Le 4 juin, Emmanuel Macron recevra Mahamadou Issoufou, président du Niger, en visite officielle à l’Elysée. Le 23 décembre, lors d’une visite officielle à Niamey, le chef d’Etat français avait qualifié son hôte nigérien «d’exemple pour la démocratie». L’élection présidentielle remportée avec plus de 92%, avec un opposant battant campagne depuis la prison et dans des conditions contestées, ternissait déjà cette image. Mais depuis, le Niger a connu un terrible recul démocratique : interdictions répétées de manifester, arrestations massives de militants de la société civile, pression sur les médias indépendants, violation des droits constitutionnels, répression des mouvements étudiants…

Le 25 mars, une vingtaine de personnes, dont plusieurs leaders de premier plan de la société civile, ont été interpellées. Leur tort ? Avoir dénoncé la nouvelle loi de finances 2018 qui entérine une fiscalité pesante pour les plus démunis (augmentation de la TVA, taxe sur les vendeurs ambulants, extension de l’impôt sur le revenu…) tout en allégeant la fiscalité d’entreprises nationales et internationales de téléphonie mobile et des industries extractives. Cette nouvelle loi, critiquée depuis des mois par les organisations de la société civile, a réveillé une population qui crie à l’injustice et a manifesté par milliers dans les rues de Niamey, Tillabéry ou Zinder. Face aux revendications légitimes des citoyens, le pouvoir n’a répondu que par la répression.

Le 15 avril, une nouvelle salve de militants de la société civile a été incarcérée. A ce jour, 26 d’entre eux sont toujours détenus dans des prisons éloignées de plusieurs dizaines de kilomètres, voire centaines, de la capitale. Les procédures judiciaires sont entachées d’irrégularités vivement dénoncées par le collectif d’avocats défendant ces membres de la société civile. L’actualité politique et sociale troublée que vit le Niger aurait besoin d’un traitement médiatique précis et indépendant. Mais l’Etat nigérien ne tolère plus l’indépendance. Après avoir été emprisonné pendant un an, le journaliste Baba Alpha, critique du pouvoir, a été déchu de sa nationalité et expulsé vers le Mali en avril. La radio-télévision Labari appartenant à Ali Idrissa – un des principaux leaders de la société civile, emprisonné depuis plus de deux mois, malade et privé de soins – a été empêchée d’émettre. Ce musellement de la presse a fait l’objet d’une déclaration unanime des médias indépendants le 4 février. Face à un tel rétrécissement de l’espace civique et des libertés, que dit la France ? Que dit la communauté internationale ? Rien. Au contraire, Emmanuel Macron décide quand même de recevoir un président de plus en plus contesté et contestable, geste évident de soutien...

 

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