Les Etats-Unis réfléchissent aux forces en mouvement en provenance d'Allemagne : Une partie d'un processus plus large (Strategic CUlture)

Les Etats-Unis réfléchissent aux forces en mouvement en provenance d'Allemagne : Une partie d'un processus plus large
Article originel : US Mulls Moving Forces from Germany: Part of a Wider Process
Par Alex Gorka
Strategic Culture

Le ministère étatsunien de la défense étudie la possibilité de retirer ou de transférer les forces étatsuniennes de l'Allemagne vers la Pologne. Le Washington Post (WP) a indiqué que les coûts et les implications sont en cours d'analyse. Le 5 juillet, la Maison-Blanche a déclaré qu'elle n'avait pas de tels plans, mais il n'y a pas de fumée sans feu, sinon pourquoi la Pologne devrait-elle offrir de payer 2 milliards de dollars pour une base étatsunienne sur son sol et le faire maintenant ? L'US Air Force a commencé à piloter des drones Reaper MQ-9 non armés à partir de la base aérienne de Miroslawiec, en Pologne, en mai.

Photo Juan R. Meléndez Jr.; 5.08.2008

"Mes déclarations sur le fait que l'OTAN est obsolète et disproportionnellement trop chère (et injuste) pour les États-Unis reçoivent maintenant, enfin, des applaudissements", a tweeté Trump au cours de sa campagne présidentielle de 2016. Il a souvent exprimé sa frustration devant le fait que les alliés n'ont pas respecté le niveau de dépenses de défense de 2 % du PIB convenu à l'unanimité. Le rapport du WP indique que le président Donald Trump aurait réfléchi à l'idée d'un retrait total ou partiel de l'Allemagne au début de 2017.

Le président s'est récemment montré très critique à l'égard du chancelier allemand. Il est frustré par sa position sur toute une série de questions, y compris la contribution à la défense collective de l'OTAN.

Des dépenses militaires plus élevées sont impopulaires auprès des électeurs allemands. La récente rencontre entre le conseiller à la sécurité nationale John Bolton et la ministre allemande de la défense Ursula von der Leyen a été très décevante pour les Etats-Unis, car il a été clairement indiqué qu'aucune augmentation substantielle des dépenses de défense allemande n'est en vue. Les projections budgétaires allemandes prévoyaient de l'augmenter à 1,5 % du PIB du pays seulement d'ici 2024. En fait, l'Allemagne refuse de respecter l'engagement de l'OTAN de dépenser au moins 2 % de son budget militaire.

Economisez de l'argent ? L'Allemagne paie une part équitable des coûts liés au stationnement des troupes étatsuniennes et les bases sont utilisées par les Etatsuniens pour des opérations menées en dehors de l'Europe. Par exemple, le commandement étatsunien pour l'Afrique (AFRICOM) a son siège à Stuttgart, en Allemagne. Donner une impulsion à l'industrie de la défense étatsunienne ? À peine, l'Europe dispose d'un puissant complexe militaro-industriel qui lui est propre.

Et l'idée de déplacer les forces vient au moment où l'Europe est au bord de la rupture. L'Occident n'a jamais été aussi divisé depuis la Seconde Guerre mondiale. Le paysage politique et militaire européen est en train d'être remodelé. C'est le bon moment pour tirer parti des faiblesses de l'Europe. La dépendance à l'égard des États-Unis en matière de sécurité peut être utilisée comme levier pour forcer des concessions dans d'autres domaines, comme le commerce.

Faire partie d'un Occident uni n'est pas le but recherché par le président Trump. En tant qu'isolationniste, il croit en l'indépendance et la façon d'y parvenir est de promouvoir les intérêts de l'État national, et non d'un groupe de pays unis dans une alliance. La souveraineté nationale étatsunienne est réalisable grâce à l'éclatement d'un Occident unifié pour en faire une nouvelle alliance dirigée par le gouvernement des États-Unis au lieu d'un organisme supranational où les Etats-Unis jouiraient d'une position forte, mais pas d'un contrôle absolu. Le président Trump veut que l'Europe soit économiquement dépendante des Etats-Unis, tandis que les États-Unis mèneraient leur propre barque sans aucune obligation internationale.

Les États-Unis n'ont pas besoin d'une Europe forte capable de la contester. Le Brexit, les migrants, les réformes judiciaires polonaises controversées et une série d'autres problèmes qui divisent le Vieux Continent pour le rendre plus faible répondent aux intérêts des Etats-Unis. Le président Trump a offert au président Macron ce qu'il pensait être un meilleur accord commercial si la France quittait l'UE. C'est pourquoi l'Allemagne, la locomotive économique de l'Europe, est constamment sous pression, qu'il s'agisse du projet gazier Nord Stream-2 avec la Russie ou de sa réticence à mettre fin au commerce avec l'Iran. Si l'Allemagne relève le défi, elle devra assumer la responsabilité de sa propre sécurité ainsi que celle de ceux qui resteront fidèles à l'idée de l'intégration européenne. Avant le prochain sommet de l'OTAN, la chancelière s'est prononcée en faveur de l'initiative du président Macron visant à créer une force expéditionnaire européenne. C'est un premier pas dans la bonne direction.

L'Europe devra alors reconsidérer ses relations avec la Russie. Il faudra l'intégrer dans un projet européen de sécurité. Frank-Walter Steinmeier, l'actuel président allemand, a lancé une initiative européenne de maîtrise des armements en 2016 alors qu'il était ministre des affaires étrangères. Il a proposé de mettre de côté les divergences et de s'atteler à la réalisation d'un nouveau traité de sécurité pour faire de l'Europe un endroit plus sûr. Sans les États-Unis, un nouvel accord devient tout à fait possible. Ensuite, l'Organisation du Traité de sécurité collective (OTSC) dirigée par la Russie et le groupe d'États européens dirigé par l'Allemagne pourraient lancer un projet commun pour repousser ensemble la menace terroriste. La Grande-Bretagne pourrait devenir membre de la nouvelle initiative européenne d'intervention (EII). Après tout, la Russie et l'UE ont l'expérience des opérations conjointes de maintien de la paix au Tchad et des patrouilles navales pour combattre les pirates somaliens dans l'océan Indien.
 

Se séparer n'est pas toujours une mauvaise chose. Les États-Unis se débarrasseront des resquilleurs. Les Européens seront assez souverains pour décider combien ils doivent dépenser pour la défense et d'autres choses. Ils auront l'occasion de s'attaquer aux menaces réelles qui pèsent sur leur sécurité, comme le problème des migrants, et non celles sur lesquelles Washington leur dit de se concentrer. La Russie n'aura pas besoin d'être un épouvantail maintenant ensemble l'"unité occidentale" menacé d'éclatement. Une alliance européenne dirigée par l'Allemagne et la Russie pourrait lancer une nouvelle détente. Il n'y aura pas de perdants et tout le monde gagnera. La seule chose qui est certaine, c'est qu'un nouveau modèle de sécurité est en train d'émerger dans le monde et que le processus est imparable.

Traduction SLT