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“Papa Hollande” joue au petit soldat à Bagdad Par Nicolas Beau Mondafrique
Lorsque le vendredi 12 septembre, François Hollande, escorté des bons élèves du gouvernement, Laurent Fabius ( Affaires Etrangères) et Jean Yves Le Drian (Défense Nationale) , parcourt dans une mercedes blindée et sous escorte les rues de Bagdad, le président français oublie, pour quelques instants, ses graves ennuis hexagonaux. Mais cette posture guerrière contre l'Etat islamique n'a guère de sens pour une France plombée par la crise financière et ligotée par la complaisance de sa diplomatie envers le Qatar et l'Arabie Saoudite, qui furent les principaux bailleurs de fonds des jihadistes.
Le vendredi 12 septembre à Bagdad, on découvrait un François Hollande épanoui, au propos martial, qui promettait à son homologue irakien d’être à ses côtés dans la guerre qui s’annonce contre l’Emirat islamique. Pour autant, le président français ne s’est engagé sur rien de précis. A l’exception de quinze tonnes d’aide humanitaire qu'il a cru devoir apporter dans son propre avion présidentiel, telle une dame d’œuvre visitant ses pauvres.
Mais lorsque ses interlocuteurs irakiens ont abordé les dossiers sérieux, à savoir les frappes aériennes contre l’Etat islamique, François Hollande n’avait plus rien à promettre de précis. Attendons pour en débattre le lundi 15 septembre, a répondu le président français, lors de la conférence à Paris des pays participant à la coalition. La France seule ne dispose en effet que de quelques Rafales, et encore à 3000 kilomètres de Bagdad, sur la base qu’elle possède à Abou Dhabi. Et encore l'armée française n'a pas vraiment les moyens financiers de les utiliser.
Hollande obligé des Américains
Il faut au moins six ravitaillements en vol pour la moindre frappe des Rafales sur l'Irak. Comment la France peut-elle agir dans ces conditions alors qu’il n’y a déjà plus un euro dans les caisses de l’armée française ? Dans l'héxagone, l'armée de l'air n'a plus de quoi financer le carburant pour les exercices traditionnels des pilotes. Comment aurait-elle les moyens financiers de nouvelles frappes en Irak? Heureusement, les Américains, dont François Hollande devient l’obligé, sont là qui vont faire le boulot.
Sur le plan diplomatique, Hollande et Fabius n’ont pas d'avantage les instruments de leur politique. Eux qui ont constamment déroulé le tapis rouge face aux Qataris et aux Séoudiens, dans l’espoir de quelques contrats pour l’industrie française, n’ont guère les moyens de tenir un discours musclé face aux les représentants des monarchies du Golfe. En servant une politique insensée, les pétrodollars qui ont financé les jihadistes de l’Etat islamique. Et ce sont ces monarchies sunnites, près à tout pour combattre l'ennemi chiite, qu’il faut ramener dans le droit chemin en les associant, tant bien que mal, à cette guerre contre leurs anciens protégés.
Laurent Fabius, à la solde du Qatar
Lorsque le chef de la diplomatie américaine, John Kerry, se rend dans le Golfe la semaine dernière, il s’emploie en effet à associer ses interlocuteurs qataris, émiratis et séoudiens à l’opération militaire qui se prépare. Et il y parvient ; Sur ce terrain, Laurent Fabius, qui s’est montré d’une indulgence coupable pour les Rois fainéants du Golfe et leurs alliés en Libye et en Tunisie, n’a évidemment pas la même force de persuasion que l’oncle Sam.
Alors pourquoi ce voyage aussi inutile qu’arrogant à Bagdad ? La guerre est-elle l’ultime consolation que François Hollande a trouvé dans son malheur de président mal aimé par ses ex femmes et surtout par les Français ? Il faut se souvenir de l’échappée belle du chef de l’Etat français à Tombouctou au début de l’opération Serval sous les vivats d’une foule africaine bigarrée et chaleureuse. Dans une émouvante envolée lyrique, « Papa Hollande », comme le désignaient les pancartes brandies par les maliens, avait prononcé ces paroles définitives : « Je viens de vivre la journée la plus importante de ma vie politique ».
Ah dieu que la guerre est jolie !
Diable ! Un chef d’Etat qui passe pour casanier se transforme soudaine en chef de guerre flamboyant, entouré, cornaqué, instrumentalisé par des militaires français devenus les maitres du jeu. « Les militaires français ont fait aimer la France dans toute l’Afrique », ose Hollande. « Nous avons sauvé le Mali », explique Fabius.
Pourquoi bouder son plaisir ? L’opinion publique française avait soutenu et soutient encore cette intervention, et ne se soucie guère la situation calamiteuse, deux ans après, dans le Nord du Mali gangrené par la violence jihadiste, l’insécurité grandissante, les trafics et les luttes tribales. Après l’opération Serval, le bon petit soldat Hollande intervient en Centrafrique, cherche, sans succès, à déclarer la guerre au président syrien Assad, soutient les Américains à Bagdad et préconise une intervention dans le sud libyen, comme le plaidera le fidèle Le Drian, le 28 septembre, face à l’Assemblée générale de l’ONU.