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[Vidéos choquantes] Ahed Tamimi. Dans l'obscurité, sans témoins ni caméras (American Herald Tribune)

par Miko Peled 28 Décembre 2017, 17:47 Ahed Tamimi Arrestation Israël Violences Représailles Armée israélienne Colonialisme Apartheid Palestiniens Articles de Sam La Touch

Dans l'obscurité, sans témoins ni caméras
Article originel : In the Dark, without Witnesses and Cameras
Par Miko Peled*
American Herald Tribune

Traduction SLT

Les Israéliens sont habitués aux images de Palestiniens en sang après qu'ils se soient fait tirer dessus.

Ahed Tamimi, 16 ans, au tribunal militaire israélien. Crédit image : Tali Shapiro/ Twitter

Ahed Tamimi, 16 ans, au tribunal militaire israélien. Crédit image : Tali Shapiro/ Twitter

"Dans le cas des filles, la sanction survient à un autre moment, dans le noir, sans témoins ni caméras." a écrit le journaliste israélien Ben Caspit au sujet d'Ahed Tamimi qui a donné des coups de pied et giflé un officier de l'armée israélienne qui a pénétré dans sa maison. Dans son article, il félicite l'officier qui n'a pas réagi à la gifle et aux coups de pied et il continue à dire que la famille Tamimi doit apprendre de manière sévère que les combattants des Forces de défense israéliennes leur feront payer cher. "Les forces de défense israéliennes ont des capacités créatives" affirme Caspit, des capacités avec lesquelles elles peuvent imposer une sanction de manière à ne pas nuire à son image.

En lisant la presse israélienne, on se souvient de l'histoire où un Djinn maléfique est entré dans une ville un jour et a déversé une drogue dans tous les puits de cette ville. La drogue rendait fou tous ceux qui buvaient l'eau des puits et il ne fallut pas longtemps avant que tous les habitants de la ville ne deviennent fous. Mais le roi qui résidait aussi dans la ville avait son propre puits d'eau sur le terrain de son palais et son eau restait pure. Un jour, en se promenant dans la ville, les citoyens regardèrent le roi et s'exclamèrent : "Regardez le roi est fou, nous devons l'arrêter !" Quand le roi entendit cela, il réalisa le mal que le Djinn avait fait, il se précipita au puits le plus proche et but de l'eau de la ville.

Les médias israéliens sont un monde de fantaisie. Mais ce n'est pas une jolie fantaisie, c'en est une effrayante où le traitement israélien des Palestiniens est qualifié de "retenu". Au cours de l'été 2015, dans une vidéo qui est devenue virale, nous avons vu comment un soldat israélien armé d'un fusil d'assaut semi-automatique et portant un masque de ski poursuivait un jeune garçon palestinien avec un bras brisé sur le flanc d'une colline rocheuse. Cela a eu lieu dans le village palestinien de Nabi Saleh en Cisjordanie. Le soldat réussit à rattraper le garçon, l'étouffa, le souleva et le jeta sur un rocher, puis il essaya de plier ou peut-être de casser l'autre bras du garçon. Finalement, la sœur du garçon, Ahed Tamimi, sa mère et d'autres femmes du village sont venues en aide au garçon et, après une longue lutte, ont réussi à sauver le garçon de la main du soldat. Ils ont également réussi à enlever le masque de ski et à exposer le visage du soldat. S'il y a une chose qui est claire, c'est que le comportement du soldat était tout sauf retenu. Au bout du compte, un autre soldat se pointe, frappe une des femmes et sauve le combattant, puis, par pure vengeance, le soldat sort une grenade à gaz lacrymogène et la lance contre le garçon et le groupe qui l'a secouru. Dans une interview à la presse israélienne, le père du soldat a déclaré qu'il était fier de la retenue de son fils.

 

Comme tout dans la vie, c'est une question de relativité. Les Israéliens ont l'habitude de voir leurs ennemis payer un lourd tribut lorsqu'ils osent relever la tête. Il s'est juste avéré qu'une fois de plus, dans le village de Nabi Saleh, dans une affaire impliquant la famille Tamimi et impliquant un officier cette fois-ci, l'armée israélienne a fait preuve de "retenue", ce qui a été en grande partie désapprouvé. Les Israéliens sont habitués aux images de jeunes Palestiniens en sang après s'être fait tirer dessus près d'un point de contrôle, tandis que les soldats israéliens et parfois les colons se tiennent debout en les regardant mourir lentement et ne bougent pas. Exécutés efficacement parce que, comme l'a déclaré le Dr Ahmad Tibi lors d'un discours à la Knesset, ils étaient soupçonnés de porter des ciseaux ou un petit couteau, ou quelque chose qui ressemble à un petit couteau. La société israélienne est habituée à ce que ce soit la norme. Mais dans le cas d'Ahed Tamimi, l'armée, la presse et les politiciens sont en colère - parce que cette situation est anormale.

Dans son article, Ben Caspit reprend une affirmation répétée dans tous les médias israéliens, à savoir que chaque Israélien a ressenti de la douleur lorsque l'officier a été giflé par la jeune fille et n'a rien fait. Ben Caspit déclare que cet officier a fait la bonne chose mais que dans un autre endroit et une autre fois, Israël doit exiger que les "filles Tamimi", comme il les appelle, en paye le prix. Un autre journaliste israélien, Israel Eldad, un journaliste chevronné, aborde un autre point très sensible. Il dit espérer que l'accusation agira de manière décisive et exigera une longue peine d'emprisonnement pour Ahed Tamimi, et qu'elle passera de longues années en prison. Il explique que cela apprendra aux Arabes que la terre appartient à Israël et qu'ils ne peuvent pas simplement nous frapper et s'en tirer. Que ce genre de "comportement chevaleresque" manifesté par l'officier, aurait pu être approprié il y a longtemps, mais pas dans ce cas-ci. Il s'agit ici de faire en sorte que les Arabes sachent qu'il ne fait aucun doute que nous avons un droit sur cette terre, y compris la maison d'Ahed Tamimi, d'où elle a expulsé les officiers.

Il y a tellement de niveaux de lecture de cette histoire qu'on peut écrire des pages et des pages et cela n'en finira jamais. Une jeune fille giflant un homme qui a envahi sa maison, son espace et même si ce n'est pas le cas ici, mais beaucoup, beaucoup de fois son intimité. Les incursions nocturnes de l'armée israélienne dans des maisons civiles, lorsque les gens dorment dans leurs lits, sont très fréquentes et Ahed a vécu cela d'innombrables fois. Ensuite, l'image d'une jeune fille arabe giflant un Israélien, d'une femme giflant un homme, et alors que les images de Palestiniens morts, même des enfants, ne suscitent pas un tel tollé public, a suscité des réactions gutturales. Soit dit en passant, aucune réaction de ce genre n'a été observée lorsqu'une semaine avant l'affaire Ahed, son cousin Mohammad Tamimi, âgé de 15 ans, a reçu une balle dans la tête. "Nous avions perdu espoir", m'a dit son père Bilal, mais par la grâce de Dieu, après six heures de chirurgie, les médecins ont fini par lui retirer la balle de la tête et Mohammad est en train de se rétablir à la maison.

Pour ajouter à l'affirmation selon laquelle les Israéliens sont retenus dans leurs réactions, Oren Hazan, membre de la Knesset - qui a été accusé de divers chefs d'accusation, allant de sévices sexuels infligés aux femmes qui travaillent avec lui jusqu'aux agressions violentes et même à une conduite imprudente sur la route - s'est récemment embarqué à bord d'un bus avec des familles de prisonniers palestiniens. L'autobus se rendait à une prison militaire lorsque Hazan est monté à bord et a commencé à insulter les familles. Si quelqu'un faisait preuve de retenue, c'était bien les familles. Et lorsque nous regardons les réactions palestiniennes à l'oppression, à l'intimidation et aux abus israéliens depuis plus de sept décennies, il est clair que les Palestiniens sont ceux qui sont dans la retenue. Israël n'a pas besoin de faire preuve de retenue parce qu'ayant le soutien des États-Unis, des gouvernements européens et même de certains gouvernements arabes et musulmans, ce pays est capable de s'en tirer sans crainte suite à ses meurtres.

* Miko Peled est écrivain et militant des droits de l'homme. Il est conférencier international et l'auteur de The General’s Son, Journey of an Israeli in Palestine”.("Le Fils du Général, Voyage d'un Israélien en Palestine").

Pour réserver Miko Peled pour une conférence, rendez-vous sur son site web.

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