Covid : le Conseil d'Etat grec déclare inconstitutionnel le maintien de l'obligation vaccinale du personnel soignant
France Soir, 29.11.22
Environ 2000 manifestants défilaient à Thessalonique après que le gouvernement ait annoncé la vaccination obligatoire contre le COVID-19 pour tous le personnelsoignant. SAKIS MITROLIDIS, ARCHIVES AGENCE FRANCE PRESSE
Selon une information rapportée le 24 novembre par l’association Children's Health Defense dirigée par l'avocat Robert Francis Kennedy Jr, le Conseil d'État grec – la plus haute Cour administrative du pays – a statué sur le maintien de l’obligation de vaccination contre le Covid-19 du personnel soignant : il a déclaré la mesure inconstitutionnelle. Cette décision, qui sonne la fin de 15 mois de suspension sans salaire, fait écho à celle du ministère de la Santé allemand, qui ne devrait pas renouveler la mesure pour l'année 2023.
La décision du Conseil d'État : une atteinte aux droits fondamentaux trop longue et des données épidémiologiques insuffisantes
Le Conseil d’État hellénique est composé de sept juges : 6 d’entre eux ont voté en faveur de la réintégration des soignants suspendus demandée par l'Association nationale des employés des hôpitaux publics (un organisme syndical hospitalier grec) dans le cadre d’une action en justice intentée en leur nom. Pour l'institution, la prolongation du mandat vaccinal pour 2023 est devenue inconstitutionnelle. Si les juges estiment que la vaccination obligatoire de certaines catégories de travailleurs est constitutionnelle, cette mesure ne le reste tant qu'elle n'entre pas en contradiction avec le "principe de proportionnalité".
Cette Cour suprême grecque a reconnu que les mesures sanitaires mises en œuvre dans le cadre de la crise du Covid-19 constituent une atteinte grave aux droits fondamentaux suivants : la liberté d’épanouissement personnelle, la liberté de circulation et le droit au respect de la vie privée. En revanche, selon le Conseil d'Etat, ces mesures ne peuvent être constitutionnelles que si celles-ci restent appliquées dans un intervalle de temps nécessaire et demeurent proportionnelles à la menace que représente le risque sanitaire. Aussi, par sa nature temporaire, la sévérité et la durée de cette politique doit faire l'objet d'une réévaluation ponctuelle par les autorités compétentes sur la base des données épidémiologiques à disposition et des dernières découvertes scientifiques crédibles, juge-t-elle.
Dans le cas présent, la Cour a jugé que l’obligation vaccinale des soignants a non seulement dépassé le cadre de la durée raisonnable, mais également constaté que les autorités sanitaires n’avaient aucunement procédé à un réexamen du mandat de vaccination imposé au personnel de santé, alors que les données scientifiques disponibles à l’heure actuelle ne justifient pas sa prolongation.
Réactions des collectifs de soignants et du gouvernement suite à la décision du Conseil d'État
L'association nationale des employés des hôpitaux publics a salué le verdict des juges : « Le Conseil d'État s'est montré à la hauteur. Nous appelons le ministre de la Santé à prendre immédiatement un arrêté pour l'exécution de cette décision ».
Ce mardi 29 novembre, le ministre de la Santé Thanos Plevris a indiqué qu'il se plierait à contre-cœur à cette décision de justice : « Le jugement sera mis en œuvre, même si selon moi il s'agit d'une décision dangereuse pour la santé publique », a-t-il déclaré à Mega TV. Selon ce dernier, la décision prise il y a un an de mettre à l'écart 6 500 employés non-vaccinés devrait donc être annulée à partir du 1er janvier 2023, et peut-être avant.
De son côté, l’association des professionnels de santé pour la démocratie et les libertés (SYDE) - l'un des principaux collectifs qui coordonnent les actions des soignants grecs suspendus depuis septembre 2021 - a également salué cette décision, rappelant par ailleurs le lien entre cette décision de suspendre le personnel de santé non-vacciné et les tentatives gouvernementales de privatisation de l'hôpital public dans le cadre de sa politique de réduction des coûts. Lancé le 14 avril 2022, un projet du ministère grec de la Santé visait le recrutement de nouveaux professionnels de santé sous contrat à durée déterminée. Une procédure d'embauche dont l'objectif vraisemblable était de remplacer les employés suspendus, à laquelle la décision du Conseil d'État a mis fin.
L'association SYDE a tenu à déclarer dans un communiqué de presse, relayé le 25 novembre par Children's Health Defense, que le combat n’était pas terminé : un projet de loi s'inscrivant dans cette démarche de privatisation du système de santé public sera soumis au Parlement cette semaine.
« Nous continuerons à nous battre pour la démocratie, pour le dialogue, pour le droit à l'opposition de ne pas être "réprimé". Nous continuerons à défendre les idéaux que revêt notre discipline scientifique et la liberté […] Nous serons présents dans toutes les batailles pour la démocratie et la liberté. Nous appelons à l'exécution immédiate de la décision du Conseil d'État, à la réintégration immédiate de nos collègues dans leurs fonctions, au remboursement intégral immédiat des salaires injustement retenus. Ne touchez pas à nos vies, ne touchez pas au système national de santé ! »
S'agissant de la réintégration du personnel de santé suspendu en France, le Rassemblement national a déposé une proposition de loi qui pourrait être inscrite à l'ordre du jour de sa niche parlementaire le 12 janvier prochain.
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