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Balkany: la fable à 5 millions de dollars (Bakchich)

par Xavier Monnier 24 Octobre 2014, 14:36 Balkany Forrest Françafrique Areva Uramin Forsys

Balkany: la fable à 5 millions de dollars (Bakchich)
Balkany: la fable à 5 millions de dollars
Par Xavier Monnier
Bakchich

Si l'homme d'affaires belge établi au Katanga Georges Forrest assume avoir versé 5 millions au député français, il a servi une justification des plus loufoques au juge Van Ruymbeke.

L'Afrique, ses hommes d'affaires, ses intermédiaires...et ses mystères. Depuis la (nouvelle) mise en examen de Patrick Balkany, le 21 octobre, pour corruption, blanchiment de corruption et blanchiment de fraude fiscale, un nouveau pays est apparu sur la carte médiatique du continent noir : la Namibie. Fier de Windhoek, réputée être la capitale la plus proprette de ce côté de l'hémisphère, l'ancienne colonie allemande se retrouve au coeur de l'enquête du juge Van Ruymbeke sur les avoirs cachés du député maire de Levallois.

Le vaste Etat, bordés par les désert du Namib et du Kalahari aurait vu se nouer un étrange manège, qu'a déroulé l'homme d'affaire belge Georges Arthur Forrest lors de son audition du 18 septembre, qu'ont dévoilé M6 puis le Monde

«En septembre 2008, il [M. Balkany] m'a appelé en me disant qu'il avait une affaire intéressante à m'apporter, relate M. Forrest. Comme il voyait que je voulais investir dans l'uranium, il nous a apporté une affaire, Forsys Metals Corporation en Namibie. M. Balkany a obtenu de ce gouvernement qu'il ne s'oppose pas à la transaction. J'ai racheté Forsys pour 500 millions de dollars. Comme M. Balkany m'avait apporté l'affaire et que tout commissionnaire reçoit une commission, j'ai négocié avec M. Balkany à 1 %. On a arrondi à 5 millions de dollars».

Et le même Forrest, qui a bâti sa fortune dans les mines du Congo (Ex Zaïre) de préciser que la somme a été versé sur un compte de Singapour, dont Balkany lui a laissé le numéro. Versement en trois fois...avec quelques frais.

Forrest n'a jamais racheté Forsys

Tracfin, l'organisme anti-blanchiment de Bercy a bien retrouvé la trace de la transaction. Las, tout le reste ne semble bien que «faribole» comme s'en est défendu Balkany, qui dément s'être rendu en Namibie ou être intervenu dans la rachat de Forsys...Et ce n'en est que plus intriguant.

Georges A. Forrest (1) n'a a effet jamais racheté Forsys...et encore moins au gouvernement namibien qui ne dispose d'aucun pouvoir pour empêcher ou autoriser une opération boursière canadienne. A l'instar de sa couteuse cousine Uramin, Foresys est une junior canadienne de mines. Comprendre une entreprise qui prospecte pour trouver de nouveaux gisements, rafle des contrats d'exporation et d'exploitation auprès des Etats avant de se vendre au plus offrant sur le marché boursier de Toronto (TSX). Forte d'un permis minier en Namibie, Forsys a bien cru décrocher la timballe en novembre 2008 quand le Groupe Forrest International propose de racheter ses actions pour 569 millions de dollars canadiens. Le jackpot ne tintera pourtant jamais.

En mars 2009, GFI prévient Forsys des difficultés à réunir les fonds nécessaires à l'achat. 5 mois plus tard, les négociations sont rompus, Forsys traine GFI en justice pour avoir renoncé à l'achat, lui demandant 20 millions de dollars canadiens de dédommagement. Un accord sera finalement trouvé en mars 2011 pour éviter de passer par la case justice.

Les Etats-Unis n'aiment pas les relations iraniennes de Forrest

La belle histoire vendu par Forrest au juge ne tient pas l'épreuve des faits. Pire un cable de l'ambassade américaine à Ottawa, daté du 12 août 2009 décrit les ressorts du recul de l'homme d'affaires. En fait un oukase des Etats-Unis qui se méfient de Forrest, de ses liens avec l'Iran et de l'utilisation de l'uranium namibien qu'il aurait ainsi acquis.

Le message de l'ambassade américaine, ne laisse pas le moindre doute (voir document plus bas). «Ceci est une demande d'action» en vue «d'empêcher la vente de Forsys à GFI». L'ordre sera prestement effectué, le ministère de l'Industry canadien bloquant la vente dès le 19 août.

L'agenda, encore une fois, met à bas la version de Georges Forrest sur une commission versée à Patrick Balkany pour une opération qui n'a pas eu lieu. Peu connu pour sa souplesse en affaires, la question du motif de versement de commissions de Forrest à Patrick Balkany demeure entière. Et en Afrique.

C'est bien sur le continent que les deux hommes se sont croisés, notamment au détour du dossier Uramin. En 2008, les deux hommes ont en effet joué les facilitateurs d'Areva auprès du président centrafricain Bozizé, qui refusait alors au géant nucléaire français d'accéder aux gisements si chèrement acquis auprès de l'autre junior canadienne. Ces interventions étaient non rémunérées, a alors écrit noir sur blanc le Directeur des Mines d'Areva, Sébastien de Montessus. «Ni Balkany, ni Forrest n'ont l'habitude de se déplacer pour rien», remarque un ancien de la DGSE, habitué de la zone. «Et Bozizé non plus». Comme l'avait révélé Bakchich, un versement de 8 millions de dollars d'Areva, devant abonder le trésor centrafricain, n'a pas fait long feu dans les caisses de Bangui. Disparu. 32 autres millions devaient suivre selon le protocole d'accord signé entre Areva et la Centrafrique, sur 5 ans.

En 2010, Forrest s'est même associé à Areva, pour 30 % dans la joint venture Areva Explo, titulaire de sept permis d'exploration….

Encore des pistes à défricher pour les juges. A moins que Forrest ne les charrie aussi sur l'Oubangui...

(1) qui n'a pas encore répondu aux messages de Bakchich

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