L'eurodéputée libérale Sophie in ’t Veld bataille contre le virage sécuritaire français. Elle a déposé deux recours devant le Conseil d’État, pour contester la loi sur la surveillance internationale adoptée l’an dernier.
De notre envoyé spécial à Bruxelles.- Le ministre de l’intérieur Bernard Cazeneuve ne sera sans doute pas surpris de la démarche, lui qui s’est souvent fait bousculer par des élus lors de ses déplacements au parlement européen de Strasbourg. Une eurodéputée libérale néerlandaise a décidé d’engager un bras de fer judiciaire avec la France pour contester la loi sur la surveillance internationale adoptée l’an dernier. « Je trouve cela normal, et plutôt sain en démocratie, d’utiliser tous les instruments à ma disposition, lorsque j’estime que l’État de droit est en danger », explique à Mediapart Sophie in ’t Veld.
Cette figure du parti proeuropéen D66, très connue à Strasbourg pour son activisme en matière de défense des libertés publiques, a déposé le 8 septembre deux recours devant le Conseil d’État. D’un côté, un « recours en vérification », sur le fond, qui porte sur la légalité des mesures de surveillance déployées en France. De l’autre, un « recours en excès de pouvoir », plus technique, qui questionne le « refus implicite », selon elle, de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR), déjà sollicitée par l’eurodéputée en mai 2016, de prendre position sur le dossier.
Mediapart publie en intégralité les deux mémoires déposés le 13 novembre au Conseil d’État, pour chacun des recours (lire les deux documents page 2). Les services du premier ministre Manuel Valls ont désormais un mois à partir de cette date, soit d’ici à mi-décembre, pour faire valoir leurs arguments dans des contre-mémoires, avant de passer aux audiences. Depuis la vague d'attentats qui a frappé la France en 2015, certains diplomates européens et autres eurodéputés s'interrogent, le plus souvent en off, sur l'efficacité et les risques politiques du virage sécuritaire français. Mais c'est la première fois, avec l'initiative de Sophie in 't Veld [photo ci-dessous], que la loi sur le renseignement se trouve aussi explicitement contestée depuis Bruxelles...