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Burkina, vers la traque des biens mal acquis Mondafrique
Un mois et demi après la chute de l'ex président burkinabé Blaise Compaoré, le réseau national de lutte anti-corruption (RENLAC) qui regroupe une trentaine d'associations dans le pays se lance dans la traque des biens et des avoirs mal acquis des dignitaires de l'ancien régime.
Lors de son court passage à la tête de l’état en tant que président de la transition, le lieutenant colonel Yacouba Isaac Zida avait annoncé avoir gelé, au Burkina Faso, les comptes des anciens dignitaires du régime de Blaise Compaoré. Finalement, seules vingt-trois personnes proches de l’ancien président ont été touchées par cette mesure. Une goutte d’eau dans l’océan de dur labeur que doivent affronter les défenseurs de la traque des biens mal acquis sous l’ère Compaoré.
Haro sur les "biens mal acquis"
Basé à Ouagadougou, le réseau national de lutte anti-corruption (RENLAC) qui regroupe une trentaine d’associations a fait du gel et du recouvrement des avoirs des anciens responsables burkinabès un cheval de bataille. C’est à la demande de ses responsables que l’avocat William Bourdon, à l'origine de la saisine de la justice française dans le dossier des biens mal acquis de trois dirigeants africains, s’est rendu au Burkina pour une conférence le 9 décembre. Au programme, comment lutter plus efficacement contre la corruption, sanctionner les anciens dignitaires du régime coupables de crimes économiques et organiser le recouvrement de leur fortune acquise illégalement.
En vingt-sept ans de règne, Blaise Compaoré et ses proches s’étaient en effet accaparés une bonne partie de l’économie du pays. « Si vous souhaitiez monter une affaire au Burkina, il fallait obligatoirement passer par François Compaoré », affirme un membre du RENLAC. « Quand à Alizeta, la belle-mère nationale, elle raflait tous les appels d’offre, y compris dans les domaines ou elle ne possédait pas de sociétés comme les moustiquaires ». Les fortunes constituées ont ensuite largement servit à effectuer des achats dans le domaine de l’immobilier, véritable pierre angulaire du système Compaoré. « Dans une économie très peu bancarisée et de sous développement économique comme celle du Burkina Faso, l’épargne passe souvent par l’immobilier ou la terre. » explique Ra-Sablga Seydou Ouédraogo, coordonnateur de l’Institut Free Afrik spécialisé sur les questions économiques. Partout à Ouagadougou, des immeubles acquis - parfois via des prête-noms - ou construits par le clan de l’ex président dominent les rues ensablées.
Des biens dont le RENLAC demande aujourd’hui un état des lieux pouvant permettre une future restitution. « Avant les élections de 2015, les autorités de transition doivent impérativement poser des rails de la bonne conduite à suivre » déclare Claude Wetta, secrétaire exécutif du RENLAC. « S’assurer que des enquêtes sont bel et bien lancées, pointer les mauvaises pratiques de certaines sociétés ayant agit sous influence du pouvoir etc. »
Connivences
Pourtant au Burkina Faso, beaucoup doutent de la volonté des responsables actuels à sortir les dossiers brûlants. « Pour l’instant les autorités font preuve de mauvaise foi sur la questions des avoirs et des biens mal acquis confie une source proche du dossier. Il n’est pas difficile de demander la liste des beaux administratifs et des actes notariés pour les biens soupçonnés d’appartenir aux proches de Blaise ». Mais pour l’instant, les démarches stagnent.
« Il faut agir très vite » a pourtant déclaré William Bourdon le 9 décembre. Une diligence nécessaire pour prévenir les transferts de liquidités et la constitution de montages financiers complexes destinés à brouiller les pistes. S’il n’est pas question pour l’avocat de porter plainte contre Blaise Compaoré pour l’instant, la coopération judiciaire avec Paris est nécessaire pour identifier les biens et avoirs de l’ex président et de ses proches en France.
Reste que Blaise Compaoré, tout comme ses anciens dignitaires, bénéficient, encore aujourd’hui, de nombreuses complicités, au Burkina Faso comme en France.