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Bande dessinée, « Les Chroniques de Lomé » capturent la mémoire du Togo Par Julien Le Gros Mondafrique
A travers de multiples anecdotes et épisodes historiques, « Les Chroniques de Lomé » du scénariste togolais Koffivi Assem, retracent le passé tumultueux et méconnu de ce pays depuis sa première colonisation par l'Allemagne.
L'idée des « Chroniques de Lomé », est partie de l'initiative du portail « Afri BD », une émanation de l'association culturelle « Africultures ». Son coordinateur, Alain Brézault lance alors des projets de bande dessinée dans plusieurs pays africains: comme « Congo 50 » au Congo Brazzaville, ou « Il était une fois » à l'Ile Maurice. « Un troisième volet devait s’ouvrir au Mali explique le scénariste des « Chroniques », Koffivi Assem. Mais à cause des troubles dans ce pays, c’est le Togo qui a été choisi. »
Le Togo, d'hier à aujourd'hui
Rien de tel pour se faire remarquer qu'un projet novateur. En une cinquantaine de pages, « Les Chroniques de Lomé » résument l’histoire douloureuse d'un pays, d'abord colonisé par les allemands puis divisé entre la France et la Grande-Bretagne, avant d'aboutir à une indépendance sujette à caution. « Le Togo n'existait pas en tant qu'entité avant la colonisation. On commence avec la colonisation allemande jusqu'aux événements des années 2000. » résume Koffivi Assem « On montre le Togo sous toutes ses coutures : sociale, symbolique et politique. On devine en substance, car le format est court, que le colon blanc n'a pas fait de cadeau aux « indigènes ». La bande dessinée opère une ellipse entre cette période coloniale et l'Indépendance en 1960 à l'époque du président Sylvanus Olympio, assassiné trois ans plus tard lors d’un coup d'état. « On voit comment les gens ont accueilli l'Indépendance. On montre l’histoire à travers des anecdotes et des traits caractéristiques de Lomé: les femmes vendeuses de pagne qui pendant très longtemps ont été une vitrine pour le pays, la construction du chemin de fer au XIXème siècle etc.
Lors du discours de la Baule en 1990, François Mitterrand a demandé aux chefs d'état africains de mettre en place le multipartisme. Ça a été mal reçu par ces dictateurs, dont le nôtre. Progressivement, les partis ont été tolérés. Le pouvoir était censé changer. Ça n'a pas été le cas. En 1992, il y a eu pas mal de troubles. Les étudiants ont revendiqué des droits, réveillé la population, organisé des marches pour réclamer la démission de notre ancien dictateur Etienne Eyadema. Ça s'est appelé la grève générale limitée. » Cet épisode nous est conté à travers l’histoire d'un enfant qui ramasse de la ferraille. «Cela permet d'avoir un regard innocent sur ces faits. Quand on brûle un véhicule de police, ce que voit l'enfant c'est qu'il y a de la ferraille à ramasser! »
La suite, qui ne figure hélas pas dans cette bande dessinée, c'est la mort du dictateur en 2005 et les troubles qui ont causé des centaines de morts, menant son fils et actuel président, Faure Gnassingbé, au pouvoir. Autre épisode important, narré dans ces bulles : le choc qu'a causé l'attentat contre l'équipe nationale des Éperviers du Togo, dans l'enclave du Cabinda en Angola, pendant la Coupe d'Afrique des Nations en 2010.
Oeuvre pédagogique
Pour réaliser ces bulles, des partenariats ont été nécessaires: « L'Organisation internationale de la francophonie a participé à la conception. Pour l'impression, l'Institut français nous a fait un prêt achat pour lancer le projet. Le Goethe Institut nous a aidé à promouvoir l'exposition en exposant des planches originales. » Par ailleurs, dans un pays où la majorité de la population à un niveau de vie modeste, Ago a décidé de rendre sa BD abordable avec un prix de 4000 francs CFA, l'équivalent de 7 euros. « Ce n'est pas qu'une distraction. C'est un support pédagogique. Les enfants méconnaissent leur Histoire. Quand ils voient des ruines de pont, de quai, ils ne savent pas à quoi ça correspond. On leur raconte qu'avant il y avait le chemin de fer. »
En France, les « Chroniques de Lomé » sont disponibles à la librairie de l'Harmattan, librairie Galerie du Congo et l'Alliance des éditeurs indépendants.