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Recrutés, arrêtés, jugés : Des espions yéménites racontent leur travail à contrecœur pour la CIA et le MI6 (MintPress News)

par Ahmed AbdulKareem 21 Mars 2021, 08:07 Yemen CIA MI6 Collaboration USA Arabie Saoudite Crimes contre l'humanité Impérialisme Articles de Sam La Touch

Recrutés, arrêtés, jugés : Des espions yéménites racontent leur travail à contrecœur pour la CIA et le MI6.
Article originel :  Recruited, Arrested, On Trial: Yemeni Spies Tell of Their Reluctant Work for CIA, MI6
Par Ahmed AbdulKareem*
MintPress News, 19.03.21

La CIA et le MI6 ont recruté des centaines de Yéménites pour travailler comme mercenaires et espions, recueillant des renseignements et les coordonnées des positions militaires yéménites, leur promettant de l'argent et même des passeports pour ce travail dangereux.

Des hommes se détachent sur une grande représentation du drapeau yéménite alors qu'ils assistent à une cérémonie à Sanaa, au Yémen. Hani Mohammed | AP

Des hommes se détachent sur une grande représentation du drapeau yéménite alors qu'ils assistent à une cérémonie à Sanaa, au Yémen. Hani Mohammed | AP

SANA'A, YEMEN - Il est incontestable que les États-Unis et le Royaume-Uni ont été les principaux bienfaiteurs du Royaume saoudien dans sa tentative, depuis six ans, d'utiliser sa puissance militaire pour mettre le Yémen au pas. Les deux pays ont fourni des milliards de dollars en armes de haute technologie, en renseignements et en formation à ce qui est sans doute la monarchie la plus répressive du Moyen-Orient. Mais selon les confessions de six hommes arrêtés le mois dernier dans le cadre de la bataille en cours pour la province stratégique de Marib au Yémen, le soutien occidental à la coalition dirigée par l'Arabie saoudite va bien au-delà du soutien militaire conventionnel.

 
Les espions yéménites arrêtés parlent à MintPress

La CIA et le MI6, son homologue britannique, ont recruté des centaines de Yéménites pour qu'ils travaillent comme mercenaires et espions, recueillant des renseignements et les coordonnées des positions militaires yéménites à Marib, al-Mahrah, Sanaa et Sadaa, et fournissant ces informations à leurs commanditaires, selon les aveux faits au Service yéménite de renseignement de sécurité (YSIS) par au moins six ressortissants yéménites actuellement jugés à Sanaa pour violation de l'article 130 du code pénal yéménite.

Les six hommes, qui sont détenus dans un centre de détention à Sanaa, ont accepté de parler de leur expérience à MintPress. Ils insistent sur le fait que la pauvreté abjecte résultant de la guerre en cours les a poussés à participer à l'opération, qui, selon eux, était assortie de la promesse d'un versement de 300 dollars.

Selon les hommes, l'opération s'est déroulée principalement à l'aéroport de Ghaydah, dans l'est d'Al-Mahrah. Là, ils ont rejoint des dizaines de jeunes Yéménites recrutés par la CIA pour être formés par des officiers étatsuniens et britanniques sur la manière d'identifier et de décrire correctement ; l'utilisation de caméras, de logiciels sophistiqués et de dispositifs utilisés pour partager des coordonnées ; la collecte d'informations ; et la manière de trouver et d'identifier des chefs militaires et des quartiers généraux, des ateliers, des usines, des laboratoires, des entrepôts, des postes de contrôle et des sites de lancement de missiles et de drones. Selon les hommes, ils ont même cherché à localiser les résidences et les véhicules personnels des membres d'Ansar Allah et d'autres opposants déclarés à l'intervention saoudienne.

 
Un processus de recrutement minutieux

Leur processus de recrutement a été long et délicat, commençant lorsque les hommes ont été approchés par des officiers yéménites travaillant pour l'Agence de sécurité nationale basée à Aden. Après avoir accepté de se rendre à al-Mahrah pour en savoir plus, les hommes ont été logés dans des hôtels avant d'être conduits dans des chalets spéciaux à l'aéroport de Ghaydah, où ils ont été interrogés par des agents des services de renseignement étatsuniens et britanniques. Muhammad Har, l'un des six inculpés, a déclaré à MintPress qu'il avait été initialement approché par Fayez Muhammad Ismail Al-Muntaser, ancien officier de la National Security Agency et commandant du bataillon des missions spéciales de la coalition sous commandement saoudien.

" Lorsque mon tour est arrivé, je suis entré dans le [inintelligible] et j'ai été surpris de voir que les membres du comité étaient étatsuniens. L'un d'eux posait les questions, le deuxième écrivait des données, le troisième prenait les empreintes digitales, tandis que le quatrième, à la peau noire, traduisait", se souvient Ali Mohammed Abdullah al-Jomani, un détenu de 34 ans originaire de Haddah. Al-Jomani, qui dit avoir gagné l'équivalent d'environ 10 dollars par jour, a été hébergé à l'hôtel Taj Al-Arab pendant trois mois au cours du processus d'initiation. "Lorsque nous sommes retournés pour mener le deuxième entretien, nous n'avons pas trouvé les Etatsuniens, mais plutôt des officiers britanniques. Ils ont répété les questions précédentes sur notre capacité à utiliser des cartes, à conduire des voitures et à utiliser des ordinateurs." Cela correspond aux allégations du service de renseignement de sécurité yéménite selon lesquelles la CIA recrutait de jeunes Yéménites et les remettait à des officiers britanniques pour qu'ils les forment et les manipulent.

Selon les hommes, il y avait deux camps distincts à l'aéroport, l'un étatsunien et l'autre saoudien. "Après avoir été acceptés, nous avons été formés sur la façon de décrire les personnes, les voitures et les maisons et sur la façon de partager des données et des photos via WhatsApp", se souvient Basem Ali Ahmed al-Kharouga, un détenu de 29 ans originaire de Sanaa. "La formation comprenait des exercices sur le terrain à l'intérieur et à l'extérieur de l'aéroport". Al-Kharouga rêvait depuis longtemps de voyager à l'étranger et pensait avoir enfin trouvé le moyen de fuir la violence lorsqu'on lui a promis un passeport étranger en échange du travail.

Peu d'options pour les jeunes Yéménites

Outre la pauvreté et le chômage, il existe d'autres raisons pour lesquelles les jeunes Yéménites risqueraient leur vie et leur liberté pour travailler avec des services de renseignement étrangers, la plus importante étant peut-être le blocus imposé au pays par la coalition saoudienne depuis 2015. Avant la guerre, les Yéménites quittaient régulièrement le pays pour les affaires, le plaisir et les soins médicaux. Aujourd'hui - avec les ports maritimes et les aéroports, en particulier l'aéroport international de Sanaa, autrefois florissant, effectivement fermés par la coalition saoudienne - les Yéménites ne sont plus en mesure de fuir la violence dans leur pays ou de voyager à l'étranger, laissant de nombreux jeunes Yéménites désespérés avec peu d'options.

Des hôpitaux, des écoles, des immeubles de bureaux et des infrastructures telles que des puits d'eau et des réseaux d'égouts ont été détruits dans le sillage des campagnes de bombardement saoudiennes, qui sont souvent menées avec des informations de ciblage étatsuniennes et britanniques glanées auprès de leur réseau d'espions recrutés. Des funérailles, des mariages, des maisons et d'autres installations civiles ont été ciblés, entraînant la mort et la blessure de milliers de civils et rendant les services de renseignement étatsuniens et britanniques complices, au mieux, de cette violence gratuite.

"Nous avons été envoyés à Marib, moi et un autre gars qui s'appelait 'Akram Amer', pour une mission qui a duré quatre jours. Nous avons été chargés par [un homme nommé] 'George' d'espionner la maison d'Ali Salem al-Huraizy près du parc al-Rawda", a déclaré à MintPress Aymen Mujahid Qaid Muhammad Harish, l'un des six détenus. L'une des tâches de Harish consistait à surveiller les sites de la ville d'Arhab, au nord de Sanaa, où la coalition saoudienne a ensuite visé une maison où se déroulaient des funérailles. Cette double frappe aérienne a fait un mort, un enfant et neuf femmes. Selon Harish, ses supérieurs occidentaux, qui étaient chargés de fournir aux Saoudiens des données de ciblage, sont responsables de cette attaque.

 

 

*Ahmed AbdulKareem est un journaliste yéménite basé à Sanaa. Il couvre la guerre au Yémen pour MintPress News ainsi que pour les médias locaux yéménites.

Traduction SLT

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