Entre mémoire et justice sociale : en finir avec le colonialisme !
Elan interculturel, 10.05.24
Le 10 mai est l'occasion de commémorer, mais surtout de réfléchir aux profondes cicatrices, que cette injustice historique a laissées dans le tissu de notre société contemporaine. Cependant, notre devoir de mémoire ne peut pas se limiter à la passivité ; il nous invite plutôt à célébrer cette journée par des actions concrètes visant le changement et la construction d'une société plus juste pour toustes.
Il est essentiel de prendre conscience de la participation de notre pays à l'une des plus grandes tragédies de l'histoire de l'humanité et des violations des droits humains qui, pendant plus de 400 ans, a vu plus de 15 millions de personnes être victimes de la traite transatlantique des personnes reduites à l’esclavage. La France a organisé un total de plus de 4220 expéditions négrières, dont plus de 43% ont été lancées depuis le port de Nantes, en faisant ainsi le principal port français de la traite1. Immédiatement après le port de Nantes, on trouve Le Havre, La Rochelle, Bordeaux, Saint-Malo, Lorient, Honfleur, Marseille, Dunkerque et bien d'autres.
Néanmoins, la glorification des personnes qui ont promu et participé à cette tragédie imprègne encore aujourd'hui l'espace public. Nous marchons encore dans les rues où leurs noms ornent les places, les monuments, notamment les statues, qui les représentent toujours. L’une des manifestations les plus éclatantes de cette glorification est l’existence de la statue de Colbert, le créateur du Code Noir qui a légalisé et réglementé l'esclavage dans les colonies françaises.
Érigée devant l'Assemblée nationale à Paris, elle représente un outrage au cœur même de la démocratie, un affront à la douleur et à la souffrance infligées à des millions d'individus réduits en esclavage et à leurs descendant·e·s. Laisser cette statue souligne encore actuellement le refus de se confronter à notre passé colonial et l’absence d’une journée nationale en mémoire des victimes de la colonisation française en est la preuve.
Cette position se manifeste aussi lorsque le peuple rejette le racisme institutionnalisé, comme lors de la marche du 21 avril dernier à Paris « en mémoire de toustes les jeunes victimes de crimes policiers, judiciaires et carcéraux » et en solidarité avec la cause palestinienne, qui a été initialement interdite.
Le comble de l'ironie se manifeste quand la pensée coloniale s'arroge le droit de migrer afin de piller d’autres territoires et de faire assimiler leurs cultures, alors que les politiques migratoires européennes n'ont de cesse de fermer leurs frontières, à moins d’utiliser les migrant·e·s comme de la main d’oeuvre bon marché et d'entretenir les réseaux de traites et d’esclavagisme moderne.
La pensée coloniale perdure. Le racisme, la xénophobie et le sécuritarisme gagnent du terrain en Europe. La décolonisation nous oblige à affronter ces inégalités et à travailler au démantèlement des systèmes d'oppression existants.
« D’où que l’on vienne, où que l’on soit né·e, notre pays existe. Il s’appelle Solidarité.2 »
Signature : Élan Interculturel
Élan Interculturel est une association agréée depuis 2008 qui favorise le dialogue entre les cultures et une meilleure compréhension des un·es et des autres, tout en approfondissant la connaissance de sa propre identité. À travers ses différents projets, l'association s'engage à valoriser la diversité culturelle et l'enrichissement résultant de l'échange culturel. L'association offre la possibilité de participer à des ateliers gratuits de pédagogie non formelle et éducation populaire pour un apprentissage collaboratif et ludique qui se concentrent sur divers sujets tels que la migration, la décolonisation, le genre et la sexualité, le bien être et plus encore. Actuellement elle est engagé sur le projet Reverse the Map, en partenariat avec les associations CKB en Guadeloupe et Grupa Studnia O. en Pologne, qui souligne l'importance d'un débat sur les questions de colonisation et de décolonisation, en particulier dans un contexte éducatif en rendant le thème accessible aux enfants et aux enseignant.e.s, en utilisant des outils pédagogiques décoloniaux pour aborder le débat actuel sur la migration.
1 Nantes, la traite atlantique et l'esclavage. Extrait du Mémorial de l'abolition de l'esclavage: https://memorial.nantes.fr/nantes-la-traite-atlantique-et-l-esclavage/
2 Extrait de l’appel de la campagne « Antiracisme et Solidarité ».