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Alors que l'ex-chef de la diplomatie française, Bernard Kouchner, nie toute participation directe de l'armée française dans le génocide au Rwanda, il met en cause, tout de même, celle-ci sur la chaîne RTL.be et s'interroge à demi-mot sur sa complicité "illicite ou implicite" dans le génocide.
A 10'08''
"Est-ce que les troupes françaises ont elles mêmes assassinées à la main quelques Tutsis, je ne le crois pas du tout mais que tout ait été préparé soit avec leur consentement, illicite implicite j'en sais rien, c’est sûr."
Bernard Kouchner sait de quoi il parle puisqu'à l'époque, il fut envoyé par François Mitterrand au Rwanda pour préparer l'arrivée de l'opération turquoise en plein génocide. M. Kouchner avait pris alors l’engagement, au nom de la France, de déployer un fort contingent de soldats « pour protéger les gens contre les tueries ». L'ancien responsable de la MINUAR, le lieutenant-général Roméo Dallaire s'en souvient. : « J’ai refusé ce concept. Si la France voulait apporter son aide, elle n’avait qu’à renforcer la mission de paix des Nations unies, en nous donnant enfin les ressources nécessaires pour agir ».
Il ajoutera : "que les forces envoyées par la France avaient des équipements offensifs et non humanitaires : « C’était une force exceptionnellement puissante, avec des avions chasseurs Jaguar, des mortiers lourds, des troupes d’élite, entraînées pour se battre. Elle n’avait pas de camions, d’hélicoptères ou d’autres équipements utiles au travail humanitaire ".
Dans ses mémoires, – J’ai serré la main du diable : La faillite de l’humanité au Rwanda, Roméo Dallaire revient sur cet épisode de mai 1994 où Kouchner avait été envoyé au Rwanda par Mitterrand, pour selon lui adoucir l'image du régime intérimaire qui dirigeait le pays pendant le génocide : « A la tête de sa pléthore de journalistes » cherchant à sauver l’image du gouvernement français, allié du régime intérimaire, il déclare « Je n’aimais déjà pas l’idée de faire sortir du pays des enfants rwandais, mais se servir de ce geste pour montrer une meilleure image des extrémistes me donnait la nausée », écrira-t-il.
Lire :Concordances humanitaires et génocidaires. Bernard Kouchner au Rwanda
Wikipedia : Kouchner au Rwanda
" En mai 1994, un mois après le début du génocide au Rwanda, alors que Kouchner n'est plus ministre, il se rend au Rwanda avec Renaud Girard, alors grand reporter au Figaro dans le but d'évacuer des orphelins tutsis retenus à l'hôtel des mille-collines de Kigali89. Sur place, le général Dallaire, commandant de la force de l'ONU, la Minuar qui contrôle l'hôtel des mille-collines, est hostile à ce projet « d'exporter des enfants rwandais… pour que quelques Français bien-pensants se sentent un peu moins coupables du génocide89. » . Kouchner obtient cependant l'accord de toutes les parties le 16 mai, mais rentre à Paris le 18 mai avant la réalisation du projet. L'évacuation commence le 4 juin89.
À cette époque, dans une déclaration au journal Le Monde du 20 mai, Kouchner reste solidaire de la politique française au Rwanda :
« Dans toutes les politiques africaines, il y a des zones d'ombre […] mais il ne faut pas exagérer : au Rwanda, la France n'a pas soutenu que ceux qui sont devenus des assassins. Elle a respecté ses accords de gouvernement, mais elle a aussi soutenu les accords d'Arusha qui ouvraient la voie à une réconciliation nationale89. »
Kouchner effectue deux autres voyages au Rwanda, à la mi-juin et fin juillet. Lors du voyage de mi-juin, il discute avec le leader tutsi Paul Kagame d'une possible intervention française (l'Opération Turquoise). C'est en tant que député européen qu'il effectue le voyage de juillet alors que Kagame est devenu le vice-président du nouveau gouvernement rwandais90. Dans son livre polémique Le monde selon K. paru en 2009, Pierre Péan a défendu l'idée que Kouchner radicalise alors son discours, devenant un militant de la cause tutsie, dénonçant à la fois la responsabilité exclusive des Hutus et le rôle néfaste de la France91."