Macron's Watch
- Macron's Watch n°10. Violence et terrorisme
- Macron's Watch n°9. Le VRP multicarte vend armes et culture aux régimes criminels du Golfe
- Macron's Watch n°8. Tel maître tel chien; Pas de Papa Noël pour les petits Guyanais; Réception du dictateur Sissi et relativisme; Rien sur les crimes de guerre au Cameroun
- Macron's Watch n°7. Silence sur le massacre du 17 octobre 1961 à Paris; "je fais et dis ce que je veux"
- Macron's Watch n°6. Droits de l'homme et double discours permanent
- Macron's Watch n°5. "Encore un autre président français raté" selon le NYT; Jupiter, Janus et terrorisme; Florilège de discours méprisants
- Macron's Watch n°4. Fin de la démocratie en France ? Psittacisme atlantiste sur le Venezuela et la Syrie ?
- Macron's Watch n°3. CPI; Recolonisation; OTAN; Néolibéralisme
- Macron's Watch n°2. Mépris, Aliénation et Crimes de guerre
- Macron's Watch n°1. Hollandisation ?; Néocolonialisme au sommet de l'armée; Rafle du Vel d'Hiv' et duplicité; Françafrique, néolibéralisme et suprématie blanche
- Pourquoi un Macron's Watch ?
Les spin doctors du jeune président avaient tout préparé, les médias français étaient de la partie fin prêts pour faire croire au public français qu'on allait enterrer la Françafrique comme à chaque nouvelle élection d'un président français de la Vème République. On remet les compteurs à zéro pour mieux continuer. Macron devait jouer son rôle en décrétant avec une pointe d'humilité (comme ses prédécesseurs) que les méthodes de la Françafrique relevaient du passé, histoire de donner une meilleure image de marque de la France en Afrique. Le programme de la tournée de Macron prévoyait un passage par deux démocraties africaines : le Burkina Faso (bien qu'encore occupé militairement et sous influence monétaire et économique de la France) et le Ghana. Entre les deux pays, le président Macron ne pouvait éviter le passage par le joyau de la Françafrique : la Côte d'Ivoire où le chef d'Etat a été installé par l'armée française en 2011 après une contestation électorale tandis que le président sortant a été envoyé illégalement par la France dans la geôle coloniale de la CPI.
Mais voilà, le hic, c'est que l'homme Macron n'a plus beaucoup d'humilité depuis qu'il a atteint le poste suprême. Et la tournée a été catastrophique. Si l'objectif était de faire croire aux gogos, au public français notamment, que la Françafrique relevait du passé cela a été un échec total.
Son tempérament impétueux, irrespectueux, méprisant envers les Africains a refait surface. Un désastre diplomatique et une image de la France sérieusement écornée à l'international et particulièrement en Afrique. Il est fort probable que Macron après cette tournée ait gagné des points dans les sondages au plan national. Il est de coutume que les discours des présidents français dans le pré-carré néocolonial françafricain ne s'adresse pas aux Africains mais aux Français à des fins sondagières, démagogiques ou électoralistes.
Pendant ce temps là, les médias de masse français ont tout fait pour cacher la mauvaise réception qu'il a eu lorsqu'il est arrivé à Ouagadougou. Le caillassage de son cortège a été passé sous silence dans le PAF tout comme l'attaque à la grenade contre un véhicule de l'armée française qui a fait 3 blessés.
Mais malgré ses protections médiatiques bienveillantes, Macron n'a pu se départir de son ton professoral et paternaliste toujours à la limite du mépris et de l'insulte.
Malgré un lourd passif en matière de propos disqualifiants envers les Africains (blagues vaseuses sur les Kwassa-kwassa ou discours sur l'écart civilisationnel des Africains au G20), il n'a pu s'empêcher de récidiver en humiliant le président du Burkina Faso : le traitant comme un patron traite son employé avec le tutoiement de rigueur frôlant l'incident diplomatique et poussant semble-t-il ce dernier à s'éclipser lors de la conférence : «Mais vous m'avez parlé comme si j'étais le président du Burkina Faso», a-t-il ainsi lancé en réponse à une question de l'assistance sur le mauvais état de l'université de Ougadougou : «Quelque part vous me parlez comme si j'étais encore une puissance coloniale», a encore souligné le président. «Mais moi je ne veux pas m'occuper de l'électricité dans les universités au Burkina Faso», a-t-il encore martelé sur un ton mi-amusé, mi-excédé. Et de s'exclamer, alors que l'agitation de l'assistance, partagée entre rires, applaudissement et sifflet, était palpable : «C'est le travail du président [du Burkina Faso, Roch Marc Christian Kaboré]. L'intéressé quittant subitement la salle. Emmanuel Macron lui lance encore, tout en le tutoyant : «Du coup, il s'en va... Reste là ! Du coup, il est parti réparer la climatisation...».
Et nous ne reviendrons pas non plus sur son apologie constante d'une politique malthusienne envers les Africains, son ton professoral envers un étudiant qui évoque la croissance démographique chinoise renvoyant ce dernier fort peu diplomatiquement à ces chères études, sa stigmatisation des Africains dans leurs responsabilité dans l'esclavage en Libye, sa légitimation du déploiement militaire dans le Sahel, ni sur son apologie du Franc CFA qui ont fait que bon nombre d'Africains se sont sentis humiliés et pas seulement le président du Faso. Mais qui s'en souci vraiment ? On trouvera ici, une analyse plus détaillée du discours de Ouaga.
Et l'homme n'a rien trouvé à redire sur ses propos et encore moins sur la manière dont il a humilié le président du Faso en public. Selon l'AFP, Emmanuel Macron a jugé "ridicule" mercredi soir la polémique à propos de sa boutade visant son homologue burkinabè, soulignant qu'il serait "étrange de considérer qu'on ne peut pas faire d'humour avec un dirigeant africain". Lamentable même dans ses justifications rétrospectives.
Ce même mercredi lorsqu'il est arrivé dans la néocolonie ivoirienne pour participer au sommet d'Abidjan, il n'a pu s'empêcher le soir même de faire une bourde diplomatique et politique monstrueuse. Il a annoncé une intervention militaire et policière française pour lutter contre les trafiquants d'esclaves (ceux-là même qui ont été soutenus par ses prédécesseurs dans une guerre occidentale sauvage en Libye). Il a ainsi annoncé à RFI "une initiative visant à lancer des actions concrètes militaires et policières sur le terrain pour remonter ses filières (esclavagistes)" (voir la vidéo ci-dessous). Rajoutant "La Libye a réaffirmé son accord pour autoriser l’accès au sol libyen (aux militaires et policiers français, ndlr) afin d’évacuer les camps où ces scènes de barbarie ont été identifiées ». Macron cherche-t-il à finir le sale boulot débuté par Sarkozy-Hollande en Libye, cherche-t-il lui aussi sa guerre humanitaire ?
"Mais, dès le lendemain matin, alors que les travaux du sommet reprenaient, l’idée d’une intervention militaire et policière apparaissait précipitée, des représentants de l’UE et de l’UA affirmant à RFI qu’elle était même écartée. Et dans l’après-midi, après être arrivé à Accra au Ghana, dernière étape de sa tournée africaine, le président français faisait machine arrière, déclarant qu’« à ce stade », la France ne prévoyait pas d’envoyer de policiers ou de militaires français en Libye. « Sur le sol libyen, il appartient aujourd’hui au gouvernement libyen d’en décider en lien avec l’Union africaine », a-t-il admis". (Mediapart Migrants: Macron prône une action militaire en Libye, puis recule).
A ce niveau là, on va finir par croire que le jeune président français présente une certaine instabilité. Non, on ne peut pas faire et dire ce que l'on veut (MW n°5 "Je fais et dit ce que je veux") quand on est président et à fortiori quand on est un simple mortel.
On n'ira tout de même pas jusqu'à croire ces propos d'un psychiatre italien en mal de célébrité mais l'homme apparaît pour le moins écervelé et doté de représentations racialistes et colonialistes qui lui chevillent au corps et à l'âme. Celles-ci sont sans doute liées à la culture qui le surdétermine et qu'il entend bien transmettre à ses concitoyens de base. C'est la théorie du ruissellement continuel. Celui qui était à la base de la pyramide et qui en arrive au sommet retransmet les valeurs qu'on lui a inculqué. Une boucle sans fin.
Comme disait Verschave, la "Françafrique c'est du blaguer tuer". On pourra comprendre que certains journalistes aient pu concevoir la teneur de ses discours comme l'expression d'une forme de suprémacisme sans scrupule au service du complexe militaro-industriel et financier.
Le Macron's Watch est plus que jamais une veille médiatique nécessaire compte tenu des crimes commis en Afrique (Côte d'Ivoire, Libye, Centrafrique...) par ses prédécesseurs. Macron prêt à bondir comme un diable pour une nouvelle guerre françafricaine ou au Moyen-Orient ? Restons vigilant !