Malgré la victoire du Brexit au référendum au Royaume-Uni, le déploiement de 500 soldats britanniques en Estonie et de 150 autres en Pologne est annoncé à titre de réponse à "l'énorme pression que la Russie exerce sur la frontière, volant dans l’espace aérien des pays voisins".
Deux semaines à peine après le Brexit, le secrétaire à la Défense du Royaume-Uni, Michael Fallon, a annoncé le déploiement d’un bataillon de 500 soldats britanniques en Estonie et de 150 autres en Pologne pour "rassurer" ces pays face à la menace à l’est et confirmer l'engagement de Londres envers l'Otan et les Etats-Unis.
"Cette espèce d’annonce britannique (…) compense en fait effectivement les effets du Brexit par rapport à l’Union européenne et entend réaffirmer le principe d’alliance bilatérale Grande-Bretagne et Etats-Unis", a déclaré à Sputnik le journaliste et essayiste français Richard Labévière, rédacteur en chef de la revue Défense.
Selon M.Labévière, avec la fin de la guerre froide et le démantèlement du pacte de Varsovie, l’Otan aurait dû, elle aussi, être démantelée, mais cela n’a pas été fait.
"Les Américains ont voulu conserver l’Otan pour engranger les dividendes de la guerre froide et continuer à utiliser l’Alliance pour principalement les intérêts des Etats-Unis", a souligné l'expert.
De son côté, Guillaume Lagane, haut fonctionnaire et maître de conférences à Sciences Po Paris, a commenté pour Sputnik cette décision britannique qui semble plutôt paradoxale alors qu'on reparle d’une armée européenne.
"On ne voit cependant pas très bien comment l’Europe pourrait avoir une armée commune sans politique étrangère commune. C’est la quadrature du cercle. Pour avoir une armée, des forces armées européennes faudrait-il être d’accord sur les options en matière de politique étrangère (…). Ce n’est pas le cas", a déclaré l'interlocuteur de l'agence.
Selon ce dernier, l'UE n’est absolument pas du tout une union politique mais simplement un marché unique.
"Ce déploiement dans les pays baltes et en Europe centrale est assez grotesque dans la mesure où on ne voit pas très bien d’où vient la menace dans la mesure où ça c’est une paranoïa qui date de la guerre froide et qui est entretenue à la fois par les autorités polonaises et les autorités des pays baltes", a relevé l'expert.
Et d'ajouter qu'on voyait bien que les pays baltes comme la Pologne continuaient à exagérer cette menace pour obtenir non seulement des aides militaires mais aussi d’autres compensations sur le plan économique, financier, politique.
"Dans quelle mesure a-t-on besoin d’affirmer une menace imminente alors qu’on pouvait tout à fait, nous, Européens, entretenir une relation diplomatique avec la Russie qui soit beaucoup plus normale et qui soit rénovée", a signalé M.Lagane.
Les analystes concluent qu'un déploiement permanent de troupes alliées dans les pays baltes risque d'entrer en contradiction avec les dispositions de l'accord Russie-Otan en vertu duquel la région concernée ne doit pas abriter de bases militaires permanentes de l'Otan. Par ailleurs, ils supposent que face à l'attitude de plus en plus agressive de l’Alliance, dominée par les Etats-Unis, l’idée d’une défense européenne autonome semble plus que jamais d'actualité.