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La France interpellée par l'ONU au sujet de violences policières reste muette - L'ONU fait un communiqué à ce sujet (France Soir)

par France Soir 16 Juin 2023, 19:25 Police Répression France ONU Violences Articles de Sam La Touch

L’ONU (Organisation des Nations Unies) avait donné 60 jours à la France pour répondre à une saisine, contre elle, pour usage immodéré de la force à l’encontre des manifestations qui ont eu lieu contre la réforme des retraites et l’usage de l’article 49.3.

Devant le sérieux des éléments de la saisine, l’ONU se laissait la possibilité d’exprimer publiquement ses préoccupations, estimant que l’opinion publique se doit d’être informée. Au 11 juin 2023, la France n’avait toujours pas apporté de réponse. L'ONU a donc fait un communiqué à ce sujet

Le 28 mars 2023, le Conseil des droits de l'Homme à l’ONU était saisi d’une plainte contre la France et ses représentants (Emmanuel Macron, Elisabeth Borne, Gerald Darmanin, le préfet de Paris Nunez) pour usage immodéré de la force à l’encontre des manifestations qui ont eu lieu contre la réforme des retraites et l’usage de l’article 49.3.

Cet usage immodéré de la force viole le droit de résistance à l’oppression (Article 2 de la Déclaration du droit de l’Homme et des citoyens) lequel s’exerce par le droit de manifester sans craindre pour sa sécurité. Ces démarches peuvent être effectuées par tout citoyen sur le site de l’ONU.  C'est le moyen employé par l'association BonSens.org pour déposer cette plainte.

Le 11 avril 2023, par suite de la saisine de BonSens.org, le rapporteur spécial sur la liberté d’assemblée et d’association a envoyé sa communication à la France. Elle avait 60 jours pour répondre. 

La France n’ayant pas répondu dans les 60 jours impartis, la communication de l’ONU est devenue publique depuis le 11 juin 2023. Dans son courrier à la France, consulté par France-Soir, l’ONU rappelle notamment que : 

“Nous exprimons également de sérieuses préoccupations quant aux allégations relatives à l’usage excessif de la force par les forces de l’ordre envers des manifestants pacifiques, ainsi que des journalistes et aux manquements aux obligations de protéger des manifestants et les journalistes au cours de manifestations, notamment de la part des membres de la brigade 'Brav-M'.  

Les allégations de l’usage disproportionné et inadapté par les forces de l’ordre de grenades lacrymogènes et de la méthode de désencerclement pendant les manifestations soulèvent de graves préoccupations, au regard du nombre de personnes touchées ou affectées par ce type d’armes et de méthode. Dans certains cas, les individus concernés sont de simples passants, journalistes, ou manifestants pacifiques.  

De même, nous sommes préoccupés par les allégations de traitements inhumains et dégradants, d’arrestations et de détentions arbitraires de plusieurs manifestants pacifiques. Nous sommes troublés par le fait que certaines des arrestations et détentions ne pourraient être liées qu’à l’exercice légitime du droit à la liberté d’expression et de réunion pacifique.  

Nous sommes également préoccupés par l’impact de ces pratiques policières sur la liberté de réunion pacifique, en particulier à la suite de la répression violente des manifestations d’une ampleur similaire lors du mouvement des 'gilets jaunes' en 2019. Par peur de brutalités policières ou d’être blessées, des personnes pourraient raisonnablement être dissuadées ou dissuader leurs proches de participer aux manifestations légitimes.  

Finalement, nous sommes vivement préoccupés quant à de nombreuses dispositions de la loi visant à renforcer et garantir le maintien de l'ordre public lors des manifestations. Malgré nos communications précédentes avec le Gouvernement de votre Excellence, ces dispositions n’ont toujours pas été revues pour les rendre conformes aux normes et standards internationaux en la matière.  

En relation avec les faits allégués ci-dessus, nous vous prions de bien vouloir vous référer à l’annexe ci-jointe qui énonce les textes relatifs aux instruments juridiques et autres standards établis en matière de droits de l'homme.  

Nous vous adressons cet appel afin de préserver les droits des personnes susmentionnées d’un préjudice irréparable et sans préjuger d’une éventuelle décision de justice.”  

L’ONU a posé sept questions précises aux autorités françaises quant aux événements, à la réponse apportée par les forces de l'ordre ainsi que les bases légales pour diverses actions. À ce jour, aucune réponse ne leur a été apportée ! Les questions sont reproduites dans leur intégralité ci-dessous : 

 

"1. Veuillez nous fournir toute information ou tout commentaire complémentaire en relation avec les allégations susmentionnées.  

2. Veuillez nous indiquer si des plaintes ont été déposées à la suite des allégations de traitements inhumains et dégradants et d’usage excessif de la force à l’occasion des manifestations susmentionnées, et préciser si les mesures policières prises sont compatibles avec vos obligations internationales. Si des plaintes ont été déposées, veuillez fournir toute information, et éventuellement tout résultat des enquêtes menées, examens médicaux, investigations judiciaires et autres mesures menées en relation avec ces faits, et en particulier quelles mesures ont été prises afin de protéger l’intégrité physique et morale des manifestants. Dans le cas où les auteurs de ces violations auraient pu être identifiés, veuillez fournir des informations sur les poursuites engagées, tels que les sanctions pénales, disciplinaires ou administratives.  

3. Veuillez fournir toute information sur les arrestations effectuées et les placements en détention, préciser les bases légales de ces arrestations et détentions et indiquer si ces personnes ont été informées des motifs justifiant leur privation de liberté. Veuillez indiquer comment ces mesures sont compatibles avec les normes internationales relatives au droit à la liberté de réunion pacifique et le droit à la liberté d’expression, notamment au regard des obligations internationales de la France, notamment des articles 9, 14, 19 et 21 du PIDCP.  

4. Veuillez indiquer quelles mesures ont été prises pour que les individus, la société civile, de même que les journalistes, puissent travailler dans un environnement favorable et mener leurs activités légitimes, notamment le droit de manifester pacifiquement et de couvrir des manifestations, sans crainte de harcèlement, de stigmatisation ou de criminalisation de toute sorte. 

5. Veuillez apporter des informations précises sur le protocole et/ou instructions suivis par les forces de sécurité pour le maintien de l’ordre et l’usage de la force au cours des manifestations et le cadre légal sur l’usage des armes dans le maintien de l’ordre dans tout le pays, et particulièrement pour les policiers de la 'Brav-M'. Quelles mesures ont été prises par les commandants des forces de l'ordre pour éviter et prévenir les dommages aux manifestants et à tous les acteurs impliqués, y compris les stratégies de négociation visant à désamorcer les tensions ?  

6. Quelles mesures ont été prises pour garantir que les forces de l'ordre, y compris les commandants, agissent de manière responsable et que les plaintes relatives à des violations des droits de l'homme dans le contexte des manifestations puissent faire l'objet d'une enquête et d'un traitement rapides ? Veuillez fournir des informations sur les moyens disponibles pour réparer les préjudices subis en raison de l'usage excessif de la force par les forces de l'ordre dans le contexte des manifestations.  

7. Veuillez indiquer les mesures prises ou que compte prendre le Gouvernement de votre Excellence pour répondre aux demandes légitimes des manifestants et ramener le calme dans le pays." 

La communication officielle de l’ONU se termine par une formule donnant lieu à penser que l'ONU pourrait exprimer publiquement ses préoccupations dans un avenir proche au travers d'un communiqué de presse afin que l'opinion publique soit informée :  

“Nous pourrions exprimer publiquement nos préoccupations dans un proche avenir car nous considérons que l’information reçue est suffisamment fiable pour signaler une question justifiant une attention immédiate. Nous estimons également que l’opinion publique se doit d’être informée des répercussions potentiellement occasionnées par les faits allégués. Le communiqué de presse indiquera que nous avons pris contact avec le Gouvernement de votre Excellence afin de clarifier le sujet en question. 

Ce 15 juin 2023, l'ONU a donc effectué une communication que nous reproduisons intégralement : 

especter et promouvoir le droit de réunion pacifique, déclarent des experts de l’ONU

GENÈVE (15 juin 2023) – Des experts* des Nations Unies ont exprimé leur inquiétude face aux allégations d’un usage excessif de la force lors des récentes manifestations contre la réforme des retraites et les projets de méga-bassines en France.

« Le manque de retenue dans l’usage de la force à l’encontre des membres de la société civile qui revendiquent de manière pacifique leur participation aux processus décisionnels concernant leur avenir, l’accès aux ressources naturelles, la protection des droits humains, la dignité et l’égalité, serait non seulement anti-démocratique, mais profondément inquiétant pour l’État de droit », ont déclaré les experts.

« Nous appelons les autorités à entreprendre un examen complet de leurs stratégies et pratiques en matière de maintien de l’ordre afin de permettre aux manifestants d’exprimer leurs préoccupations et à faciliter une résolution pacifique des conflits sociaux. Nous nous tenons à la disposition des autorités françaises pour fournir des recommandations nécessaires dans les domaines où des insuffisances auraient été constatées », ont ajouté les experts.

Ils ont réitéré leur appel** à la France à respecter ses obligations internationales afin de faciliter et protéger les manifestations pacifiques, ainsi qu’à promouvoir la liberté d’association, notamment en prenant les mesures nécessaires pour enquêter sur les violences commises au cours de ces manifestations et traduire leurs auteurs en justice.

Depuis le début de l’année, des milliers de personnes se sont mobilisées dans différentes villes française pour dénoncer la réforme des retraites proposée par le gouvernement, ainsi que les politiques de gestion de l’eau face à l’urgence climatique.

Les experts ont noté que des manifestants de tous âges et issus de divers mouvements sociaux, dont les mouvements syndicaux et écologistes, ont promu et adopté des méthodes pacifiques, en plus d’avoir clairement énoncé leurs revendications en amont des rassemblements.

« La police aurait dispersé les foules à l’aide de gaz lacrymogène et de grenades de désencerclement, munitions que la France est le seul pays européen à utiliser lors d’opérations de maintien de l’ordre », ont précisé les experts.

La répression des forces de l’ordre aurait fait des dizaines de blessés, dont des manifestants, des journalistes, des élus et des passants. À différentes occasions, dans la capitale, la brigade motorisée « Brav-M » aurait menacé et frappé des manifestants. À Sainte-Soline, la police aurait tiré au LBD (lanceur de balles de défense) 40 depuis des quads en mouvement et les secours auraient reçu l’interdiction d’intervenir pour secourir un blessé grave. Des personnes auraient été arrêtées arbitrairement dans plusieurs villes.

« Nous sommes conscients que des actes de violence isolés commis par certains manifestants ont blessé des membres des forces de l’ordre et endommagé des biens publics. Toutefois, tant le nombre de blessés enregistré que la gravité des violences rapportées sont alarmants », ont poursuivi les experts.

Des informations préoccupantes leur sont également parvenues concernant le recours à une rhétorique criminalisante des défenseurs des droits humains et de l’environnement de la part du gouvernement. Les experts s’inquiètent d’une tendance à la stigmatisation et à la criminalisation des personnes et organisations de la société civile œuvrant pour la défense des droits humains et de l’environnement qui semble s’accentuer et justifier un usage excessif, répété et amplifié de la force à leur encontre.

« Le droit de réunion pacifique est un droit fondamental qui forme le socle même des systèmes de gouvernance participative fondés sur la démocratie, les droits humains, l’État de droit et le pluralisme », ont rappelé les experts.

« Nous rappelons enfin à la France que toute stratégie de maintien de l’ordre doit respecter les principes de nécessité et de proportionnalité dans le seul but de faciliter les réunions pacifiques et de protéger les droits fondamentaux des personnes qui y participent, notamment leur droit à la vie, à leur intégrité physique et psychologique », ont dit les experts.

FIN

** Les experts avaient déjà fait part au gouvernement français de préoccupations similaires en 2019, lors des rassemblements de « gilets jaunes ».

*Les experts : Clément Nyaletsossi Voulé, Rapporteur spécial sur les droits à la liberté de réunion pacifique et d'association ; Pedro Arrojo-Agudo, Rapporteur spécial sur les droits de l’homme à l’eau potable et à l’assainissement ; David R. Boyd, Rapporteur spécial sur les droits de l’homme et de l’environnement ; Michael Fakhri, Rapporteur spécial sur le droit à l’alimentation ; Mary Lawlor, Rapporteuse spéciale sur les défenseurs des droits de l’homme ; Irene Khan, Rapporteuse spéciale sur la liberté d’opinion et d’expression, et Michel Forst, Rapporteur spécial sur la protection des défenseurs de l’environnement dans le cadre de la Convention d'Aarhus.

Contacté le 15 juin 2023, le président de la République, Emmanuel Macron, la première ministre, Elisabeth Borne, le porte-parole du gouvernement, Olivier Véran, n'étaient pas disponibles pour répondre. 


La France, patrie des droits de l’Homme, s’est mis à la faute quant au respect de ceci et est donc rappelée à l'ordre par l'ONU pour la seconde fois suite aux rassemblements des gilets jaunes. Une interrogation légitime se pose sur la considération qu’elle porte aux Institutions Internationales protectrices des Droits de l’Homme et les représentants qui œuvrent avec diligence pour le respect des droits fondamentaux. 

Article modifié ce 16 juin 2023 à 11h45 suite à la parution d'un communiqué de l'ONU au sujet de la saisine

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