Sassou Nguesso et le pétrolier Total ont-ils mis fin au partage de production ? Par RIGOBERT OSSEBI Congo-Liberty
Christophe de Margerie et Sassou Nguesso
Il ne faut pas croire que seule la compagnie italienne est concernée par des problèmes de corruption. A vouloir toujours gagner plus, les opérateurs pétroliers sont toujours tentés par le « diable Sassou » !
Un grand mérite, que tous nous reconnaissions à Pascal Lissouba, était qu’il avait réussi à imposer les contrats « partage-production ».
Le Congo, grâce à ce type de contrat, pouvait bénéficier des hausses de prix parfois importantes du baril de pétrole et se tailler la part du Roi, celle de l’Etat propriétaire. Un « seuil » était déterminé, c’est-à-dire un prix par baril qui tenait compte du coût de revient de l’extraction et de l’amortissement des investissements. Au-delà, le Congo récupérait environ 2/3 de la production et l’autre 1/3 était réparti entre les partenaires. Ce seuil se situait aux alentours de 35 $ le baril.
Récemment avec TOTAL, Sassou NGuesso a modifié ce type de contrat institué par Pascal Lissouba. Jusqu’à un niveau de prix inférieur à 90 $ par baril, la rétribution de l’Etat souverain se ferait suivant l’ancienne fiscalité (royalties + taxes diverses). Au-delà de 90 $, le partage-production s’effectuerait à nouveau. Ce nouveau mode de calcul est particulièrement avantageux pour le pétrolier et désavantageux pour le Congo.
Les députés congolais qui ont été contraints de ratifier cet accord prennent maintenant le risque de le communiquer à des tiers. Bien qu’appartenant à la majorité présidentielle, beaucoup de députés sont révoltés par ce nouveau cadeau fait par Sassou NGuesso à ses amis pétroliers.
Il est vrai que le dictateur a besoin d’avoir à Paris des amis influents pour le défendre. Qui de mieux que TOTAL pour plaider en faveur de l’indéfendable pyromane de la Centrafrique ? Mais comment croire qu’il s’agit de la seule contrepartie ???
Le jour où Sassou Nguesso tombera, le pétrolier Total devra rendre des comptes pour complicité de pillage généralisé des ressources pétrolières du Congo.
Tout n’est pas parfaitement connu des conditions de cet accord. Cela ne saurait tarder ! S’il apparait que le dictateur a bradé les intérêts de la nation, contrairement à son obligation constitutionnelle de les protéger, il sera évident alors que cela représentera une raison supplémentaire pour le peuple de se soulever… !
CORRUPTION : Les actionnaires d’ENI l’encouragent !
Matteo Renzi, le Premier Ministre réformiste italien, a subi la semaine passée à Milan un très embarrassant revers infligé par les actionnaires présents à l’Assemblée Générale de la société pétrolière ENI.
Le gouvernement italien détient une participation de 30% dans Eni et avait besoin du soutien d’investisseurs institutionnels le jeudi 8 mai 2014 pour atteindre la majorité des deux tiers des membres présents à l’Assemblée Générale des actionnaires pour adopter un nouveau règlement obligeant les administrateurs inculpés – mais pas coupables – de crimes financiers à démissionner.
Contrairement aux attentes, le gouvernement italien a alors subi une cuisante défaite. Environ 80% des actionnaires institutionnels non italiens présents ont voté contre la motion. Un tonnerre d’applaudissements a alors explosé dans la salle lorsque le résultat a été annoncé.
Les actionnaires ne pouvaient donner un signal plus clair pour encourager la déjà très grande capacité de corruption de la société pétrolière italienne. En République du Congo, les liens criminels (la corruption est un crime plus qu’un délit) entre les dirigeants envoyés par Milan, à titre personnel et/ou pour le compte de la société ENI, et la famille au pouvoir s’affichent scandaleusement au grand jour. Aucun domaine n’est épargné : le transport des personnels, la restauration, l’hébergement hôtelier, les locations de villas, d’appartements, de voitures et de jets privés, la location de bateaux « supply », les services de sous-traitance liés à la production etc., etc…
Cependant, si aucun règlement intérieur éthique propre à la société ENI n’a été accepté par la majorité des actionnaires, les employés et cadres coupables de faits de corruption avérée ne pourront en aucun cas échapper à la loi italienne et européenne qui les punit sévèrement. Quant à ce qui pourrait arriver au Congo à la compagnie pétrolière à la chute de leur protégé, le tyran Sassou NGuesso, comment ne pas imaginer qu’une addition très lourde sera présentée….. ? Nul doute que cela fera le plus grand plaisir aux actionnaires !
Rigobert OSSEBI