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Le Canada s’apprête à hausser radicalement et accélérer les déportations afin de «sécuriser» ses frontières (WSWS)

par Roger Jordan 12 Novembre 2018, 12:50 Canada Migrants Expulsion Xénophobie

Le Canada s’apprête à hausser radicalement et accélérer les déportations afin de «sécuriser» ses frontières (WSWS)

Au nom de la «sécurisation» des frontières du Canada, le gouvernement libéral dirigé par Justin Trudeau a ordonné à l'Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) d'expulser 10.000 migrants – la grande majorité d'entre eux fuyant la pauvreté et l'oppression – d'ici mars 2019.

La volonté des libéraux d'augmenter radicalement et d'accélérer les expulsions représente une intensification de son programme anti-immigrants de droite et encouragera les forces politiques les plus réactionnaires, y compris le premier ministre de l'Ontario, Doug Ford, le nouveau gouvernement de la Coalition Avenir Québec (CAQ) au Québec et des groupes purement fascistes.

On a appris l’existence de cet ordre dans un courriel d'un haut responsable du gouvernement qui avait été divulgué à la Canadian Broadcasting Corporation (CBC) la même semaine que le président américain Donald Trump avait juré d'envoyer 15.000 soldats à la frontière américano-mexicaine et les avait exhortés à ouvrir le feu sur les réfugiés fuyant la pauvreté et la violence en Amérique centrale. Pas un seul mot de condamnation de ces propos fascisants n'a été exprimé par Trudeau ou ses ministres. Au lieu de cela, ils intensifient leur collaboration avec les autorités américaines pour contrôler la frontière canado-américaine, notamment en essayant d'empêcher ceux qui fuient la chasse aux sorcières anti-immigrante de Trump de trouver refuge au Canada.

Le courrier électronique du gouvernement a confirmé un nouvel objectif annuel de 10.000 expulsions, soit une augmentation de 35%. Barry Campbell, directeur de l'ASFC, a écrit dans le courriel révélé: «Afin de s'assurer que l'ASFC s'acquitte de son mandat en vertu de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, à savoir procéder aux renvois dans les plus brefs délais, l'agence se concentre à augmenter le nombre global de renvois pour la présente année fiscale et au-delà.»

La mesure d’expulsion vise tout particulièrement les demandeurs du statut de réfugié qui sont arrivés des États-Unis au Canada, afin d’empêcher les candidats à l’immigration de penser que le Canada est un refuge.

Le premier ministre Trudeau a publiquement approuvé les expulsions accélérées, de la manière la plus cynique. Il a déclaré aux journalistes que son gouvernement cherchait à «améliorer le système d'immigration» en le faisant «traiter plus rapidement les dossiers». Pour sa part, le ministre de la Sécurité publique, Ralph Goodale, a qualifié la vague d'expulsion de «nécessaire» et a enjoint le l’ASFC à «accélérer le rythme».

La chasse aux sorcières anti-immigrée des libéraux ne devrait pas surprendre. En dépit de leur posture proréfugiée et de la tentative faite par les médias de les présenter comme une alternative «progressiste» à la xénophobie des conservateurs et des forces d'extrême droite, les libéraux ont réagi à l'augmentation du nombre de demandeurs d'asile entrant par les États-Unis avec hostilité et insensibilité.

Pour commencer, le gouvernement Trudeau a défendu corps et âme l'accord réactionnaire Canada-États-Unis sur les tiers pays sûrs. En vertu de cet accord, les personnes craignant la persécution aux États-Unis qui cherchent à entrer au Canada à un poste de contrôle frontalier se voient automatiquement refuser le droit de demander l'asile et sont immédiatement renvoyées aux États-Unis, au motif qu'il s'agit d'un pays «sûr» pour les réfugiés.

C'est le refus du gouvernement d'abroger l'accord sur les tiers pays sûrs qui a conduit quelque 40.000 demandeurs d'asile à entrer au Canada en 2017-2018 de façon irrégulière, car s'ils le font, Ottawa est obligé, en vertu du droit international, d'entendre leurs revendications du statut de réfugié.

Cela signifie entre autres que les demandeurs d'asile ont souvent dû entrer au Canada dans des conditions extrêmement dangereuses, voire mortelles. La droite et l'extrême droite se sont emparées de leur entrée au Canada à l'extérieur d'un poste frontalier officiel pour les qualifier d’«illégaux» et de «contrevenants à la loi».

De même, afin de dissuader d’autres personnes de les rejoindre, le gouvernement a refusé de fournir aux demandeurs d’asile les ressources nécessaires, ce qui les a forcés à se tourner vers les banques alimentaires et les abris d’urgence. La droite et l'extrême droite ont alors saisi cette occasion pour faire de ces réfugiés des boucs émissaires, en les accusant d’accaparer des services sociaux déjà inadéquats.

Le traitement sévère réservé aux demandeurs du statut de réfugié par les libéraux est conforme à la nature du système d'immigration canadien dans son ensemble, qui est très restrictif et a été conçu pour répondre aux besoins des grandes entreprises canadiennes.

Alors que les médias promeuvent sans relâche le système d'immigration «progressiste» du Canada, ce dernier a été applaudi par certaines des personnalités politiques les plus réactionnaires de la planète. Cela comprend Trump, qui a proclamé que le système d’immigration par points d’Ottawa était un exemple à suivre. Alice Weidel, dirigeante de l’Alternative pour l'Allemagne (AfD) fascisante, est une autre partisane du «modèle canadien». Elle associe un programme d'extrême droite xénophobe et nationaliste à la banalisation des crimes commis par Hitler et les nazis.

Au cours des deux années de présidence de Trump, le gouvernement Trudeau a soigneusement évité de critiquer sa vendetta contre les immigrants. C’est une décision calculée que les préoccupations en matière de droits de l’homme et de droit international ne doivent pas entraver l’intérêt stratégique de la bourgeoisie canadienne de maintenir et de renforcer son partenariat économique et militaire de plusieurs décennies avec Washington et Wall Street. Cela a été résumé par le Globe and Mail, porte-parole traditionnel de l'élite financière canadienne, qui a déclaré peu après l'élection de Trump qu'il était nécessaire que le Canada soit positionné derrière ses murs.

Ce n'était pas seulement une référence explicite à la demande réactionnaire de Trump pour un mur à la frontière avec le Mexique. Il exprimait également le souhait de l'élite dirigeante canadienne de s'aligner encore plus étroitement sur Washington pour défendre la domination mondiale de l'Amérique du Nord par le biais d'une guerre commerciale et, si nécessaire, d'un conflit militaire avec ses rivaux géostratégiques et économiques communs: en particulier la Russie et la Chine.

Le gouvernement Trudeau a dûment acquiescé. Les autorités canadiennes en matière d’immigration collaborent étroitement avec la US Border Protection Agency et le Department of Homeland Security, les mêmes agences qui terrorisent les communautés d’immigrants du pays et maltraitent les enfants dans des camps de concentration. De plus, le Canada a récemment accepté une version renégociée de l'Accord de libre-échange nord-américain, qui en fait un bloc commercial protectionniste plus explicite. Les libéraux ont également intégré le Canada encore plus étroitement dans les offensives militaires américaines stratégiques contre la Russie et la Chine et ont annoncé une augmentation de plus de 70% de leurs dépenses militaires d'ici 2026.

Au cours des deux dernières décennies, l'impérialisme canadien a participé à pratiquement toutes les guerres d'agression menées par les États-Unis, du bombardement de la Yougoslavie à l'occupation de l'Afghanistan, à la guerre aérienne sanglante de l'OTAN contre la Libye et à la guerre en cours en Syrie et en Irak. Ottawa porte donc une part non négligeable de la responsabilité de la mort et des destructions survenues au Moyen-Orient et au-delà, qui ont forcé des dizaines de millions de personnes à devenir des réfugiés.

Le virage à droite des libéraux s'inscrit dans une tendance plus générale à la réaction de l'ensemble de l'establishment canadien, enracinée dans l'éruption de la guerre commerciale, la montée des tensions géopolitiques mondiales et, surtout, la montée de l'opposition sociale au sein de la classe ouvrière.

L'ancien premier ministre conservateur, Stephen Harper, vient de publier un livre dans lequel il défend Trump et affirme que le «populisme de droite» est un antidote nécessaire au danger du socialisme.

Pendant ce temps, l'opposition officielle conservatrice dénonce le traitement cruel infligé par les libéraux aux réfugiés comme étant terriblement inadéquat. Les conservateurs exigent que le gouvernement désigne l'ensemble de la frontière canado-américaine comme un «point d'entrée» en vertu de l'Entente sur les tiers pays sûrs afin qu'Ottawa puisse automatiquement expulser toute personne entrant au Canada en provenance des États-Unis.

Le gouvernement progressiste-conservateur de Ford en Ontario et la CAQ de François Legault au Québec ont saisi le plan des libéraux visant à augmenter le nombre de déportations afin de renforcer leurs propres revendications en vue d'une répression encore plus radicale.

Le gouvernement Ford, qui a mené une campagne de propagande rendant coupables les réfugiés des services sociaux délabrés de l’Ontario, notamment le manque de logements, a intensifié sa campagne après les révélations de la CBC. Selon une déclaration officielle du gouvernement de l’Ontario, le gouvernement Trudeau ne disposait pas d'un «plan crédible» pour s’occuper de ceux qui traversent les frontières «illégalement». La déclaration citait la ministre des Services sociaux, Lisa MacLeod, qui affirmait, sans fournir aucune preuve, que 40% des occupants des logements pour sans-abri à Toronto étaient des immigrants.

Cette campagne réactionnaire, conçue pour détourner l'attention de la responsabilité de tous les partis politiques, du NPD aux conservateurs, pour des décennies de réduction des dépenses sociales, est également conçue pour créer un soutien à l'assaut généralisé du gouvernement Ford sur les dépenses publiques. Ford a déjà imposé un gel de l’embauche dans le secteur public, promis de réduire les dépenses publiques de plusieurs milliards de dollars et annulé une augmentation extrêmement modeste du salaire minimum.

(Article paru en anglais le 7 novembre 2018)

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