Visée par deux plaintes pour ses critiques contre les masques, les vaccins anti-Covid et la gestion de la crise sanitaire, l’ex-députée LREM Martine Wonner, qui s’est démarquée ces deux dernières années par son combat pour les libertés face aux restrictions imposées par le gouvernement d’Emmanuel Macron, a comparu vendredi 4 novembre devant la chambre disciplinaire du conseil régional de l'Ordre des médecins, à Nancy. Alors qu’elle risque la radiation, plusieurs personnalités de poids ont manifesté leur soutien à la psychiatre alsacienne.
Motif des plaintes
La première plainte avait été déposée par le Conseil national de l’Ordre des médecins (CNOM), qui lui reproche ses déclarations tenues dans le documentaire Hold-up, diffusé en mai 2021. Pour rappel, la plainte de l’organisme contre le Pr Christian Perronne pour ses propos critiques de la gestion sanitaire, a été déboutée le 21 octobre par la chambre disciplinaire de première instance d’Île-de-France de l’Ordre des médecins : celle-ci a jugé qu’il avait, au regard de sa qualité d’infectiologue internationalement reconnu, « l'obligation de s’exprimer dans le domaine qui relève de sa compétence » durant la crise du Covid-19.
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La seconde plainte vient du sulfureux collectif « NoFakeMed », une association qui prétend alerter sur les dangers des fausses médecines, mais dont les prises de positions controversées au cours de l’épidémie de Covid-19, lui ont valu de vives critiques de la part d'experts scientifiques.
Lors de l’audience du 4 novembre, les plaignants ont fait valoir que Mme Wonner avait fait la promotion « d’informations erronées » et avait recommandé des « protocoles de soins » contre la Covid-19 « sans fondement scientifique », notamment l’ivermectine ou l’hydroxychloroquine. Ils ont estimé que l’immunité parlementaire ne s’appliquait pas pour l’ex-parlementaire en dehors de l’hémicycle, car « elle utilisait sa qualité de médecin pour exprimer ses opinions » : des « manquements au Code de la déontologie » médicale, selon eux. « Un médecin doit s’abstenir de diffuser des informations fausses de nature à inquiéter », a lancé Me Jean-François Segard, conseiller du collectif « NoFakeMed ».
Un débat juridique autour de l'immunité parlementaire
À la sortie de l’audition, l’avocat de Martine Wonner, Me Carlo Brusa, a salué « une juridiction qui était à l’écoute » et « la sérénité des débats ». Dans un discours devant un parterre de soutiens présents devant les locaux du conseil régional de l’ordre, il a rappelé que le CNOM et le collectif « No Fake Med » considèrent que Mme Wonner aurait commis des fautes déontologiques en sa qualité de médecin, bien qu’elle se soit exprimée en tant que parlementaire de la Nation. Durant l’audience, celui-ci avait en effet rappelé que la psychiatre n’exerçait plus d’activité médicale depuis son élection : « Mme Wonner n’a pas soigné ni travaillé avec une patientèle » lors de son mandat, de 2017 à 2022.
Selon l’avocat, la question de droit à trancher, sur laquelle il indique ne pas prendre position, est donc la suivante : « L’immunité parlementaire de l’article 26 de la Constitution protège-t-elle un député ou un sénateur dans l’enceinte de l’hémicycle mais aussi en dehors de l’enceinte ? La déontologie de l’activité privée de la personne peut-elle devenir un élément pour mesurer les agissements d’un député qui est aussi médecin dans sa vie personnelle ? » Et de poursuivre : « Cela veut dire tout simplement que pour n’importe quelle profession règlementée - que ce soit avocat, kiné, médecin - un élu de la République va devoir se poser la question en permanence : "Qu’est-ce que je peux faire dans le cadre de mon activité en dehors de l’enceinte parlementaire ?" ». Il conclut : « La décision qui sera rendue fera jurisprudence : c’est la lutte entre le pouvoir disciplinaire de la déontologie et la liberté d’expression de la députée Martine Wonner qui s’est jouée ce matin devant cette juridiction. »
« Ma vie privée de médecin n’avait rien à faire dans les débats ce matin, parce que tout ce qui m’a été reproché l’a été à la députée que j’ai été de 2017 à 2022 », a renchéri devant la foule Mme Wonner, à la suite du discours de son avocat. Et de préciser : « Quand on est élu, on est élu 24h sur 24h. Il n’y a pas de séparation possible ». « J’espère avoir réussi à leur expliquer que mon rôle de parlementaire était coûte que coûte de défendre mes citoyens : c’était un devoir que de parler au nom de toutes celles et ceux qui venaient me voir dans ma permanence parlementaire », a confié l’ancienne députée LREM du Bas-Rhin, qui s’est dite « sereine » lors de son audition.
Discours de sortie de Martine Wonner devant l'ordre des médecins !
Le conseil régional de l'ordre des médecins a mis sa décision en délibéré au 25 novembre. En cas de sanction, Martine Wonner prévient déjà qu'elle ferait appel.
Des soutiens de poids
Pour l’épauler dans le cadre de cette procédure disciplinaire, l'ex-députée a pu compter sur de multiples soutiens. Parmi eux, l’ancien candidat à l’élection présidentielle, Jean Lassalle, qui écrit dans un communiqué en date du 2 novembre : « J’ai quarante-cinq ans de politique derrière moi et je n’ai jamais vu cela : une telle chasse aux sorcières. Martine Wonner convoquée devant une juridiction ordinale, c’est incroyable et injuste. Si je m’exprime aujourd’hui, c’est pour témoigner et soutenir cette femme admirable. […] C’est une femme travailleuse et très intelligente. Elle s’est levée tellement de fois dans l’hémicycle pour défendre, par ses amendements, les petits, les défavorisés, les sans-abri, les précaires, envers et contre tous, mais surtout pour dénoncer les mensonges de la majorité. Elle a été un emblème de courage par son engagement sans faille et toutes les actions qu’elle a menées pour le peuple et avec le peuple, sans avoir peur, malgré les pressions exercées »...