Des Fake News accusent Cuba, la Russie et la Chine d'"attaque sonique" contre des diplomates étatsuniens - Les coupables étaient des grillons (Moon of Alabama)

Des Fake News accusent Cuba, la Russie et la Chine d'"attaque sonique" contre des diplomates étatsuniens - Les coupables étaient des grillons
Article originel : Fake News Reports Blamed Cuba, Russia And China Of 'Sonic Attack' On U.S. Diplomats - The Culprits Were Crickets
Moon of Alabama

À l'automne 2016, des diplomates étatsuniens stationnés à Cuba ont commencé à se plaindre d'être affectés par un bruit mystérieux. Vingt-quatre membres du personnel de l'ambassade et de leur famille ont fait état d'une liste bizarre de symptômes, allant des maux de tête, des étourdissements et des troubles du sommeil aux problèmes d'équilibre, de vision et d'audition. Les médecins n'étaient pas sûrs de ce qui affectait ces personnes. Il y a eu toutes sortes de spéculations à propos d'une mystérieuse "arme sonique" avec laquelle les diplomates ont été "attaqués", mais aucune preuve convaincante n'a été fournie.

Cuba a pleinement coopéré à une enquête du FBI sur ce mystère. Un scientifique a dissipé l'idée d'une attaque à l'arme sonique. Les preuves médicales se sont avérées douteuses. Néanmoins, les politiciens anticubains aux États-Unis ont utilisé ce thème avec succès pour faire pression sur la Maison-Blanche afin qu'elle pénalise le pays. L'administration Trump a rappelé 60% du personnel de son ambassade à La Havane et a expulsé les diplomates cubains de l'ambassade à Washington. Elle a adressé un avertissement à ses citoyens qui se rendaient à Cuba et a cessé de délivrer des visas aux Cubains à La Havane.

L'enquête s'est poursuivie. Quelques enregistrements du bruit mystérieux ont été faits et les médecins ont fait entendre plusieurs de ces derniers aux personnes affectées. Les patients ont confirmé que le son était similaire au bruit qui les avait dérangés. Le 17 octobre 2017, ces fichiers sonores ont été remis à l'Associated Press (AP)et publiés (vidéo). Dans son rapport sur les dossiers, l'AP a noté :

    On dirait une masse de grillons.

Le gouvernement cubain et son scientifique ont analysé ces fichiers sonores et les ont comparés aux sources sonores connues à Cuba. Le 27 octobre 2017, ils ont publié leurs conclusions. Les résultats ont également été remis aux enquêteurs étatsuniens. L'AP a rapporté la découverte cubaine :

    Cuba a présenté jeudi sa défense la plus détaillée à ce jour contre les accusations étatsuniennes selon lesquelles des diplomates étatsuniens à La Havane ont été soumis à de mystérieuses attaques sonores qui leur ont causé des maux de tête, des problèmes auditifs et des commotions cérébrales.

    Dans une émission spéciale d'une demi-heure, diffusée aux heures de grande écoute et intitulée "Attaques soniques présumées", des responsables cubains ont tenté de démentir l'allégation de l'administration Trump selon laquelle 24 responsables étatsuniens ou leurs proches avaient été victimes d'attaques délibérées par un coupable encore indéterminé.
    ...
    Des responsables du ministère cubain de l'Intérieur ont déclaré que les enquêteurs étatsuniens leur avaient présenté trois enregistrements réalisés par des victimes présumées d'attaques sonores et que l'analyse des sons avait révélé qu'ils étaient extrêmement similaires à ceux des grillons et des cigales qui vivent le long de la côte nord de Cuba.

    "C'est la même largeur de bande et c'est à les entendre très similaire", a déclaré le lieutenant-colonel Juan Carlos Molina, spécialiste des télécommunications au ministère de l'Intérieur. "Nous avons comparé les spectres des sons et il est évident que ce son est très similaire à celui d'une cigale."

Basé sur l'article de l'AP, ce site se moquait de la fuite des diplomates étatsuniens devant le bruit du grillon.

L'incident de La Havane était probablement basé sur une peur innocente d'une arme. Ou peut-être s'agissait-il d'un stratagème des forces anticubaines pour saboter les relations avec Cuba. Très probablement, il s'agissait d'une psychose de masse à cause d'un bruit naturel inconnu - les grillons.

Le reportage d'AP a été publié sur de nombreux sites d'information, mais peu d'entre eux se sont penchés plus avant sur la question. Le rapport aurait dû clore le débat, mais il a vite été oublié.

Même après que le scientifique cubain eut donné une explication très plausible, la peur du gouvernement étatsunien face à l'"attaque sonore" n'a pas faibli. Seule la cible a changé.

En mai 2018, les États-Unis ont soudainement accusé la Chine d'une " attaque " similaire à celle qui aurait eu lieu à Cuba :

    Le secrétaire d'État US, Mike Pompeo, a déclaré mercredi qu'un incident impliquant un employé du gouvernement des Etats-Unis en poste en Chine qui a signalé des "sensations anormales de bruit et de pression" suggérant une lésion cérébrale légère avait des indications médicales qui sont "très similaires" et "entièrement cohérentes" à celles des diplomates étatsuniens affectés à la Havane.

Mais au milieu de l'année 2018, un groupe de travail spécial mis sur pied par le département d'État ne connaissait toujours pas les causes de la maladie des diplomates affectés à Cuba et, plus tard, en Chine. Il y a de sérieuses questions à savoir si les "dommages cérébraux" que le son a prétendument causé existe même. Aucun des diplomates n'a été examiné avant les incidents. Les "dommages" mineurs que certains médecins ont vus sur les images de certains de leurs patients sur les scanners cérébraux étaient peut-être là bien avant leur arrivée au département d'État.

La piste de la Chine n'a mené nulle part. Mais en septembre 2018, la Russie a été soudainement accusée d'être la cause du bruit menaçant. NBC News a rapporté :

    Les services de renseignement enquêtant sur les mystérieuses "attaques" qui ont conduit à des lésions cérébrales chez le personnel étatsunien à Cuba et en Chine considèrent la Russie comme le principal suspect, selon les déclarations à NBC News de trois responsables étatsuniens et de deux autres au courant de l'enquête..

    La suspicion que la Russie est probablement à l'origine des attaques présumées est étayée par des preuves provenant d'interceptions de communications, connues dans le monde de l'espionnage sous le nom de renseignement électromagnétique, recueillies au cours d'une enquête longue et continue impliquant le FBI, la CIA et d'autres agences des États-Unis. Les officiels ont refusé de donner plus de détails sur la nature des renseignements.

    Toutefois, les preuves ne sont pas encore assez concluantes pour que les États-Unis attribuent officiellement à Moscou de la responsabilité des incidents qui ont commencé à la fin de 2016 et se sont poursuivis en 2018, causant une rupture majeure dans les relations entre les États-Unis et Cuba.

L'histoire de NBC était accompagnée d'un drapeau rouge. L'un de ses auteurs était Ken Dilanian, le nettoyeur de la CIA, qui laisse la CIA réécrire ses articles avant qu'ils ne soient publiés. Chaque fois que l'on voit le nom de cet auteur, il faut présumer qu'on lit de la désinformation.

Mais cela n'avait pas d'importance. Basé sur le vague reportage de NBC, le Daily Beast a titré à la Une de ses journaux :  Russia Is No. 1 Suspect in Mystery Brain Attacks in Cuba and China: Report ("La Russie est le suspect numéro 1 dans les attaques cérébrales mystérieuses à Cuba et en Chine : Rapport"). The Guardian s'est joint aux allégations :  Russia main suspect behind illnesses of US staff in Cuba and China – report. ("La Russie est le principal suspect derrière les maladies présentés par le personnel étatsunien à Cuba et en Chine - rapport"). La chaîne russophobe MSNBC a diffusé toute une séquence sur la question.

Aucun des rapports ne fait mention de la découverte cubaine, vieille d'un an, d'un bruit de cigale que l'AP avait déjà publié.

Vendredi dernier, le New York Times a rapporté que des scientifiques étatsuniens ont découvert que le bruit mystérieux identifié par les diplomates provenait effectivement de grillons :

    Alexander Stubbs de l'Université de Californie, Berkeley, et Fernando Montealegre-Z de l'Université de Lincoln en Angleterre ont étudié un enregistrement des sons entendus par des diplomates et publiés par The Associated Press.

    "Il y a beaucoup de débats dans la communauté médicale sur les dommages physiques, s'il y en a, causés à ces personnes ", a déclaré Stubbs lors d'une entrevue téléphonique. "Tout ce que je peux dire, c'est que l'enregistrement diffusé par l'A.P. correspond au bruit d'un grillon, et nous pensons savoir de quelle espèce il s'agit."
    ...
    La chanson du grillon à queue courte des Indes "correspond, dans des détails nuancés, à l'enregistrement d'A.P. en termes de durée, de fréquence de répétition des impulsions, de spectre de puissance, de stabilité du rythme cardiaque et d'oscillations par impulsion ", ont écrit les scientifiques dans leur analyse.

Le bruit publié est en effet extrêmement similaire au bruit du grillon à queue courte des Indes occidentales enregistré dans cette base de données scientifiques.

Le New York Times ne mentionne même pas que les scientifiques cubains sont arrivés au même résultat que les scientifiques étatsuniens. Il ne dissipe pas non plus l'absurde "La Russie l'a fait" que NBC News et d'autres ont déblatéré.

Le problème est probablement maintenant enterré, mais les dommages qu'il a causés ne seront pas réparés.

Les relations diplomatiques avec Cuba sont encore réduites. Le département d'État diffuse toujours un avertissement aux voyageurs pour Cuba "en raison d'attaques visant des employés de l'ambassade des États-Unis à La Havane". Dans les archives publiques, la Russie est toujours accusée d'être à l'origine de ce faux problème dans lequel elle n'a jamais été impliquée.

Aucun des " journalistes " impliqués dans cette campagne de peur ne sera puni pour avoir ignoré le précédent article de l'AP sur la découverte cubaine. Aucun des médias qui ont dénigré la Russie à ce sujet ne rétractera ces rapports ou ne révélera les responsables qui en sont à l'origine.

Le bruit du grillon peut atteindre 100 décibels. C'est extrêmement irritant pour quiconque n'y est pas habitué. Certains diplomates nouvellement arrivés à Cuba se sont sentis concernés. D'autres les ont rejoints dans leur peur d'être attaqués par une arme mystérieuse. Mais les effets médicaux étaient très mineurs. Certains médecins ont allégué avoir trouvé des lésions cérébrales mineures, d'autres ont réfuté ces résultats comme étant trop vagues.

Les politiciens anticubains ont profité de l'occasion pour réclamer des sanctions et la Maison-Blanche a exhaussé leurs souhaits. Ces forces de l'État profond qui veulent dépeindre la Chine et la Russie comme des ennemis se sont cramponnés au sujet. Les médias les ont volontairement suivis en ignorant la science qui a réfuté la thèse de l'" arme sonique" et l'explication très plausible que les scientifiques cubains avaient trouvée.

Toute l'histoire nous rappelle encore une fois de nous méfier de toutes les nouvelles qui accusent telle ou telle personne, tel groupe ou tel pays de faire quelque chose de mal aux "intérêts étatsuniens" perçus. La plupart de ces histoires sont de fausses informations, basées sur des allégations fausses.

Peut-être que Poutine a effectivement instrumentalisé ces grillons des Indes à queue courte. Selon certaines sources, son but était de créer un doute sur la véracité de l'information dans les médias "occidentaux". Les responsables disent que son stratagème a été très efficace. Ils demandent plus d'argent pour le contrer.

Traduction SLT avec DeepL.com

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