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La guerre en Yougoslavie: Le vrai visage de la diplomatie US Par Andrew Korybko | 24 mars 2015 Article original : http://sputniknews.com/columnists/20150324/1019950056.html#ixzz3Vhlu3XsQ Traduit par TJ / Arrêt sur Info
24 mars 1999 – Le 16 anniversaire de la guerre de l’OTAN en Yougoslavie donne l’occasion de réfléchir sur ce qu’est vraiment la diplomatie étasunienne
es Etats-Unis se sont longtemps proclamés comme le seul modèle de la vertu et de la défense de la liberté dans le monde, exagérant ce message au cours des années qui suivirent la fin de la guerre froide. Des millions de gens ont été dupés durant cette période, mais leurs illusions furent rapidement dissipées, après la guerre de 1999 en Yougoslavie.
Cette tragédie a révélé le vrai visage de la « diplomatie » étasunienne comme un écran trompeur permettant d’atteindre des objectifs géopolitiques prédéterminés. La guerre ne visait pas tant une intervention humanitaire (dont la réalité a été largement exagérée par les médias occidentaux) que l’instauration d’états croupions pro-occidentaux dans le sud des Balkans.
La guerre de Yougoslavie a aussi été un tournant marquant la montée en puissance de l’agression étasunienne à travers toute l’Eurasie et le perfectionnement de la première version réelle de la guerre hybride.
Les péchés de l’Oncle Sam
Les Etats-Unis ont fait beaucoup d’horribles choses durant la guerre de Yougoslavie, mais en voici trois parmi les plus marquantes:
Soutenir le terrorisme:
a soi-disant « Armée de Libération du Kosovo » (UCK), la branche armée des nationalistes albanais combattant les serbes dans la province du Kosovo, était considérée comme une organisation terroriste en Yougoslavie. Le Conseil de sécurité des Nations Unies), par la Résolution 1160, qui fut soutenue par les Etats-Unis, a même condamné cette organisation pour ses activités terroristes en lui demandant d’arrêter immédiatement ce genre d’actions. Pourtant, l’UCK a joué un rôle décisif dans la déstabilisation de la Serbie ; elle a non seulement été soutenue par les Etats-Unis tout au long du conflit, mais son chef, Hashim Thaci, a été reconnu dès la fin de la guerre comme nouveau premier Ministre du nouvel état par Washington.
Mentir au monde:
Les Etats-Unis ont essayé de convaincre le monde que les Albanais du Kosovo étaient en train de subir un génocide, perpétré par les Serbes, mais cela ne correspondait nullement à la réalité sur le terrain. Même si des Albanais ont assurément été tués durant leur violente insurrection contre le gouvernement fédéral, des Serbes aussi l’ont été, et les Albanais n’ont jamais eu les dizaines de milliers de morts évoqués par le Département d’Etat, pour justifier le bombardement de la Yougoslavie.
Des dizaines de milliers de personnes sont mortes au Mexique ces dernières années dans la guerre contre la drogue, par exemple, mais ce pays n’a pas eu à subir d’intervention humanitaire.
Bombarder des infrastructures civiles:
La campagne de bombardement de l’OTAN, menée par les Etats-Unis, a tué des centaines de civils et détruit des immeubles d’habitation, des fermes, des écoles, des hôpitaux, des églises et des ponts. Le Pentagone a expliqué de telles horreurs (quand il daigné en parler), en disant que ses armes de haute de précision avaient mal fonctionné, mais les survivants n’en ont rien cru.
BONUS, bombarder la Chine et s’en tirer sans problèmes:
Les Etats-Unis ont touché l’Ambassade de Chine à Belgrade (reconnue comme territoire souverain, comme toutes les ambassades dans le monde) le 7 mai 1999, tuant 3 personnes et en blessant 20 autres. On peut imaginer la réponse du Pentagone si les rôles avaient été inversés.
La boite à outils de la politique étrangère
La guerre en Yougoslavie a été en fait le premier terrain d’essai de la stratégie de changement de régime, appliquée toutefois grossièrement. Elle a combiné les éléments suivants, qui allaient être développés et perfectionnés plus tard dans des conflits ultérieurs:
uerre non-conventionnelle:
Dans le but de promouvoir le chaos et de créer un prétexte à un ultimatum et une invasion militaire ultérieure, les Etats-Unis ont soutenu l’UCK durant sa guerre terroriste dans la province serbe du Kosovo.
Ultimatum:
Les USA donnèrent au président Milosevic un ultimatum pour retirer ses troupes et la police yougoslaves de la province du Kosovo, ou d’en subir les conséquences dévastatrices.
Intervention conventionnelle:
La déstabilisation a atteint un paroxysme dramatique quand l’OTAN a lancé son intervention humanitaire contre la Yougoslavie, ce qui a finalement conduit à sa fragmentation et sa destruction.
Révolution de couleur:
Les services de renseignement étasuniens et les enseignements de Gene Sharp ont organisé et dirigé la Révolution des Bulldozers en octobre 2000, qui est vue depuis comme la première révolution de couleur.
De nos jours, la méthode a été perfectionnée comme suit :
1. Ultimatum
Les Etats-Unis donnent un ultimatum explicite/public ou implicite/en coulisses au pays ou leader visé. S’il y a refus et qu’une révolution de palais ne peut être provoquée, on passe à l’étape suivante.
2. Révolution de couleur
Ce coup d’état de la rue cherche à évincer la direction du pays ciblé, derrière la façade soigneusement construite d’un pouvoir populaire qui fournit aux médias internationaux l’impression trompeuse que la majorité des citoyens se révolte contre son gouvernement. Avec l’ultimatum et le coup d’état conventionnel, la révolution de couleur est l’outil le plus efficace pour un changement de régime.
3. Guerre non conventionnelle
Cette troisième étape peut être envisagée comme une continuation de la seconde quand une révolution de couleur paraît échouer. Elle capitalise sur des structures sociales qui sont apparues durant la révolution de couleur, en fournissant des armes aux participants de la tentative de coup d’état précédent, et en les encourageant à recourir au terrorisme et à l’insurrection pour renverser le gouvernement. Des mercenaires étrangers peuvent également être impliqués.
4. Intervention conventionnelle
Alors que toutes les étapes précédentes demandent généralement un degré de discrétion typique des opérations secrètes, l’intervention conventionnelle met l’action de déstabilisation en pleine lumière en engageant une guerre ouverte. C’est la forme la plus coûteuse de changement de régime, et elle est toujours revêtue d’une grande rhétorique humanitaire et démocratique pour cacher son but réel.
Où en sont-ils maintenant ?
Regardons les exemples les plus notables où cette stratégie a été appliquée par les Etats-Unis et voyons comment ces pays ont fait face à la guerre hybride menée contre eux.
Étapes 1-2: Ukraine
L’ultimatum implicite contre le président Ianoukovitch était qu’il avait à signer l’accord d’association avec l’UE, et lorsqu’il a décidé au dernier moment d’y renoncer, une révolution de couleur a été lancée contre lui. A certains égards, le terrorisme de l’EuroMaidan correspondait même en partie à la troisième étape.
Aujourd’hui, le pays est en ruine et banqueroute, et les oligarques, (Poroschenko vs Kolomoiskyi) sont entrés dans une guerre fratricide entre eux, aux dépens de la vie des Ukrainiens.
Étapes 1-3: Syrie
Le président Assad a refusé de permettre à un gazoduc du Qatar pro-US de traverser son territoire, vers la mer Méditerranée, préférant opter pour le pipeline de l’amitié avec l’Irak et l’Iran. Comme punition, la Syrie a été entraînée dans le vaste théâtre des révolutions de couleurs du printemps arabe, soutenues par les Etats-Unis. Mais quand la population a résolument manifesté son soutien à ses dirigeants démocratiquement élus et ses autorités laïques, et empêché la réussite du coup d’état de la rue, une guerre non-conventionnelle a été lancée contre le pays.
A l’heure actuelle, les terroristes les plus notoires venus du monde entier ont infesté le pays, massacrant des dizaines de milliers de civils innocents et transformant les villes en un amas de ruines au cours de quatre années de ravages.
Étapes 1-4: Libye
Mouammar Kadhafi a refusé d’intégrer pleinement son pays dans l’Union pour la Méditerranée dirigée par l’Union Européenne, choisissant de rester un membre observateur. Bien qu’il ait abandonné ses armes de destruction massive lors d’un précédent ultimatum en 2007, la réticence de Kadhafi d’aller de l’avant avec l’intégration euro-méditerranéenne a fait de lui un homme à abattre.
Les révolutions de couleur du printemps arabe organisé par les USA ont touché Kadhafi en 2011, et les événements dans le pays ont rapidement évolué dans une spirale qui a mené à une guerre non conventionnelle, lorsque des terroristes ont commencé, dans les principales villes, à tuer des civils et des représentants de l’Etat.
Peu de temps après, l’OTAN a décidé alors de commencer une campagne de bombardement contre le pays, sous le faux prétexte d’une intervention humanitaire, qui a subséquemment détruit les infrastructures sociales et physiques de l’Etat, et en ont fait le redoutable terrain de guerre pour terroristes, qu’il est aujourd’hui.
Souvenez-vous que les tragédies mentionnées ci-dessus n’auraient pas été possibles s’il n’y avait pas eu la guerre menée par les Etats-Unis en Yougoslavie et la mise au point des techniques de changement de régime qui y ont été expérimentées pour la première fois. C’est la raison pour laquelle nous devrions nous souvenir chaque année du 24 mars, comme du sombre souvenir de la dangerosité de la diplomatie des Etats-Unis et du terrible coût que peut entraîner le fait de s’opposer à la volonté de Washington.
Andrew Korybko | 24 mars 2015
Article original : http://sputniknews.com/columnists/20150324/1019950056.html#ixzz3Vhlu3XsQ
Traduit par TJ / Arrêt sur Info
Source: http://arretsurinfo.ch/la-guerre-en-yougoslavie-le-vrai-visage-de-la-diplomatie-us/