L'Arabie saoudite et Israël coparrainent le projet de loi des Nations Unies condamnant l'Iran et la Syrie pour des violations des droits de l'homme
Article originel : Saudi Arabia, Israel Co-Sponsor UN Bill Condemning Iran, Syria for Human Rights Abuses
Par Whitney Webb
MintPress News, 17.11.17
Traduction SLT
'ambassadeur de l'Arabie saoudite auprès des Nations unies, Abdallah Al-Mouallimi, à gauche, et l'ambassadeur du Yémen auprès des Nations unies. L'ambassadeur Khaled Hussein Al-Yamani, à droite, tient une conférence de presse le 13 novembre 2017 au siège de l'ONU. (AP/Bebeto Matthews)
Les résolutions condamnant l'Iran, la Syrie et la Corée du Nord pour les violations des droits de l'homme ont été appuyées par certains des auteurs les plus notoires d'atteintes aux droits de l'homme, par des criminels de guerre et des commanditaires du terrorisme et de l'extrémisme violent dans le monde.
Mardi, la troisième commission de l'Assemblée générale des Nations unies a adopté trois résolutions non contraignantes condamnant les violations présumées des droits de l'homme et les restrictions à la liberté d'expression dans certains pays - Iran, Syrie et Corée du Nord. Même si les résolutions non contraignantes ne peuvent pas devenir des lois et n'ont techniquement aucun poids juridique, elles sont considérées comme exprimant l'approbation ou la désapprobation de l'ONU concernant une situation spécifique. Une résolution similaire condamnant la situation des droits de l'homme dans les trois pays a déjà été adoptée par l'Assemblée générale en 2013.
L'adoption de la résolution concernant la Corée du Nord est inhabituelle dans la mesure où, en s'écartant de la procédure normale, la commission a adopté la résolution sans procéder à un vote. La résolution condamne spécifiquement le gouvernement nord-coréen pour avoir détourné des ressources vers son armée - à savoir ses programmes d'armes nucléaires et de missiles balistiques - au lieu d'apporter une aide à sa population. Le représentant du gouvernement nord-coréen aux Nations Unies a qualifié la résolution de "produit de l'affrontement politique et militaire et du complot des Nations Unies et d'autres forces hostiles".
La plus débattue des résolutions de l'ONU a été celle qui ciblait la Syrie, car elle a imputé la mort de 400 000 civils syriens au gouvernement syrien dirigé par Bachar al-Assad. Elle a en outre accusé le gouvernement syrien d'être le seul responsable de la faim liée aux combats armés, de l'utilisation d'armes chimiques et de l'escalade des tensions ethnico-religieuses dans le pays. La résolution a été rédigée par le Canada et coparrainée par Israël et l'Arabie saoudite, ce qui est la première fois que les deux anciens ennemis coparrainent un projet de loi.
La résolution condamne également les milices iraniennes actives en Syrie, ainsi que le Hezbollah libanais, en les exhortant à quitter immédiatement le pays, bien que le gouvernement syrien ait invité ces parties à participer au conflit.
La délégation syrienne a affirmé que la résolution reflétait l'hystérie du gouvernement saoudien, qui avait longtemps collaboré avec le Qatar et d'autres nations pour déstabiliser le pays et chasser Assad du pouvoir. La Syrie a en outre affirmé que le wahabisme saoudien - la religion officielle pratiquée par le pays, ainsi que par des groupes terroristes religieux comme l'Etat islamique (EI) - était une "arme de destruction massive".
Les préoccupations de la délégation syrienne, qui craignait que la résolution ne soit motivée par des motifs politiques, ont été appuyées par le fait que la résolution ne mentionnait pas les extrémistes étrangers financés par des fonds étrangers dont les nombreuses atrocités qu'ils ont commises en Syrie tout au long du conflit ont été bien documentées, ni le rôle joué par des gouvernements étrangers - comme les États-Unis, le Royaume-Uni, Israël, l'Arabie saoudite, le Qatar et d'autres (dont la France, NdT) - dans la création et la promotion du conflit actuel. Malgré cela et la ferme condamnation de cette mesure par la délégation syrienne, elle a finalement été approuvée par 108 voix pour, 17 voix contre et 58 abstentions.
Le gouvernement iranien a également été cité séparément dans la résolution, qui condamne la République islamique d'Iran pour des actes présumés de discrimination à l'égard des femmes et des minorités ethniques et religieuses, ainsi que pour la détention arbitraire d'activistes, de journalistes et de critiques du gouvernement. La résolution ciblant l'Iran a reçu beaucoup moins de soutien que celle visant la Syrie, avec 83 voix pour, 30 contre et 68 abstentions.
De son côté, l'Iran a réagi avec virulence à l'adoption de la résolution, la rejetant catégoriquement et affirmant qu'elle était non seulement peu crédible, mais aussi politiquement motivée. En effet, l'approbation de la résolution par l'organe des Nations unies intervient dans un contexte où l'Arabie saoudite, Israël et les alliés occidentaux d'Israël sont de plus en plus pressés de freiner " l'expansion iranienne " et l'influence au Moyen-Orient. Le porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères, Bahram Qassemi, a également souligné que la résolution elle-même avait été appuyée par certains des auteurs les plus notoires de violations des droits de l'homme, des criminels de guerre et des commanditaires du terrorisme et de l'extrémisme violent dans le monde.
En effet, l'Arabie saoudite et Israël - partisans des résolutions et coauteurs de la résolution visant la Syrie - ont joué un rôle déterminant dans les crimes de guerre commis en Syrie et sont des auteurs notoires de violations des droits de l'homme dans leur propre pays. En dépit des preuves claires et documentées de leur soutien aux organisations terroristes à l'étranger et de leur répression des minorités nationales, la condamnation par les Nations Unies de ces deux pays a été sérieusement atténuée par rapport à celle qu'ont reçue les pays qui se trouvent pris pour cible par les États-Unis et leurs alliés. En fin de compte, ces dernières résolutions prouvent une fois de plus que l'ONU, surtout lorsqu'elle aborde des questions telles que les droits de l'homme, n'examine pas les pays sous le même angle.