Trump provoque des répliques nord-coréennes et intensifie le risque de guerre
Par Peter Symonds, 25 septembre 2017
WSWS
À la suite du discours belliqueux et menaçant du président Trump aux Nations Unies cette semaine, la guerre des mots entre les États-Unis et la Corée du Nord s’est intensifiée, augmentant ainsi le danger d’un conflit militaire catastrophique.
Le dirigeant nord-coréen Kim Jong-un dans une déclaration télévisée a averti hier que les États-Unis « paieraient cher » la menace de Trump de « détruire totalement » la Corée du Nord. Il a qualifié Trump d’un « gâteux américain mentalement dérangé » qui « m’a insulté et mon pays devant le monde entier ».
Trump avait parlé grossièrement de Kim comme de « Rocket Man » disant qu’il était en « mission suicide » – une menace personnelle directe étant donné que les États-Unis et la Corée du Sud forment des « équipes de décapitation » pour tuer les principaux dirigeants nord-coréens.
Kim a déclaré que Trump avait fait « la déclaration de guerre la plus féroce de l’histoire » et a menacé d’y répondre en prenant « les plus fortes contre-mesures de l’histoire ».
Peu de temps après la publication de la déclaration de M. Kim, le ministre des Affaires étrangères nord-coréen, Ri Yong-ho, a suggéré que la réponse de Pyongyang « pourrait être la détonation la plus puissante d’une bombe H dans le Pacifique ». Cependant, il a ajouté : « Nous n’avons pas d’idée concernant les actions qui pourraient être prises, car elles seront commandées par le leader Kim Jong-un. »
Une telle action imprudente – le tir d’un missile à longue portée et la détonation d’une arme nucléaire dans l’atmosphère au-dessus du Pacifique – pourrait facilement constituer le prétexte pour une attaque militaire américaine sur la Corée du Nord, citant le potentiel d’un dysfonctionnement et de la menace posée à la Corée du Sud ou au Japon.
La responsabilité principale de cette stratégie de la corde raide incombe au gouvernement Trump, qui a acculé la Corée du Nord. Les résolutions successives de l’ONU ont gravement affecté le commerce du pays, interdisant les exportations de charbon, de fruits de mer, de textiles, de fer et d’autres minéraux, et en réduisant dramatiquement l’importation du pétrole.
Incapables d’obtenir le soutien de la Chine et de la Russie pour des mesures encore plus sévères, les États-Unis ont annoncé jeudi leur propre interdiction unilatérale à tout pays ou société ayant des relations financières liées au commerce avec la Corée du Nord. Trump a pris un décret aux termes très généraux qui exclurait toute banque faisant affaire avec la Corée du Nord du système bancaire et financier américain.
« Notre nouveau décret amputera les sources de revenus qui financent les efforts de la Corée du Nord pour développer les armes les plus meurtrières connues de l’humanité », a déclaré Trump. En d’autres termes, les États-Unis tentent d’imposer unilatéralement un embargo commercial et financier complet contre la Corée du Nord – une démarche qui est elle-même un acte de guerre.
Le secrétaire d’État américain Rex Tillerson a déclaré que les États-Unis continuaient de faire pression pour obtenir une solution diplomatique à la situation dangereuse avec la Corée du Nord. Trump, cependant, a de nouveau attaqué Kim Jong-un avec un autre tweet belliqueux, déclarant que le chef nord-coréen était « un fou » qui « sera mis à l’épreuve comme jamais auparavant ! »
Malgré les propos de Tillerson, Trump a déclaré à plusieurs reprises qu’il a effectivement exclu les négociations avec la Corée du Nord. Le week-end dernier, l’ambassadrice des États-Unis auprès des Nations Unies, Nikki Haley a déclaré que les États-Unis avaient épuisé toutes les options diplomatiques au Conseil de sécurité de l’ONU, ajoutant : « Je n’ai aucun problème à laisser [le secrétaire à la Défense américaine James] Mattis s’en occuper parce que je pense qu’il a beaucoup d’options [militaires]. »
La Corée du Nord a clairement conclu que les États-Unis ont l’intention de détruire son gouvernement – soit en provoquant une crise économique et politique à Pyongyang, soit par la guerre – et développe son arsenal nucléaire dans une tentative désespérée de contrer la menace américaine.
Dans sa déclaration d’hier, le dirigeant nord-coréen Kim a déclaré que les menaces de Trump à l’ONU « m’ont convaincu, plutôt que de m’effrayer ou de m’arrêter, que le chemin que j’ai choisi est correct et que c’est celui que je dois suivre jusqu’à la fin. »
Les propos belliqueux de Trump à l’ONU à l’égard de Téhéran et les démarches américaines pour saper ou abroger l’accord nucléaire de 2015 avec l’Iran en exigeant sa révision n’auraient fait que renforcer la volonté de Pyongyang d’accélérer son programme nucléaire. La Corée du Nord ne peut que conclure que tout accord conclu avec Washington est sans valeur.
La Corée du Nord a conclu deux accords avec les États-Unis pour se dénucléariser – en 1994 et 2007 – comme pour seul résultat de les voir sabotés par Washington. Les médias américains et internationaux accusent habituellement Pyongyang de mauvaise foi, mais le gouvernement Bush a saboté l’accord dit Agreed Framework (Cadre convenu) de 1994 dès son entrée en fonction en 2001 et a dénoncé la Corée du Nord en 2002 comme faisant partie d’un « axe du mal ». Il a dynamité l’accord de 2007 avec Pyongyang en insistant unilatéralement en 2008 sur des mesures d’inspection beaucoup plus rigoureuses que celles qui avaient été consignées dans l’accord.
Le régime de Pyongyang est bien conscient du sort des gouvernements qui ont capitulé devant les demandes des États-Unis d’abandonner leurs programmes d’armement et d’accepter des inspections toujours plus intrusives. Dans le cas de l’Irak et de la Libye, les États-Unis sont intervenus militairement pour évincer les régimes et tuer leurs dirigeants.
Le discours de Trump à l’ONU a provoqué une réaction similaire en Iran. S’exprimant lors d’un défilé militaire hier, le président iranien Hassan Rouhani a répondu à l’attaque de Trump contre l’accord nucléaire de 2015 en disant : « Il sera très dommage que cet accord soit détruit par les voyous de nouveaux venus au monde de la politique. »
Rouhani a fortement défendu le droit de l’Iran de renforcer sa puissance militaire comme moyen de dissuasion. « Nous renforcerons nos capacités de missiles. Nous ne chercherons la permission de personne pour défendre notre terre. Non seulement nous fortifierons nos missiles, mais nos forces terrestres, militaires et aériennes seront toujours soutenues par le peuple. »
Lors du défilé militaire, les Gardes révolutionnaire islamiques ont dévoilé un nouveau missile balistique d’une portée de plus de 2000 kilomètres et capable de frapper la majeure partie du Moyen – Orient, y compris Israël.
En lançant sa menace contre la Corée du Nord, Trump se prépare également à faire face à la Chine et à la Russie – qui ont toutes deux tentées de freiner les sanctions économiques paralysantes contre Pyongyang. En ciblant tout pays faisant affaire avec la Corée du Nord pour des sanctions américaines, Trump place Washington sur une trajectoire de collision avec Pékin et Moscou.
Parallèlement, en faisant des démarches pour mettre fin à l’accord nucléaire de 2015 avec l’Iran, le gouvernement Trump aggrave encore de vives tensions avec les grandes puissances européennes qui ont élargi le commerce et l’investissement avec Téhéran depuis la signature de l’accord. Face à l’unilatéralisme de Washington, les grandes puissances, y compris les alliés de longue date des États-Unis, ne peuvent que conclure qu’ils devront défendre leurs propres intérêts économiques et stratégiques, y compris par des moyens militaires.
Les tensions géopolitiques croissantes et le danger de la guerre ne sont pas seulement la conséquence de Trump comme individu et de sa politique imprudente, mais résultent plus fondamentalement de la crise aggravée du capitalisme et de ses contradictions insolubles. En menaçant de faire la guerre à la Corée du Nord, à l’Iran ou à tout autre pays qui est un obstacle à son hégémonie mondiale, l’impérialisme américain a créé une poudrière qui pourrait rapidement dégénérer en une conflagration mondiale.
(Article paru en anglais le 24 septembre 2017)