue une preuve de crime de guerre.

Immédiatement après la fin des hostilités, les chercheurs de Human Rights Watch à Gaza ont trouvé des douilles d’obus, des boîtiers métalliques et des dizaines de morceaux de feutre calcinés imprégnés de phosphore dans les rues de la ville, sur les toits des appartements, dans les cours des résidences et dans une école des Nations Unies. Le rapport présente aussi des preuves balistiques, des photographies et des images satellites, ainsi que des documents produits par les militaires et le gouvernement israélien. »

Aucun missile de croisière n’a été tiré en Israël et il n’y a eu aucune condamnation internationale de l’agression aux dimensions apocalyptiques d’une minuscule parcelle de la Palestine illégalement fragmentée qui ne possède ni armée de terre, ni marine, ni force aérienne. L’indignation vertueuse des USA et de ses amis est vraiment sélective.

Trump est d’ailleurs sur le point de faire une visite d’État en Israël.

La Syrie fait évidemment partie des sept pays (Irak, Syrie, Somalie, Libye, Soudan, Iran et Yémen) qui « allaient être éliminés », comme l’a appris le général Wesley Clark de la bouche d’un copain du Pentagone peu après les événements du 11 septembre 2001.

Trump a suivi la trace de ses prédécesseurs bellicistes en se déclarant juge, jury et bourreau dans les 48 heures ayant suivi une émanation de produit chimique, sans avoir la moindre idée apparente de qui pouvait stocker des substances mortelles dans un secteur entièrement contrôlé par les mangeurs d’organes, coupeurs de tête et tueurs d’enfants « modérés » soutenus par l’Occident.

Le droit international, la Charte de l’ONU et la diplomatie ont été bafoués, jetés et déchiquetés par un autre « dirigeant du monde libre » autoproclamé. L’attaque en Syrie est une autre agression illégale contre un pays souverain.

Dans la soirée du lundi suivant (le 10 avril), le secrétaire à la Défense James Mattis y est allé d’une autre rodomontade en menaçant le gouvernement syrien qu’il serait :

« mal avisé d’employer de nouveau des armes chimiques… », sans posséder la moindre preuve que la Syrie était impliquée.

Ce qui est prouvé, c’est que les USA ont eu recours à 59 armes chimiques et radiologiques dans leur attaque en Syrie. En effet, les missiles de croisière Tomahawk lancés dans cette attaque contiendraient de l’uranium appauvri (3, pdf). « La toxicité de l’uranium appauvri est à la fois chimique et radiologique… », signale un document de l’Agence internationale de l’énergie atomique.

Outre les 59 missiles Tomahawks, les USA utilisent des armes à l’uranium appauvri en Irak depuis 1991 et ont fini par admettre en avoir utilisé en Syrie en 2015. Il n’existe cependant pas d’autres données sur l’utilisation de cette arme de choix des USA en Syrie pour d’autres années.

Le Commandement central des USA a reconnu que de l’uranium appauvri a été tiré à deux reprises, soit le 18 et le 23 novembre 2015 (…) 5 100 munitions de calibre 30 mm contenant de l’uranium appauvri a été largué d’un avion de type A-10 Thurderbolt II. Ce qui fait 1 524 kg d’uranium appauvri. (International Commission to Ban Uranium Weapons, 21 octobre 2016).

Voici de nouveau, de peur qu’elles soient oubliées, des citations de la US Army elle‑même qui décrit les effets terrifiants de l’uranium appauvri :

« Aucune technologie existante ne peut modifier de façon significative la toxicité chimique et radiologique inhérente de l’uranium appauvri. Ce sont des propriétés intrinsèques de l’uranium. » (US Army Environmental Policy Institute, Health and Environmental Consequences of Depleted Uranium Use in the US Army, juin 1995, p.xxii.)

Aussi :

« L’uranium appauvri est un déchet radioactif, qui doit par conséquent être stocké dans un dépôt autorisé. Même source, p. 154. Nota – « (…) un dépôt autorisé ». Pas une école, une demeure, une rue, une ferme, une mosquée, une église, une université, un hôpital, un village ou une ville. « Les effets à court terme des doses élevées peut entraîner la mort, tandis les faibles doses peuvent être associées au cancer à long terme. » (Kinetic Energy Penetrator Long Term Study, Danesi, 1991.)

Qu’on cesse donc ces outrecuidantes absurdités totalement sans fondement à propos du gouvernement syrien pendant que les USA utilisent depuis 25 ans des armes chimiques et radiologiques qui font l’objet d’avertissements dans les manuels de la US Army. L’augmentation fulgurante des cancers et des malformations congénitales liée à l’utilisation de l’uranium appauvri en Irak et ailleurs, dont souffrent aussi des militaires, des femmes et des familles aux USA, illustre de façon effrayante le sérieux de ces avertissements. L’uranium appauvri a une demi‑vie de 4,5 milliards d’années. Son utilisation condamne et maudit les êtres non encore conçus jusqu’à la fin des temps.

En 2008, le Parlement européen a appelé à une interdiction mondiale des armes à l’uranium appauvri et à un moratoire sur leur utilisation. La résolution :

« renouvelle avec force son appel à tous les États membres et aux pays membres de l’OTAN d’imposer un moratoire sur l’emploi d’armes contenant de l’uranium appauvri, de redoubler d’efforts en vue de leur interdiction mondiale et d’arrêter systématiquement la fabrication et les achats de ce type d’armes et de munitions. »

La résolution a été adoptée par 491 votes en faveur, 18 contre et 12 abstentions. (résolution du Parlement européen du 22 mai 2008)

En mars 2007, le parlement belge a voté à l’unanimité en faveur de l’interdiction des armes à l’uranium appauvri, dans une loi qui interdit :

« la fabrication, l’utilisation, l’entreposage, la vente, l’achat, la livraison et le transit de munitions inertes et de blindage contenant de l’uranium appauvri et de tout autre uranium manufacturé industriellement. » (Parlement belge, 22 mars 2007)

En juin 2009, la Belgique est devenue le premier pays à prévenir les mouvements de capitaux aux fabricants d’armes à l’uranium partout dans le monde, dans une loi exigeant que :

« (…)les institutions financières (…) doivent mettre fin à leurs investissements dans des sociétés qui sont de grands fabricants d’armes comme Alliant Techsystems (USA), BAE Systems (R.-U.) et General Dynamics (USA). » (traduction libre)

Donald Trump avait ainsi la chance de tourner la page comme nouveau président en respectant ses promesses d’éviter les interventions à l’étranger par des initiatives concrètes déjà en place qu’il n’avait qu’à endosser et à renforcer.

Le 26 janvier 2017, la première ministre May, lors de sa visite au président Trump à Washington, a fait la déclaration suivante :

« Le temps où la Grande-Bretagne et les États-Unis intervenaient dans des pays souverains afin de refaire le monde à leur image est fini. »

Pourtant, le gouvernement du R.‑U. a immédiatement soutenu l’ignoble bombardement toxique tant chimiquement que radiologiquement en Syrie.

De plus, il a été abondamment rapporté que 36 des missiles de croisière ont été portés disparus. Où ont-ils atterri? Qui ont-ils tué? Se décomposent-ils au fond de la Méditerranée en empoisonnant l’eau et la vie qu’elle recèle pour l’éternité?

« Même de ravissants bébés ont été cruellement assassinés dans cette attaque extrêmement barbare. Aucun enfant de Dieu ne devrait jamais subir une telle horreur », a déclaré Trump à propos de la prétendue attaque en Syrie, sans détenir aucune preuve de qui était responsable, mais en disposant de preuves abondantes que les terroristes soutenus par les USA avaient accès à des produits chimiques.

Cependant, comme Chris Ernesto l’écrit si bien (4) :

« Dans les trois mois suivant son accession à la présidence, Trump a largué des bombes – et tué des enfants (et des ravissants bébés) – au Yémen, en Afghanistan, en Syrie et en Irak. »

L’ironie nauséabonde qu’a fait ressortir le Palmer Report, c’est que Trump pourrait avoir tiré profit des morts qu’il a causées (5) :

« Les missiles Tomahawk sont fabriqués par Raytheon Inc. et, selon cet article du Business Insider (link), Donald Trump possédait des actions de Raytheon au moins jusqu’au début du cycle menant à l’élection d’un président. Rien n’indique qu’il ait vendu ses actions par la suite.

Les Tomahawks que Trump a largués devront être remplacés, ce qui veut dire qu’il vient de donner près d’une centaine de millions de dollars à une société dont il est actionnaire. Sans surprise, les actions de Raytheon ont monté en flèche (lien), ce qui signifie que la société profite directement des frappes. »

En quelques heures à peine, le prix des actions a monté de 2,1 %.

Autre exemple éloquent de tordage de l’intégrité, le Washington Post a invité son collaborateur Ed Rogers :

« (…) à chanter les louanges d’une action militaire contre la Syrie sans divulguer qu’il fait du lobbying pour l’entreprise de défense Raytheon (…). »

Dans l’article intitulé “Could it be? Is President Trump on a roll?” (Se peut-il que le président Trump soit sur une lancée?) Rogers a écrit que Trump “a reçu l’appui des deux partis pour sa frappe militaire en Syrie (…)”.

Le Post n’a cependant pas indiqué que Rogers et son entreprise, BGR Group, font du lobbying au nom de Raytheon (…) Rogers est inscrit comme lobbyiste chez BGR, qui est l’une des plus grandes firmes de lobbying au pays et qui a rapporté avoir touché près de 17 millions de dollars de revenus tirés du lobbying. »

Pour ce qui est « d’assécher le marais », c’est plutôt raté.

Felicity Arbuthnot

Article original en anglais :

Syria: Trump’s Tomahawks, Double Standards – Using Chemical and Radioactive Weapons for Profit? Publié le 16 mai 2017.

Traduit par Daniel pour Mondialisation.ca

Notes

  1. http://www.theecologist.org/News/news_analysis/2317280/syrias_chemical_weapons_lawbreakers_rule_supreme.html
  2. https://www.hrw.org/report/2009/03/25/rain-fire/israels-unlawful-use-white-phosphorus-gaza
  3. http://www.iaea.org/inis/collection/NCLCollectionStore/_Public/31/049/31049589.pdf
  4. https://www.opednews.com/articles/Trump-has-killed-beautifu-by-Chris-Ernesto-Airstrikes_Al-Qaeda_Assad_Children-170417-581.html
  5. http://www.palmerreport.com/opinion/tomahawk-missiles-were-wrong-choice-for-syria-attack-but-donald-trump-owns-stock-in-the-company/2224/
  6. https://www.mediamatters.org/blog/2017/04/11/wash-post-doesn-t-disclose-writer-supporting-syria-strike-lobbyist-tomahawk-missile-manufacturer/215976
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