Dossier – Comment le Maroc détourne les ressources du Sahara Occidental (II)
Par Houria Aït-Kaci
Algérie patriotique
Après son invasion en 1975, lors de la «marche verte», pour annexer le Sahara Occidental, le Maroc exploite les ressources naturelles de ce pays sans vergogne. Cette exploitation «lui a permis, en partie, de financer la guerre et d’ancrer durablement cette occupation coloniale», estime Sahara Info, le site de l’Association des amis de la République arabe sahraouie démocratique. En 1998, le Maroc, qui occupe 80% du territoire sahraoui, construit un mur de séparation pour mieux isoler le «Sahara utile» et en exploiter les ressources «en toute sécurité».
Selon plusieurs témoignages publiés dans la presse internationale, sur la route reliant Laâyoune à Dakhla (où le roi Mohammed VI a inauguré la nouvelle halle au poisson en février 2016), de nombreux camions transportent poulpes et poissons blancs pêchés dans les eaux sahraouies, qui sont parmi les plus poissonneuses au monde. La pêche dans les «provinces du Sud» (nom donné par le Maroc au Sahara Occidental) représente 78% des captures marocaines et «génère une richesse immense», d’après un reportage du mensuel français Le Monde Diplomatique en mars 2014.
Tout comme les poissons, les produits agricoles sont quotidiennement convoyés au Maroc, avant d’être expédiés vers le marché européen. La tomate de Dakhla est acheminée à Agadir, au Maroc, où elle est conditionnée sous le label «Maroc», puis commercialisée sur les marchés européens sous les marques Etoile du Sud, Idyl, Azura, qui sont des sociétés franco-marocaines. La France est le premier partenaire commercial et le principal investisseur étranger au Maroc (70% des IDE).
«La France contribue activement à ce statu quo en défaveur des Sahraouis», estime Le Monde Diplomatique, en soulignant que «les autorités marocaines déploient une intense activité pour convaincre que l’exploitation économique profite à la population du territoire». Elles multiplient les annonces de nouveaux programmes d’investissement (…) et «le Makhzen (le palais) fait tout pour accréditer l’idée que les Sahraouis profitent des richesses naturelles».
Le Maroc a lancé en 2013 un gigantesque programme d’investissement de plus de 12 milliards d’euros sur une période de dix ans visant à créer 120 000 emplois pour «développer les provinces du Sud». «Le roi Mohammed VI veut développer et pacifier le Sahara Occidental en attendant un règlement du conflit aux Nations unies», note Le Figaro.
Les firmes Glencore, Kosmos et Capricorn se retirent
Le retrait de Glencore, multinationale pétrolière suisse, de l’exploration pétrolière a été suivi par celui de Kosmos Energy (Etats-Unis) et Capricorn Exploration & Development Company Ltd (Royaume-Uni), dans le même bloc Boujdour, où elles opéraient depuis plusieurs années avec une licence octroyée par l’Office national des hydrocarbures et des mines du Maroc (ONHYM).
Le retrait de Glencore, présente depuis 2013 sur le bloc Boujdour, intervient après les pressions exercées par plusieurs investisseurs internationaux, des banques et des bailleurs de fonds, qui ont refusé de s’impliquer dans ces projets illégaux du fait qu’ils concernent un territoire occupé. L’ONU avait énoncé en 2002 qu’aucune exploration pétrolière ne peut avoir lieu sans le consentement du peuple sahraoui.
Pour l’observatoire WSRW, le retrait de Glencore «peut contribuer au processus de paix», car «tant que le Maroc continue de signer des accords avec des entreprises étrangères pour l’exploration pétrolière dans le territoire qu’il occupe, il rejettera toute proposition onusienne de négociation».
Les pressions juridiques et éthiques contre les sociétés étrangères impliquées dans des projets marocains ont fini par avoir gain de cause de la société canadienne Nutrien, «le plus gros importateur» des phosphates, qui a annoncé le 25 janvier dernier son intention d’arrêter ses importations suite à la fin du contrat entre la société canadienne Agrium et l’OCP en 2018. Il faut savoir qu’Agrium et Potash Corp (Etats-Unis) ont été mises sur la liste noire de plusieurs investisseurs institutionnels pour non-respect du droit international et des droits humains au Sahara Occidental.
Le pillage des phosphates, ressource historique du Sahara Occidental, a rapporté plus de 300 millions de dollars en 2013 à l’Office chérifien des phosphates (OCP) et plus de 200 millions de dollars en 2016, selon WSRW. La mine à ciel ouvert de Boucraâ, qui fournit l’un des meilleurs minerais au monde, est exploitée depuis 1962. «Après le départ des colons espagnols», le Maroc «a pu contrôler Phosboucraâ», en accord avec l’occupant antérieur, l’Espagne, qui en est «restée actionnaire jusqu’en 2002», a révélé Le Monde Diplomatique.