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Pêche frauduleuse (Greenpeace)

par Greenpeace 6 Mai 2015, 16:38 Afrique Pêche frauduleuse Greenpeace Rapport

Pêche frauduleuse (Greenpeace)
Pêche frauduleuse
Greenpeace - 6 mai 2015

Greenpeace lance un nouveau rapport sur la fraude au tonnage massive et systématique des navires chinois en Afrique de l’Ouest

Dakar, le 06 mai 2015 – Depuis près de 30 ans, la China National Fisheries Corporation (CNFC), plus grande entreprise de pêche lointaine de la Chine, sous-déclare régulièrement le tonnage brut (TB) de ses navires de pêche opérant dans les eaux du Sénégal, de la Guinée et de la Guinée Bissau. Au Sénégal, le premier cas avéré d’une telle fraude au tonnage date de 1988. Pour la seule année 2014, le tonnage brut sous-déclaré équivalait à l’ajout, dans les eaux de ces trois pays ouest-africains, de 22 navires de pêche industrielle de 300 TB chacun. L'absence de systèmes efficaces de gestion des pêches en Afrique de l'Ouest a permis à ces entreprises de piller, à faible coût et dans une quasi-impunité, les ressources marines de l'Afrique. Telles sont les révélations contenues dans le nouveau rapport de Greenpeace Afrique publié aujourd'hui à Dakar.

Intitulé « Razzia sur les côtes africaines: la face cachée de la pêche chinoise et de ses sociétés mixtes au Sénégal, en Guinée et en Guinée-Bissau », le rapport démontre comment la CNFC et une autre entreprise chinoise du nom de Dalian Lian Run se sont livrées à des déclarations frauduleuses sur le tonnage brut de leurs navires de pêche. La fraude au tonnage implique aussi bien des navires battant pavillon chinois que ceux battant d’autres pavillons y compris africains, dans le cadre de sociétés mixtes. Par exemple, la CNFC possède 12 navires qui pêchent dans les eaux sénégalaises grâce à une entreprise mixte du nom de Sénégal Armement S.A.

« En sous-déclarant le tonnage brut de leurs navires de pêche, ces compagnies privent les Etats côtiers d’importants revenus financiers et compromettent tout espoir de gestion durable et équitable des pêcheries dont la situation est déjà très préoccupante. Nos pêcheurs artisans ne cessent de se plaindre de leurs maigres prises ainsi que des coûts et charges de travail élevés, incapables de faire face à la concurrence des navires industriels», soutient Ahmed Diamé, Chargé de Campagne Océans à Greenpeace Afrique.

La sous-déclaration du tonnage brut d’un navire constitue une infraction punie par les lois du Sénégal, de la Guinée, de la Guinée Bissau et de la Chine. En outre, cette pratique entre dans la définition de la pêche illicite telle que stipulée dans le Plan d’action international de l’Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture (FAO), visant à prévenir, à contrecarrer et à éliminer la pêche illicite, non déclarée et non réglementée.

Rien qu’au Sénégal, entre 2000 et 2014, le manque à gagner occasionné par les licences non payées par la CNFC a été estimé à plus de 371 404 800 FCFA (566,203 Euros). Les pertes réelles sont, elles, probablement beaucoup plus importantes car ce chiffre ne concerne que les 15 dernières années sur les 30 ans d'opérations de la CNFC au Sénégal et ne s’applique qu’aux navires pour lesquels Greenpeace Afrique a pu estimer le TB réel. De plus, cette estimation ne tient compte ni de l’impact de cette fraude sur les écosystèmes ni de la valeur du poisson pêché illégalement par la CNFC grâce à un accès indu aux zones de pêche côtières essentielles pour la pêche artisanale et la subsistance des communautés locales.

«Il est important que les gouvernements du Sénégal, de la Guinée et de la Guinée Bissau fassent toute la lumière sur cette affaire, que les responsabilités soient identifiées et que des mesures correctrices soient prises pour assurer le futur de la pêche et des populations qui en dépendent. Il est grand temps que la transparence dans les activités de pêche en Afrique de l’ouest, promise de longue date par les gouvernements concernés, devienne réalité afin que les entreprises de pêche peu scrupuleuses cessent d’opérer. Il est notamment urgent et impératif, qu’une liste des navires autorisés à pêcher dans les eaux ouest-africaines et leurs spécifications techniques soit publiée par les Etats respectifs » conclut M. Diamé.

Bien que, sur la base d’informations limitées, le document expose une pratique commune au Sénégal, à la Guinée et à la Guinée Bissau, la fraude au tonnage s’étend probablement au-delà de ces trois pays. Le rapport de Greenpeace Afrique met également en lumière les responsabilités juridiques de la Chine et des pays ouest-africains, en tant qu’Etat côtiers et/ou Etats de pavillon, où ces navires opèrent.

"Nous sommes convaincus qu’au moment même où nous parlons, cette fraude au tonnage a cours sur nos côtes. Sachant que les prises des entreprises chinoises sont commercialisées, entre autres, sur les marchés européens, l’on voit bien l’étendue des lacunes dans la lutte contre le commerce de poissons capturés illégalement", a ajouté Ahmed Diamé.

Le fait que la fraude au tonnage perdure depuis si longtemps met en évidence l'absence de contrôle par les autorités de nos pays et le besoin urgent d'un contrôle plus strict par les États côtiers ouest-africains des navires autorisés à opérer dans leurs eaux ou sous leur propre pavillon.

"Cela fait trop longtemps que l'Afrique souffre des activités de pêche illégale, cette pratique doit s’arrêter définitivement», a conclu Ahmed Diamé.


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Notes de l’Éditeur :

(1) Lien du rapport: Arnaque sur les côtes Africaines.PDF et le RESUME EXECUTIF.

(2) La perte de revenus occasionnée par la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (INN) est estimée entre 10 et 23,5 milliards de U$D au niveau mondial et à 937 millions de U$D dans les ZEE de l'Afrique subsaharienne. Les pays en développement sont les plus touchés, avec des captures totales estimées en Afrique de l'Ouest de 40% plus élevés que les captures déclarées.

(3) La CNFC est la plus grande entreprise de pêche lointaine de la Chine, et la plus grande compagnie de pêche évoluant en Afrique de l'Ouest.

La CNFC est fortement subventionnée par le gouvernement chinois. Jusqu'en 2013, la CNFC exploitait 345 navires de pêche lointaine, environ 16% de la flotte DWF de la Chine. La compagnie a au moins 20 entreprises en propriété exclusive ou conjointe en Asie, Europe, Afrique et Amérique du Sud et est engagée dans la pêche, la transformation et la vente dans 10 pays africains.

(4) D'autres chiffres importants sur la fraude au tonnage au Sénégal

- De 2000 à 2014, la CNFC a sous-déclaré le TB de ses navires aux autorités sénégalaises de 43% en moyenne par an par rapport à leur TB réel. Pour la seule année 2014, la CNFC a frauduleusement dissimulé un total de 1 742 TB , l'équivalent de six grands navires de pêche industrielle de 300 TB chacun.

- La première et la plus flagrante preuve de la fraude au tonnage de la CNFC au Sénégal remonte à 1988. Selon les documents officiels, le navire de pêche de la CNFC, Soachip 11, qui a changé de pavillon de la Chine vers le Sénégal en 1988, a été déclarée avec un TB 54.8 % inférieur à celui d'origine.

(5) Autres constatations importantes sur la fraude au tonnage en Guinée et en Guinée-Bissau

- Selon les termes et conditions prévus par l’accord de pêche signé entre la CNFC et la Guinée Bissau, le 28 Juin 2010, il apparaît que, pour le seul premier semestre de 2014, la capacité réelle des navires de la CNFC a dépassé la limite de la capacité autorisée de 61%

- Dalian Lian Run Overseas Fishery Corp (Lian Run): Des TB incohérents ont été trouvés pour 19 de ses 24 navires opérant en Guinée et en Guinée Bissau en 2014, et en Guinée en 2013. Les recherches menées par Greenpeace Afrique montre également que la société a changé le TB déclaré pour 6 de ces 19 navires quand ils ont été déplacés de la Guinée vers la Guinée-Bissau, ainsi que le TB des navires qui ont continué à pêcher en Guinée en 2014 (voir tableau 4).

Contact :

Bakary Coulibaly, Chargé de communication Campagne Océans, Greenpeace Afrique ; Email: bkouliba@greenpeace.org; Mobile: +221773336265

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