Un marché faustien avec le pouvoir des entreprises : de Monsanto à Bayer, le pire des deux mondes
Article originel :A Faustian Bargain with Corporate Power: From Monsanto to Bayer, the Worst of Both Worlds
Par Colin Todhunter
Off Guardian, 11.10.24
La militante écologiste et militante Rosemary Masona sans cesse dénoncé les effets insidieux des produits agrochimiques sur la santé humaine et l’environnement au cours d’une série de rapports incisifs qui ont duré une décennie. Bon nombre de ces rapports ont pris la forme de lettres ouvertes et poignantes adressées aux sociétés, aux organismes de réglementation et aux fonctionnaires du Royaume-Uni et de l’UE.
Mason n’a jamais été réticente dans ses condamnations des géants de l’agrochimie. Après l’acquisition de Monsanto par Bayer en 2018, elle s’est focalisée sur Bayer, examinant son histoire troublante et ses actions, notamment au cours d’un des chapitres les plus sombres de l’humanité : l’Allemagne nazie.
La complicité de Bayer dans le cadre d’IG Farben, un conglomérat chimique et pharmaceutique notoire pour son implication dans des crimes de guerre, est bien documentée. La société est née en 1925 de la fusion de six entreprises chimiques : Agfa, BASF, Bayer, Chemische Fabrik Griesheim-Elektron, Hoechst et Weiler-ter-Meer.
Bayer n’était pas un simple observateur, mais un participant actif à des expériences médicales odieuses menées sur les détenus des camps de concentration. Ces expériences ont consisté à tester des médicaments sur des sujets non disposés, y compris ceux d’Auschwitz, où les prisonniers étaient délibérément infectés par des maladies pour évaluer les produits pharmaceutiques de Bayer.
Pendant la Première Guerre mondiale, Bayer a participé au développement d’armes chimiques, notamment du chlore et du gaz moutarde. En tant que membre de l’IG Farben, Bayer a contribué plus tard à la création d’agents neurotoxiques tels que le Tabun, le Sarin et le Soman. Après la guerre, Bayer a transformé ces développements chimiques en pesticides comme le parathion, qui sont neurotoxiques.
En outre, IG Farben a été impliquée dans la production de Zyklon B, le gaz utilisé dans les camps de concentration. Des cadres de IG Farben ont été condamnés pour leur rôle dans les crimes de guerre lors du procès de Nuremberg
La direction de Bayer était pleinement consciente de ces atrocités, mais a choisi le profit plutôt que l’éthique, profitant du travail forcé des détenus des camps de concentration pour produire des produits chimiques essentiels à la machine de guerre nazie.
Les conséquences de la Seconde Guerre mondiale ont vu Bayer et d’autres sociétés IG Farben faire face à des répercussions minimales pour leurs actions. Certains cadres ont été jugés, mais ils ont reçu des peines légères ou ont été libérés prématurément, ce qui leur a permis de reprendre des positions de pouvoir au sein de leurs entreprises.
Pour Bayer, la fin de la guerre n’a pas été la seule étape. Le site Web de Powerbase fournit une liste très longue des actes répréhensibles commis par Bayer depuis 1945, y compris les allégations d’intimidation par les entreprises, de pratiques monopolistiques, de suppression de l’information scientifique, de corruption, d’empoisonnements, de publicité mensongère et d’abus sur les travailleurs.
Plus récemment, Bayer a hérité d’un héritage de tromperie par l’acquisition de Monsanto. Les deux entreprises ont été accusées de dissimuler les risques pour la santé associés au glyphosate, l’ingrédient actif du Roundup et l’herbicide agricole le plus utilisé dans le monde. Les documents internes révèlent un effort concerté pour minimiser la cancérogénicité du glyphosate tout en ignorant des preuves substantielles indiquant ses dangers pour la santé humaine.
Dans ses nombreux rapports, Mme Mason a montré comment Bayer a façonné les processus réglementaires pour obtenir des approbations de produits, influençant les études scientifiques et les décisions réglementaires tout en supprimant les preuves contraires. La dévastation environnementale causée par les pesticides de Bayer est alarmante : Mason cite des déclins importants dans la biodiversité et des écosystèmes empoisonnés comme conséquences directes de leur utilisation généralisée.