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Le massacre du Beach de Brazzaville 1999, le crime contre l’humanité des milices Sassou : 15 ans déjà ! Publié le 25/05/2014 par minguabiango « Lorsque les coups de feu ont brisé le silence de la nuit, j’étais encore naïvement persuadé qu’ils tiraient en l’air. Je n’avais pas vraiment entendu des cris d’agonie, car les tireurs ne laissaient pas de chance à leurs victimes. Ils ne tiraient pas par rafales, mais au coup par coup. Je me suis rendu compte de mon imminente exécution [que] quand mon proche voisin s’est écroulé sur moi atteint de deux ou trois balles. Je n’avais pas encore fini de me rendre compte de la mort de mon voisin que je me trouvais moi-même plaqué à terre, touché à mon tour à la tête. J’ai dû certainement perdre connaissance car je n’ai pas senti l’impact de la balle qui m’avait transpercé le bras et dont je ne me rendrai compte que plus tard. Lorsque j’ai cru retrouver mes esprits, je me suis posé une question plutôt étrange dans pareille occasion : « Pourquoi ai-je donc changé de position ? Il y a quelques instants j’étais assis, pourquoi donc suis je dans cette position si ridicule : le nez dans la poussière ? ». Il m’avait fallu quelques instants pour réaliser que l’on m’avait tiré dessus et que j’étais encore vivant». Extrait de déposition d’un rescapé du Beach de Brazzaville (mai 1999), à l’instruction du TGI de Meaux, France. Ces témoignages des rescapés, en s’attardant sur l’histoire d’une dévastation plus ou moins niée par ses auteurs du régime toujours en place, font plonger au cœur d’événements qui, quinze (15) ans plus tard, contribuent entre autres à justifier la création d’un état Sud Congo Ramener les morts à la vie de par l’évocation du souvenir de leur passage sur terre, tel est le devoir des vivants pour les morts. A l’occasion de la 15ème année du souvenir, revenir sur le crime de génocide du Beach pour un devoir de mémoire, est d’autant plus nécessaire que l’histoire de ce massacre de masse rencontre l’actualité internationale de la 20 ème commémoration du génocide tutsi du Rwanda. Avril 1999, cela fait dix huit (18) mois que les milices Sassou assistées de troupes armées et de mercenaires étrangers ont reconquit le pouvoir à Brazzaville à l’issue d’une guerre conduite jusque dans les régions sud du Congo pour contraindre ces populations par la terreur. Durant quatre (4) mois, d’avril à Juillet 1999, les milices Sassou se livrent à un massacre de masse d’une cruauté inouïe de centaines d’exilés rapatriés, tombés dans un véritable guet-apens au Beach de Brazzaville. Les rafles feront au moins 353 victimes, toutes, sélectionnées pour leur appartenance ethnique Kongo : Un crime de génocide et contre l’humanité. Le caractère imprescriptible de cette qualification (validée par le pôle criminel du TGI de Paris, ayant compétences concurrentes pour les crimes contre l’humanité) et la reconnaissance des faits par le conseil des droits de l’homme des Nations Unies, offrent l’espoir aux victimes que vérité et justice soient établies, en même temps que soient sortis de l’impunité “légale“ les auteurs, jusqu’ici arrogants, qui voient par là l’octroie d’un permis de toujours tuer et d’instaurer une société où la seule loi est leur arbitraire. Le massacre du Beach est parvenu à l’opinion par bribes, comme une rumeur. Sa violence fut d’une telle puissance de destruction si massive qu’il y eut d’abord les saillies négationnistes de ses auteurs. S’ensuivit, devant l’évidence des disparitions constatées, les inepties révisionnistes groupusculaires des affidés du régime. Nul n’a jamais su précisément ce qui était mis en doute, nié ou discuté, entre le fait criminel, le nombre de victimes ou son exécution méthodique concertée et planifiée. En tout état de cause, l’exécution du massacre pendant quatre (4) mois durant, l’effacement minutieux de toutes traces par la disparition de cadavres (incinérés ou jetés au fleuve Congo) et pour comble l’ordonnancement juridique de modiques réparations financières au profits des familles de victimes, ne laissent aucun doute sur le caractère prémédité du massacre et l’effectivité des disparitions forcées dont le nombre de 353 victimes, recensés par l’association des parents de victimes, peut raisonnablement paraître sous-estimé. Au gré des flux migratoires d’exilés et à mesure que des témoignages et preuves de victimes dans leur chair se sont accumulés, la question du massacre du Beach a fini par émerger timidement, devenant un élément de compréhension des crispations et des haines qui séparent encore et fondamentalement le Nord et le Sud Congo. En avril 2004, était libéré nuitamment dans des conditions rocambolesques par la justice française, l’un des auteurs présumés mis en examen et sous mandat de dépôt. Son retentissement médiatique en fit un “scoop“ politico-judiciaire dans la très démocratique France et le monde prit alors conscience de ce qui s’était joué au Beach de Brazzaville, de l’ampleur du traumatisme vécu par les Kongos, inversement symétrique à son refoulement par l’autocratie Sassou. La mémoire, ses enjeux, ce qu’on en fait, est l’objet d’un débat permanent dans les pays qui ont connu de tragédie effroyable à un moment de leur histoire. Comme le Rwanda, le Congo ne peut s’en échapper. Un massacre de masse dont l’origine et les causes autant que les conséquences demeurent occultées et pour partie inintelligible, le souvenir encore brûlant du génocide, sont autant de refoulés qui ressurgissent aujourd’hui et particulièrement à chaque commémoration. Le devoir de mémoire est l’expression d’une volonté de justice et, eu égard au déni de justice au Congo, n’aurait pu voir le jour sans une forme de “mondialisation“ de la justice. L’institution de la cour pénale internationale (CPI), prévue par le traité de Rome de 1998, prolonge les moyens mis en œuvre pour désormais éviter l’impunité de fait des massacreurs. Là aussi, l’engagement résolu pour l’exigence de la vérité et la justice est l’autre devoir des vivants pour les morts. E. MABIALA ma MAYINGUIDI.