De nouveaux moyens musclés pour le Pentagone afin de dissuader militairement la Russie
Par Dan Lamothe
The Washington Post, 28-06-2017
Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr.
Des soldats américains du 2e Escadron du 2e régiment de cavalerie, organisent une formation à Orzysz, en Pologne, le 3 avril. (Army Spec. Nathanael Mercado)
La Commission des Forces Armées su Sénat a demandé mercredi de nouvelles mesures pour contrer les manœuvres adverses de la Russie à l’étranger, incluant la mise en place d’un nouveau programme offensif de missiles sol-sol, l’interdiction pour le département de la Défense d’utiliser des logiciels informatiques provenant d’une société russe, et l’exigence pour le Pentagone d’informer les législateurs de ce qui a trait à la guerre hybride russe.
La version de la Commission de la loi de finances relative au budget de défense nationale pour l’exercice 2018, approuvée mercredi soir, incluait également un montant de 500 millions de dollars US pour fournir une assistance de sécurité à l’Ukraine – dont des armes mortelles – contre les séparatistes soutenus par la Russie. Et, il prolonge les interdictions faites au Pentagone de coopérer directement avec l’armée russe à la suite de l’annexion par Moscou de la péninsule ukrainienne de la Crimée en 2014.
En outre, la commission a approuvé un montant de 4,6 milliards de dollars US pour l’Initiative de Dissuasion Européenne [European Deterrence Initiative] du Pentagone, qui a pour objectif de renforcer la sécurité le long de la frontière orientale de l’Europe. Quelque 100 millions de cette somme seront alloués à un programme commun via lequel le Pentagone aidera les pays baltes à « améliorer leur résilience et à construire leur capacité de dissuasion contre une agression russe », selon un résumé publié par la Commission des services armés du Sénat.
Les décisions arrivent à la suite d’analyses par des haut fonctionnaires du renseignement américain montrant que le gouvernement russe a cherché à influer sur l’élection présidentielle de 2016 en faveur du Président Trump. La Commission a cité cette opération comme l’une des raisons du renforcement de sa position à l’égard de Moscou.
« La Commission estime que les États-Unis doivent en faire plus afin de décourager toute agression russe, que ce soit à l’extérieur de ses frontières ou dans son cyberespace », précisait le résumé. « La Russie continue d’occuper la Crimée, de déstabiliser l’Ukraine, de menacer nos alliés [du Traité de l’Atlantique Nord], de violer le traité de 1987 sur les forces nucléaires à portée intermédiaire, et de soutenir le régime Assad en Syrie. Au cours d’une attaque sans équivalent contre nos intérêts fondamentaux et nos valeurs, la Russie s’est engagée dans une campagne active, déterminée, pour ébranler l’intégrité de la démocratie américaine et avoir un impact sur le résultat de l’élection présidentielle de 2016. »
Une porte-parole de la Commission, Rachel Hoff, a refusé de commenter le résumé mercredi soir. La Commission devrait publier jeudi des informations complémentaires à propos de ces décisions.
La mise en place du programme de missiles devrait se révéler particulièrement sensible. Le traité I.N.F, signé par les dirigeants américains et russes à Washington et à Moscou en 1987, appelait à l’élimination des missiles de portée de 500 à 5 500 kilomètres.
L’administration Obama a estimé en 2014 que la Russie avait violé ce traité, mais les États-Unis ont officiellement continué d’adhérer à celui-ci. Il se peut que la mise en place d’un nouveau programme de missiles de portée intermédiaire ne viole pas ledit traité, mais cela ouvrirait la porte à un retrait des États-Unis du traité et à la production par ceux-ci de nouveaux missiles de moyenne portée. Le traité interdit les essais de missiles de courte/moyenne portée, la construction d’étages ou de lanceurs pour ces missiles.
L’administration Obama a également refusé de fournir des armes létales aux forces ukrainiennes afin de contrer les séparatistes appuyés par la Russie ; une décision à laquelle des législateurs, dont le sénateur John McCain (Arizona), président de la Commission sénatoriale des Forces Armées, se sont opposés à plusieurs reprises.
La volonté d’interdire les logiciels provenant d’une société russe en particulier – Kaspersky Lab – résulte des inquiétudes de représentants américains quant aux liens de cette société avec le gouvernement russe qui pourraient créer un risque de cybersécurité aux États-Unis. Pour autant ceci est largement symbolique : les représentants américains ont affirmé que ces logiciels sont utilisés par peu de services du gouvernement fédéral, voire aucun.
La demande faite au Pentagone de fournir des informations à propos de la guerre hybride – dans laquelle les actions militaires conventionnelles sont combinées à des opérations secrètes telles qu’armer les séparatistes d’un pays étranger – arrive après des années d’utilisation par la Russie de cette forme de guerre selon les représentants américains.