La face cachée de «Marianne»
Par Laurent Mauduit
Mediapart
Le journal Marianne est au plus mal. Au plan économique, puisqu’il est en redressement judiciaire. Mais aussi au plan éthique. Financements cachés de Bernard-Henri Lévy - contesté par l'intéressé- en contrepartie d’articles avantageux ; censure du cinéaste Bertrand Tavernier pour protéger un banquier ; intrusion dans les messageries électroniques : notre enquête sur un journal à la dérive.
C’est un méchant retournement de l’histoire. Le magazine Marianne s’est depuis longtemps fait la spécialité de se moquer des baronnies dans la presse, de ses mœurs courtisanes ou oligarchiques, des systèmes de connivence dans lesquels trop souvent elle s’englue, de son indécrottable parisianisme. Mais le voici aujourd’hui devenu la caricature de ce qu’il dénonçait hier. Car, pour le plus grand malheur d’une rédaction qui est, dans ses grandes composantes, attachée aux valeurs déontologiques et citoyennes du journalisme, il est entraîné, par la petite camarilla qui le dirige, et par son actionnaire Yves de Chaisemartin – l’ancien homme fort du Figaro du temps de Robert Hersant –, vers un inéluctable naufrage. Et l’on aurait tort de penser que le naufrage n’est qu’économique, avec pour dernier rebondissement en date un placement sous procédure de sauvegarde. Non ! Si l’on parvient à percer les petits secrets de l’hebdo, on a tôt fait de comprendre que le naufrage a des causes multiples : il est aussi éthique et moral...