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La "politique arabe" de la France au bout de ses contradictions ? (L'Express)

par Pierre Par Pierre Vermeren 16 Juin 2014, 21:08 Fabius France Politique arabe de la France Libye yrie Irak IIran Arabie Saoudite Qatar

La "politique arabe" de la France au bout de ses contradictions ? (L'Express)
La "politique arabe" de la France au bout de ses contradictions ?

Par Pierre Par Pierre Vermeren

L'Express

Au Moyen Orient, la France est peu à peu devenue, à la suite des Américains, l'alliée indéfectible des Monarchies du Golfe. Pétrole oblige.
En se rendant à Alger, le Ministre des affaires étrangères Laurent Fabius a confirmé l'alliance objective et bien réelle entre les deux Républiques face au djihadisme. En dépit des discours et des mises en scène savamment théâtralisées, cette alliance ancienne, nouée dans la lutte contre le FIS il y a plus de vingt ans, ne s'est jamais démentie. En Afrique du Nord, la France fait de la realpolitik, qui la conduit a être l'alliée de tous les régimes (monarchies, républiques, dictatures, révolutions), dès lors qu'ils maintiennent la paix et la sécurité, ou du moins qu'ils tentent de le faire, sur la rive sud de la Méditerranée.

Il n'y a pas de contradiction de ce fait entre le soutien inébranlable apporté à la monarchie marocaine, à la république algérienne, au régime malien au bord de l'effondrement, ou aux différents régimes égyptiens qui se sont succédé depuis quatre ans, dès lors que leur engagement contre les djihadistes est établi et sans faille. Il a d'ailleurs fallu que la démocratie tunisienne post-révolutionnaire naissante fasse ses preuves en matière de lutte contre le djihadisme, pour que le Président de la République française, après deux ans de constituante, lui apportât son soutien.

Du Maghreb au Sahel, la France est donc l'alliée du Maroc et de l'Algérie, deux Etats séparés par une frontière militarisée et fermée, comme elle est l'alliée de Bamako et de Lagos, de Tripoli ou du Caire, dès lors que des plans de batailles, conformes à ceux des Américains, tentent de réduire les têtes et les sanctuaires de l'hydre salafo-djihadiste.

Au Levant, autre lieu, autres moeurs. Du fait de sa très ancienne implantation dans la région, la France a été l'alliée de tous les régimes qui s'y sont succédé, de l'Empire ottoman à Saddam Hussein, en passant par le Liban en guerre, le régime syrien des Assad, Israël ou Yasser Arafat. Il n'y a qu'un ennemi durable dont s'est toujours gardé la République française, après avoir un temps abrité son fondateur, la République islamique d'Iran. Car au Moyen Orient, la France est peu à peu devenue, à la suite des Américains, l'alliée indéfectible des Monarchies du Golfe. Pétrole oblige. Or la République islamique d'Iran est l'ennemi juré de l'Arabie Saoudite depuis sa fondation en 1979, au point qu'il fallut armer Saddam Hussein pendant près de dix ans pour tenter de l'abattre. Un fiasco.

Pendant la deuxième guerre du Golfe (1990-91), la France, changeant d'alliance, suit l'Amérique pour restaurer le Koweït, rassurer les Saoudiens et stopper Saddam Hussein, devenu une menace pour le Golfe. Lors de la troisième guerre du Golfe (2003), la France, désormais solidement implantée dans les monarchies de la région, opte pour une position neutraliste : alors qu'elle soutient en sous-main l'intervention américaine, la France se paye le luxe de positions tiers-mondiste sur le libre choix des peuples etc. Malgré quelques fureurs américaines, elle renforce à bon compte l'amitié des pétromonarchies arabes, que la chute de Saddam allait contraindre, pour leur défense, à passer des dizaines de milliards d'euros de commandes d'armement... La France devient alors la meilleure amie du mini-Qatar, de l'Arabie, du Koweït et des Emirats. Grâce à ses multiples médiateurs libanais, à ses amitiés égyptiennes et palestiniennes, et à la puissance religieuse du Califat marocain, la France est la nouvelle reine du Golfe !
Convaincre le bon peuple que le basculement d'alliance est juste

Toute une classe d'intellectuels, de journalistes et de politiciens français accompagne le mouvement, car il faut faire oeuvre de dialectique ! Il reste en effet à convaincre le bon peuple que le basculement d'alliance, qui porte la France des Républiques militaires arabes " laïques " (Irak, Syrie, Libye...) vers les pétromonarchies théocratiques et princières, est juste. L'adoubement des Frères musulmans, du wahhabisme et in fine du salafisme, dont ces pays sont à la fois les financiers et les zélateurs dans le monde, en est le prix. Quitte à liquider Kadhafi, voire Bachar...


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