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Le néocolonialisme, meilleur allié de Michel Tomi editos - Par Thalia Bayle - Publié le 04 Mondafrique
Visé par une enquête judiciaire censée faire la lumière sur l'origine de ses revenus et ses relations avec le président malien IBK, l'homme d'affaire corse Michel Tomi est avant tout un symbole vivant de la Françafrique. Empereur des casinos et des jeux sur le continent noir, il a su nouer de nombreux liens avec les chefs d'Etat africains, les diplomates et les services français. Un vaste réseau d'hommes influents qui lui accordent leur protection.
De Jeune Afrique au Point en passant par l’Express, « le parrain des parrains » corses Michel Tomi visé par une information judiciaire notamment pour « blanchiment aggravé », fait la tournée des médias français. Depuis sa mise en examen le 20 juin en France l’homme explique volontiers aux uns et aux autres sa version des faits. Pas d’argent sale, pas de transactions douteuses mais des revenus légaux et une « conscience tranquille » a déclaré l’homme dans une interview à l’Express. Un détail toutefois menace de faire échouer cette vaste opération de relations publiques. Tomi reste, inexorablement, une caricature de la Françafrique.
De bonnes fréquentations
Ce richissime homme d’affaires, propriétaire du casino de Bamako et conseiller du président malien IBK doit d’abord sa réussite au gigantesque réseau qu’il a tissé avec les chefs d’Etat africains, les diplomates et les services français. Ces derniers ont d’ailleurs contribué à le faire passer maître dans l’art de rendre de précieux services à ses amis africains. C’est notamment grâce à l’ancien patron du renseignement policier, Bernard Squarcini que Tomi a présenté l’ex-commandant du GIGN Frédéric Gallois à IBK. Aujourd’hui vice-président de l’entreprise de sécurité Gallice Group, F. Gallois a été chargé de former des hommes à la protection du président malien. Coût de l’opération, 150 000 euros, avancés par Tomi via le compte d’une société domiciliée au Cameroun. Une belle affaire qui vaut aujourd’hui aux hommes de Gallice d’être mis en examen pour recel d’abus de confiance et faux en écriture. Les bonnes relations se partagent aussi en famille. Le demi-frère de Michel Tomi travaille lui-même à la DCRI.
Un homme sous protection
A Bamako, Tomi a aussi son rond de serviette à l’ambassade de France. C’est son ami Yoyo Sangarai, un ancien contrôleur de police reconverti dans l’immobilier et les affaires qui joue le rôle d’interface. Proche d’IBK, Yoyo Sangarai est en effet très bien introduit auprès de l'ambassade de France au Mali où il rencontre régulièrement les représentants des services français. L’ambassadeur, Gilles Huberson est d’ailleurs lui-même proche de la DGSE avec laquelle il a travaillé dans le pays notamment en tant que chef de la mission Mali-Sahel. Aux côtés d’officiers des renseignements, il a participé aux négociations amorcées à Kidal avec les grandes tribus touaregs du nord. Depuis septembre 2012, il travaillait également au sein de l’ambassade comme officier de liaison entre le Quai d’Orsay et le ministère de la Défense. La nomination en mars 2013 au poste d’ambassadeur de ce sarkozyste Saint-cyrien, ex officier de gendarmerie, à la place de Christian Rouyer, diplomate de carrière, est venue compléter la liste des limogés du Quai d’Orsay de l’époque. Objectif : veiller à ce qu’aucun élément hostile ne vienne troubler la conduite des opérations au Mali prévue par François Hollande.
Adossé à de tels soutiens, Michel Tomi n’est donc pas laissé sur le bord de la route. Et tant pis s’il est intimement lié au milieu du grand banditisme corse et s’il revendique son amitié avec Richard Casanova, figure de proue du puissant gang de la Brise de Mer. Aujourd'hui assigné à résidence, il a du débourser 2 millions d’euros pour garder sa liberté. Un montant certes important, mais somme toute dérisoire pour cette immense fortune qui, dans son interview à l'Express, admet toucher 2 millions d’euros par mois. La sanction paraît donc bien fade mais l’homme est protégé. « Tous les éléments sont réunis pour qu’il soit mis en détention », explique, excédé, un magistrat.