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AfricaFrance se prend les pieds dans la jungle congolaise Par Fanny Pigeaud Mediapart
La nouvelle fondation voulue par François Hollande et Laurent Fabius pour établir un « nouveau partenariat africain de la France » a commencé par financer un projet d'exploitation forestière aux vieux relents de Françafrique. Mauvais départ.
Simple faux pas ou problème plus profond ? La toute nouvelle fondation AfricaFrance, voulue par François Hollande, fait ses débuts en exhalant un léger parfum de Françafrique. Elle devait pourtant permettre de tourner la page de ces relations opaques entre dirigeants français et africains, mêlant intérêts privés et publics. C'est du moins ce que certains commentateurs annonçaient.
AfricaFrance est avant tout un « réseau social », dit souvent son président, Lionel Zinsou, co-auteur du rapport Védrine, et par ailleurs ancien conseiller de Laurent Fabius et du président béninois Yayi Boni et actuel dirigeant du fonds d’investissement PAI Partners. Sauf que le même Zinsou vient tout juste d'être nommé... premier ministre du Bénin ! Certains voyant déjà dans cette nomination un tremplin vers la présidence du pays.
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Mi-mars 2015, à l’occasion du lancement, à Brazzaville, d’AfricaFrance Congo, « association miroir », plusieurs responsables d’AfricaFrance ont assisté à la signature d’un « accord témoin » entre une entreprise vendéenne, Le Duramen, et une société congolaise, General Trading Company (GTC). Ces deux opérateurs ont prévu de monter une « unité de préfabrication de bâtiments en bois » au Congo, pays forestier. Le ministre congolais des transports, de l'aviation civile et de la marine marchande, Rodolphe Adada, était présent. Il a annoncé le soutien du gouvernement congolais à cette « approche novatrice », selon le site web du ministère de son collègue Jean-Jacques Bouya, chargé de l’aménagement du territoire et de la délégation générale aux grands travaux. Bouya a participé lui aussi à l’événement : il est président d’honneur de AfricaFrance Congo. Quelques semaines auparavant, AfricaFrance avait rendu compte de la visite en Vendée de la partie congolaise, se réjouissant des avancées de ce « premier dossier porté par la Fondation AfricaFrance à Nantes ».
Mais, petit détail gênant relevé par un chercheur indépendant, Arnaud Labrousse, spécialiste du secteur forestier dans les pays du bassin du Congo : l’entreprise congolaise impliquée appartient à Arnaud et Michel Djombo, fils d’un ministre congolais, Henri Djombo. Celui-ci a plusieurs particularités. Il est, selon des diplomates américains, « extrêmement proche » du président congolais Denis Sassou Nguesso et l'un des ministres les plus puissants.
Dans le passé, Henri Djombo aurait été l'un des chefs des Cobras « qui combattaient du côté de Sassou Nguesso pendant la guerre civile de 1997-1999 ». Il est surtout en charge de l’économie forestière depuis 1997. La forêt qui recouvre la moitié du Congo représente une ressource importante : le bois est le second produit d’exportation du pays, après le pétrole. Ce sont cependant surtout les gros exploitants forestiers, majoritairement étrangers, qui en tirent des bénéfices, en commettant au passage de nombreuses illégalités : le centre de recherche britannique Chatham House a noté en 2014 que le secteur forestier connaissait « de graves problèmes de gouvernance, manifestes dans les niveaux estimatifs d’exploitation illégale des forêts à l’intérieur du Congo, qui pourraient atteindre 70% ». Chatham House soulignait aussi : « Le problème de l’exploitation illégale des forêts n’a reçu du gouvernement congolais qu’une piètre réponse. Très peu des politiques et règlements nécessaires pour veiller à une bonne gouvernance forestière sont actuellement appliqués....