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Un parfum d'Uramin à l'ElyséePublié par Xavier MonnierBakchich
L'ancienne présidente d'Areva va être reçue par le président Hollande.
Le 26 septembre, l'agenda du chef de l'Etat annonce un rendez vous. Inattendu et sans motif précis. A 18h30 ce vendredi, François Hollande s'entretiendra avec Anne Lauvergeon. Devenue président du conseil d'administration de Sigfox, une start up toulousaine, l'ex sherpa de François Mitterrand, un temps pressentie pour entrer au gouvernement Valls, va regoûter aux ors de l'Elysée, le temps d'une fin d'après midi vendredi. L'annonce de la visite a commencé de faire grincer des dents. Et pas seulement dans son ancienne maison Areva, qui n'en finit pas de solder les dossiers de sa présidence. L'inauguration de l'EPR finlandais a encore été décaler de quelques années, repoussé à 2018. Les comptes naviguent encore sous la ligne de flottaison. Et ses cadres soupirent à l'évocation du souffle judiciaire qui s'annonce. Ce sera d'abord un rapport de la Cour des Comptes sur le gestion du géant français de l'Uranium, si peu amène que les magistrats financiers ont, dès avril, saisi le parquet national financier aux fins d'enquête. Dans leur viseur, un serpent de mer qui sort la tête, périodiquement, depuis 2007. Le crash du rachat d'Uramin, une junior d'uranium (1) pour 2,5 milliards de dollars, dans des conditions aussi acrobatiques qu'onéreuses. Et désastreuse pour les comptes d'Areva. Moins prometteurs qu'espérés, les gisements d'uranium acquis se sont même révélés inexploitables après l'effondrement du cours de l'Uranium post Fukushima. Un crash industriel que la Brigade Financière est chargé de disséquer, lancé sur la piste de « présentation ou publication de comptes inexacts ou infidèles », « diffusion d'informations fausses ou trompeuses », « faux et usage de faux ».
Serpent de mer atomique
En somme qu'Areva a acheté trop cher Uramin pour des raisons à déterminer. Comme l'avait narré Bakchich, balayant les doutes de ses propres experts, la société a édulcore en 2007 la moindre réservé quant à la Junior canadienne au moment de demander l'accord de l'Agence des Participations de l'Etat...intervenu entre les deux tours de la présidentielle.
Tout s'était enchaîné fort vite par la suite avec un achat au dessus du cours des marchés des actions d'Uramin aux bourses de Toronto et Londres, pilotés par Daniel Wouters, vice-président d'Areva qui se recyclera...dans des sociétés proches des fondateurs d'Uramin.
Depuis les hypothèses se succèdent. Une enquête fouillé du Mail On Guardian Sud Africain décrit un mécanisme de corruption de ses élites à travers l'achat surfacturé d'Uramin, dans laquelle des proches de Thabo Mbeki, alors président, avaient de gros intérêts. En échange de ce cadeau Areva aurait pu hérité d'un contrat de plusieurs dizaines de milliards d'euros au pays de l'arc-en-ciel, avide de nucléaire. La manoeuvre a échoué avec la chute de Mbeki, programmé dès 2008.
Reprise dans le roman Radioactif, la thèse a été encore étoffée par Vincent Crouzet. Uramin cacherait le plus grand deal de rétrocommissions depuis les frégates de Taiwan. Près de 2 milliards de dollars évaporés, selon un savant montage où apparaissent Patrick Balkany, le roi du Katanga Georges Forrest et des présidents namibien, centrafricain et français. Les détails ont été si précis que la brigade financière l'a longuement auditionné avant l'été. Et la rentrée a apporté un peu d'eau à son moulin.
Une enquête pour corruption, recel et blanchiment a été lancé par les juges Van Ruymbeke et Simon. Une note tracfin, le service anti-blanchiment de Bercy, a détecté des virements étranges sur un compte basé à Singapour. Cinq millions d'euros de Georges Forrest sont passé par la place forte de la finance asiatique. En vue de garnir les finances du ponte de Levallois? Et en échange de quels services? Les deux hommes se sont notamment croisés sur le dossier uramin, ainsi que Bakchich l'a démontré...Un support même attesté par mail, dont Lauvergeon était destinataire.
Peut-être le sujet de la discussion de vendredi?
(1) les juniors sont des sociétés minières spécialisées dans l'exploration et l'achat de permis d'exploitation de mines