Il existe de solides preuves que les forces d'opérations spéciales étatsuniennes ont massacré des civils en Somalie
Article originel : Strong Evidence that U.S. Special Operations Forces Massacred Civilians in Somalia
Par Christina Goldbaum
Daily Beast, 29.11.17
Traduction SLT
Une enquête menée par The Daily Beast sur le terrain en Somalie semble confirmer que des soldats étatsuniens ont été impliqués directement dans la mort de 10 civils innocents.
Mise à jour avec la réponse du ministère de la Défense, 13 h 30 , 29 novembre 2017.
Mogadiscio, Somalie - Il était environ cinq heures du matin quand Abdullahi Elmi a entendu les coups de feu. Assis dans sa petite maison de Bariire, dans le sud de la Somalie, l'administrateur de la ferme avait enregistré les noms des ouvriers qui avaient travaillé la veille. Des piles de livres comptables s'étalaient sur le sol autour de lui. De l'autre côté de la pièce, sa femme était assise avec leur fils de 3 ans qui s'endormait pendant que sa mère le berçait dans ses bras.
Quand le bruit des coups de feu a commencé, Abdullahi a pensé qu'ils étaient trop loin pour se diriger vers sa ferme. Mais en l'espace de quelques secondes, ils semblaient devenir plus bruyants et plus proches, Abdullahi et sa femme, portant leur jeune fils, sont alors partis courir dans la forêt voisine de bananiers en quête de sécurité.
Se réfugiant sous les longues feuilles, Abdullahi rencontra son voisin Goomey Hassan, qui avait également sprinté dans la bananeraie avec sa femme lorsqu'il entendit la série de coups de feu. Les deux familles ont attendu 20 minutes avant de décider qu'il n'y avait pas de danger pour rentrer et ont commencé à marcher prudemment jusqu'à leur maison, Abdullahi et Goomey faisant attention à marcher devant leur femme au cas où les coups de feu reviendraient.
Alors que les femmes entraient dans leurs maisons, les deux hommes se tenaient dehors pour voir ce qui s'était passé, apercevant finalement des soldats de l'Armée nationale somalienne marchant au loin. Abdullahi a d'abord été soulagé, l'armée nationale doit être venue pour empêcher leur clan rival d'attaquer leur ferme, pensa-t-il. Mais lorsque les soldats aperçurent les hommes, ils levèrent leurs armes et ordonnèrent à Hassan et Elmi de se mettre à terre.
"Le sang d'une blessure par balle a coulé dans la terre autour de lui."
"J'ai levé les mains en l'air et ils nous ont dit que nous étions en état d'arrestation, puis j'ai entendu le bruit de leurs grosses voitures et je savais que c'était plus qu'un combat de clan ", a déclaré Elmi. Ils ont dit à ma femme de rentrer chez nous, puis ils sont entrés pour fouiller. Je les suppliais de ne rien prendre."
Lorsque les soldats ont terminé leurs recherches, ils ont ordonné aux hommes de se déplacer avec eux vers la scène de la fusillade. Là, Abdullahi et Goomey ont vu le corps de leurs compagnons de ferme s'étaler sur le sol. Le petit pot que l'un d'entre eux utilisait pour faire du thé restait debout près des cadavres. Et ils ont aussi vu ce qu'ils estimèrent être une vingtaine de soldats étatsuniens debout autour des corps. Un soldat de l'Armée nationale somalienne qui se trouvait sur les lieux a estimé qu'il y avait entre 10 et 12 Etatsuniens. Abdullahi sentit sa poitrine se resserrer quand il entendit son ami Ali-waay appeler à l'aide, alors que le sang d'une blessure par balle coulait dans la terre autour de lui.
Un des soldats somaliens a ordonné à Abdullahi de poser la tête sur le sol. Le bas d'une botte appartenant à un soldat étatsunien le maintenait là.
L'OPÉRATION DES ÉTATS-UNIS en date du 25 août aurait entraîné la mort de 10 civils, dont au moins un enfant, et serait la plus grande tache sur les opérations terrestres étatsuniennes depuis le tristement célèbre incident du Black Hawk Down en 1993.
Dans la foulée de l'opération, des centaines de personnes dans la ville voisine d'Afgoye ont envahi les rues de la ville, réclamant justice pour les personnes tuées, et les survivants de la ferme ont refusé d'enterrer leurs morts jusqu'à ce que le gouvernement somalien se rétracte sur ses allégations qu'ils étaient membres d'Al Shabaab et présente des excuses.
The Daily Beast a mené une enquête sur l'opération Bariire et ses suites, interrogeant trois survivants de l'opération par téléphone depuis Mogadiscio et rencontrant en personne le commandant de l'Armée nationale somalienne en charge des soldats somaliens qui ont participé à l'opération sous le commandement de soldats des Forces d'opérations spéciales étatsuniennes.
Le Daily Beast a également rencontré à Mogadiscio plus de deux douzaines d'agents des services de renseignements somaliens, d'analystes politiques, de dirigeants locaux et d'anciens et actuels représentants du gouvernement qui connaissent bien l'incident. Deux de ces personnes participent également à une enquête locale non parrainée par le gouvernement sur l'incident.
The Daily Beast a également rencontré en personne le commandant des Forces de défense du peuple ougandais, dont le mandat au sein de la force de maintien de la paix des Nations Unies inclut Bariire, et qui a été approché par les Etatsuniens au sujet de leur projet de reprendre Bariire.
La grande majorité de ces sources préféraient parler de façon anonyme, soit parce qu'elles n'étaient pas autorisées à discuter de l'incident, soit parce qu'elles craignaient de possibles représailles de la part du gouvernement fédéral somalien ou des Etatsuniens.
Les détails qui en ressortent brossent un tableau accablant d'au moins une opération terrestre étatsunienne dans ce pays africain. Il s'agit notamment d'opérateurs spéciaux étatsuniens qui tirent sur des civils non armés, utilisent des renseignements humains provenant de sources généralement considérées comme dignes de confiance par les Somaliens dans la région ainsi que par des responsables gouvernementaux, et ordonnent à leurs homologues somaliens de collecter les armes qui étaient stockées dans un foyer ... et les placent à côté des corps des personnes tuées avant de les photographier. Au lendemain de l'incident, selon nos sources, des diplomates étatsuniens ont également fait pression sur le gouvernement somalien pour qu'il enterre les conclusions défavorables d'une enquête menée par le gouvernement fédéral somalien.
Quelques heures après l'opération, l'Africom a publié une déclaration indiquant qu'elle était au courant des allégations de pertes civiles dans l'opération et que l'Africom effectuait "une évaluation de la situation afin de déterminer les faits sur le terrain" Le communiqué de presse de l'Africom indiquait également que "l'armée nationale somalienne menait une opération dans la région avec les forces étatsuniennes dans un rôle de soutien".
Pourtant, la majorité des douilles de balles ramassées dans la ferme attaquée, qui ont été vues par The Daily Beast, provenaient d'armes de l'armée nationale étatsunienne, et non somalienne. Cela semble confirmer que l'équipe des opérations spéciales n'a pas commandé l'Armée nationale somalienne (ANS) tout en restant en arrière pendant l'opération, comme la déclaration de l'Africom voudrait le faire croire au public, mais qu'elle était plutôt responsable des tirs et du meurtre de civils non armés.
Selon le Commandant Audricia Harris, porte-parole du ministère de la Défense, "cet incident fait toujours l'objet d'une enquête" et la Défense nationale ne peut pas commenter les détails de l'emploi des forces d'opérations spéciales étatsuniennes. Elle a noté que les opérations spéciales étatsuniennes" prennent toutes les mesures nécessaires au cours du processus de ciblage pour éviter ou réduire au minimum les pertes civiles ou les dommages collatéraux et pour se conformer aux principes du droit des conflits armés" (la liste complète des questions et des réponses peut être consultée ici ?)
Les détails entourant la planification de cet incident recueillis par The Daily Beast suggèrent toutefois que les Forces d'opérations spéciales US impliquées dans cette mission n'ont pas suffisamment examiné les informations qui leur ont été présentées avant d'effectuer cette opération.
La région de la Basse Shabelle a longtemps été un point névralgique dans les décennies de conflit somalien, avec la ville de Bariire en son centre. La région est l'une des régions les plus fertiles du paysage somalien, par ailleurs aride : les agriculteurs y cultivent des champs verts de bananes, de mangues et de tomates, qui s'étendent parallèlement au fleuve Shabelle, tandis que des hommes d'affaires vendent les produits dans la capitale voisine, Mogadiscio.
Mais la même luxuriance qui rend la région attrayante pour les agriculteurs en fait également un lieu de prédilection pour Al Shabaab : les récoltes abondantes sont mûres pour l'imposition, la végétation est propice à se mettre à l'abri de la surveillance des drones, et la rivière Shabelle crée une barrière naturelle entre Al Shabaab et les forces ennemies, tandis que ses ponts créent des opportunités pour les attaques éclair d'Al Shabaab.
Le groupe extrémiste islamique exerce un contrôle sporadique sur l'ensemble de la région depuis janvier 2009, lorsque les forces éthiopiennes qui avaient aidé à évincer l'Union des tribunaux islamiques, une confédération de tribunaux de la charia qui avait pris le pouvoir dans le sud de la Somalie en 2006, se sont retirées de la région. Bien qu'au cours des années qui ont suivi la Mission de maintien de la paix de l'Union africaine en Somalie ou l'AMISOM ait repris quelques grandes villes et établi des bases d'opérations avancées dans toute la Basse-Shabelle, la région demeure l'une des dernières grandes étendues de territoire où Al Shabaab conserve des poches de contrôle.
Pendant des années, le cœur de la domination d'Al Shabaab dans la région de la Basse-Shabelle près de Mogadiscio se trouvait dans la ville de Bariire, située à seulement 45 kilomètres de la capitale. De cette ville, le groupe a dirigé des tribunaux pour appliquer la charia dans la région et a organisé des attaques menées à Mogadiscio. Selon le Ministre du Parlement Ahmed Moalim Fiqi, la ville avait agi comme "petite capitale" d'Al Shabaab près de Mogadiscio. [Bariire] est devenu un cauchemar pour le gouvernement somalien et a créé des problèmes pour les partenaires somaliens en matière de sécurité ", explique M. Fiqi. Chaque rapport de sécurité que le[Comité de sécurité du Parlement somalien] recevait, Bariire y était inclus.
"Les Etatsuniens semblaient ignorer que dans cette vaste région boisée, Al Shabaab n'est pas le seul facteur contribuant à l'instabilité."
Et le Parlement somalien n'était pas le seul à prendre note de Bariire. Les opérateurs spéciaux étatsuniens ont également reconnu l'importance stratégique de la ville, raison pour laquelle ils ont contacté en juillet de cette année la Force de défense populaire ougandaise ou Brigade UPDF. Le Général Kayanja Muhanga, dont les responsabilités au sein de l'AMISOM comprennent la Basse-Shabelle, au sujet d'un plan qu'ils avaient élaboré pour reprendre la ville de Bariire et la région environnante. Contrairement aux opérations étatsuniennes des années précédentes, cette campagne ne consisterait pas en des frappes aériennes ou des raids ciblés, qui ont tous deux connu un succès relatif en Somalie. Au lieu de cela, les États-Unis voulaient conserver les terres qu'ils allaient capturer et fournir un soutien intermittent sur le terrain à la force locale chargée de maintenir le contrôle du territoire.
Selon le Général de Brigade Muhanga, les Etatsuniens demandaient au Département d'État de leur fournir du matériel pour construire des bases d'opérations avancées, telles que des chenilles et des niveleuses, à partir d'une base de l'AMISOM voisine, ainsi que des troupes de l'UPDF qui seraient à nouveau chargées auprès de l'Armée nationale somalienne de maintenir le terrain à Bariire et au-delà. Le général des FDPO doutait de ce plan. Ses troupes étaient déjà débordées dans toute la région; non seulement elles ne seraient pas en mesure d'assurer une sécurité suffisante pour le matériel de construction de la FOB (Forward Operating Base : Base opérationnelle avancée ou BAO), mais il se demandait s'il pouvait prêter suffisamment de troupes pour tenir une nouvelle BOA avec l'Armée nationale somalienne, qu'il savait sous-équipée et probablement incapable de tenir elle-même des avant-postes.
Et en plus d'une planification imprudente de l'opération en cale sèche, les Etatsuniens ne semblent malheureusement pas savoir que dans cette vaste région riche en forêts, Al Shabaab n'est pas le seul facteur contribuant à l'instabilité. Le conflit en cours entre les clans somaliens, principalement les Habar Gidr et Biyomal, complique encore davantage le paysage sécuritaire. La rivalité entre eux, comme la plupart des conflits claniques dans le pays, tourne autour de la terre et, avec l'émergence d'un État somalien qui fonctionne, du pouvoir.
Bien que les alliances claniques et les conflits claniques s'étendent sur des siècles, la flambée actuelle dans la région de la Basse-Shabelle remonte à cinq ans, lorsque Biyomal et Habar Gidr ont repris le combat sur la terre majoritairement contrôlée par Habar-Gidr. Le Biyomal, un petit clan qui vivait traditionnellement dans la Basse-Shabelle, affirme que la terre leur appartient de plein droit étant donné leur présence historique dans la région, tandis que le Habar Gidr a commencé à migrer vers le sud vers la Basse-Shabelle fertile dans les années 1990 lorsque la guerre civile a éclaté et que leur clan a gagné de l'autorité dans la région. Ils soutiennent qu'après avoir vécu sur la terre pendant des décennies, ils peuvent légitimement la considérer comme la leur.
Mais contrairement aux siècles passés, les conflits claniques en Somalie moderne ont été compliqués d'abord par Al Shabaab, puis par la présence de l'AMISOM, des opérations spéciales étatsuniennes et d'autres forces militaires étrangères opérant dans le pays.
Depuis la création d'Al Shabaab en 2007, le groupe a prospéré grâce à des conflits locaux, offrant un soutien aux milices dans leurs guerres de clans en échange de leur puissance de feu lorsque Al Shabaab affronte les forces gouvernementales. Mais les agriculteurs de la région, qui ne font pas partie de ces milices, bien qu'ils soient souvent armés pour protéger leurs terres et leur bétail, n'ont pas autant de chance. Lorsque leur territoire est repris par Al Shabaab, ils n'ont pas le choix : soit accepter de payer des impôts au groupe et de vivre sous leur autorité, soit risquer le désarmement et la mort.
Ce modus operandi crée un paysage militaire prêtant à confusion, où la distinction entre militants d'Al Shabaab et agriculteurs armés dans les territoires contrôlés par Al Shabaab exige des renseignements précis, impartiaux et sur le terrain.
Pourtant, parce que les forces armées étrangères, y compris les opérations spéciales des États-Unis, dépendent souvent soit de milices claniques, soit des forces de sécurité somaliennes qui ont incorporé certaines de ces milices dans leurs rangs, pour obtenir des renseignements humains, les membres du clan ont amplement l'occasion de qualifier faussement leurs rivaux d'"Al Shabaab" et d'obtenir le soutien des forces étrangères, et de leurs armes beaucoup plus sophistiquées, dans leurs propres guerres claniques.
Lorsque le commandant de l'UPDF, conscient des difficultés du terrain et de ce type d'opération, a rejeté la demande de soutien des Etatsuniens à l'UPDF et leur a déconseillé de participer à la mission, les Etatsuniens se sont alors tournés vers la 20e brigade de l'Armée nationale somalienne, ce qui n'était qui ne ressemblait guère à une armée.
"Ces Etatsuniens sont nos amis, mais ils sont venus en se précipitant dans des opérations sans analyser les capacités de l'armée nationale somalienne."
UPDF Brigade. Général Kayanja Muhanga
"J'ai dit aux Etatsuniens que l'armée nationale somalienne ne pouvait pas tenir le coup, qu'ils n'avaient pas les armes pour tenir le coup ", a déclaré le Général Muhanga. "Ces Etatsuniens sont nos amis, mais ils sont venus en hâte dans les opérations sans comprendre la capacité de l'armée nationale somalienne (ANS) parce qu'ils voulaient faire quelque chose par eux-mêmes."
Contrairement à l'unité des forces spéciales de l'ANS, Danab, qui a été formée par les Etatsuniens pour opérer à leurs côtés dans des opérations au sol, la brigade de l'ANS que cette équipe étatsunienne a approchée n'avait jamais été formée par les États-Unis. mais était également dirigée par un ancien commandant d'Al Shabaab, Sheegow Ahmed Ali, qui avait travaillé en étroite collaboration avec la milice Biyomal dans la région, dirigée par Abdullahi Ali Ahmed, également connu sous le nom de "Wafo", avant cette opération.
Les Etatsuniens ont apparemment travaillé avec eux, ignorant à la fois la dynamique clanique opposant la milice de Wafo aux hommes du clan Habargidir comme ceux de la ferme et de l'existence d'une plainte, obtenue par The Daily Beast, déposée par le comité des anciens de la communauté de Basse-Shabelle auprès du président régional, du ministre de l'Intérieur, de la mission des Nations Unies, de l'ambassade des États-Unis, de l'Union européenne. L'an dernier, la délégation et le représentant de l'Union africaine ont parlé de la milice biyomale de Wafo qui attaque des civils et utilise à cette fin la protection de l'AMISOM. La lettre indiquait que "l'AMISOM héberge et fournit un soutien logistique aux milices biyomales... alors que la milice biyomale brûle des fermes, pille des biens et tue des civils innocents sans discrimination (aînés, enfants, femmes et jeunes) sous la protection de l'AMISOM dans leurs casernes".
The Daily Beast a également appris par de nombreux responsables du gouvernement et de la sécurité somaliens que les Etatsuniens utilisaient un traducteur qui aurait manipulé les forces des États-Unis.
Le traducteur, connu sous le nom de Bachir, avait été impliqué dans une opération en 2016 à Galkayo, dans le nord de la Somalie, au cours de laquelle un drone étatsunien a frappé 22 membres d'une milice locale qui travaillait en collaboration avec les forces étatsuniennes, selon le Bureau du journalisme d'investigation. Après l'incident, beaucoup croyaient que Bashir était complice en fournissant des renseignements inexacts aux forces étatsuniennes parce que la force locale provenait d'un clan rival au sien. Étant donné que sa femme est issue du clan Biyomal, de nombreux suspects ont soupçonné Bachir d'avoir aidé à convaincre les Etatsuniens que les Habar Gidr de la ferme étaient également des Al Shabaab, bien que la raison pour laquelle les États-Unis ont utilisé un traducteur soupçonné de les manipuler pour tuer des combattants non Al Shabaab n'est pas claire.
"Nous ne croyons pas que les Etatsuniens aient l'intention de nous tuer, ils n'ont pas l'intention de soutenir un clan contre un autre ", affirme Ali Osman Diblawe, l'un des agriculteurs qui a été attaqué pendant l'opération. Mais le clan Biyomal a utilisé la désinformation et la propagande pour nous tuer à tort. Ils ont persuadé le gouvernement somalien et les Etatsuniens que nous appartenions aux Al Shabaab, ce qui n'est pas le cas."
La FERME DE DIBLAWE est située sur l'une des lignes de faille de la Basse-Shabelle où se rencontrent les soldats du gouvernement et les militants d'Al Shabaab.
Six jours avant l'opération sur sa ferme, les combats s'étaient tellement rapprochés de son village que lui et d'autres fermiers s'étaient enfuis, revenant chez eux un jour plus tard, lorsque la fumée s'était dissipée et que les militants d'Al Shabaab avaient quitté la région.
Les combats qu'il entendit avec d'autres villageois se déroulaient dans la ville de Bariire, où, même sans le soutien des UPDF (forces armées ougandaises), l'équipe des opérations spéciales étatsunienne avait commencé sa campagne pour reprendre et tenir d'abord Bariire, puis les environs, selon le général Muhanga. Au début, la stratégie semblait fonctionner : l'équipe étatsunienne et de l'armée nationale somalienne ont repris Bariire avec succès et installé quatre avant-postes à chaque coin de la ville pour arrêter Al Shabaab comme prévu.
Avec leur ferme à un kilomètre seulement de la ville de Bariire, qui semble maintenant sous le contrôle du gouvernement, Diblawe a décidé de rencontrer l'ANS à Bariire et d'expliquer le conflit clanique en cours dans la région presque libérée. Diblawe et certains de ses compatriotes villageois possédaient des armes légères, pour la plupart de vieux AK-47, pour protéger leurs terres contre les Biyomal, qu'il craignait que l'ANS n'interprète à tort comme le fait que ces agriculteurs soient des combattants d'Al Shabaab.
Diblawe a marché avec un ami et compagnon de village, Ali-waay, jusqu' à la ville de Bariire où il a rencontré le général Sheegow. Sheegow, un homme rotonde d'environ cinq pieds cinq pouces cinq, ne donna pas à Diblawe l'impression d'un commandant militaire redouté.
Mais un aperçu de la vie du jeune homme de 56 ans avant son entrée dans l'Armée nationale somalienne prouve le contraire. Avant 2012, Sheegow était un commandant d'Al Shabaab qui a déféré aux forces gouvernementales avec entre 50 et 100 de ses combattants. Mais la plupart des gens soupçonnent qu'il s'agit d'une défection née de la crainte d'être capturée imminente par les troupes gouvernementales somaliennes plutôt que d'un changement d'avis. La première bataille de sa brigade s'est déroulée avec Al Shabaab sous le drapeau du SCN, perdus avec un certain nombre d'armes et de véhicules militaires tombés entre les mains d'Al Shabaab. L'incident a soulevé des questions sur la question de savoir si le général s'était égaré volontairement pour tenter de continuer à soutenir le groupe extrémiste.
Diblawe a marché avec un ami et compagnon de village, Ali-waay, jusqu' à la ville de Bariire où il a rencontré le général Sheegow. Sheegow, un homme enveloppé d'environ 1m70, ne donna pas à Diblawe l'impression d'un commandant militaire redouté.
Mais un aperçu de la vie du jeune homme de 56 ans avant son entrée dans l'Armée nationale somalienne (ANS) prouve le contraire. Avant 2012, Sheegow était un commandant d'Al Shabaab qui a fait défection pour rejoindre les forces gouvernementales avec entre 50 et 100 de ses combattants. Mais la plupart des gens soupçonnent qu'il s'agit d'une défection née de la crainte d'être capturée de manipre imminente par les troupes gouvernementales somaliennes plutôt que d'un changement d'avis. La première bataille de sa brigade s'est déroulée contre Al Shabaab sous le drapeau de l'ANS, elle fut perdue avec un certain nombre d'armes et de véhicules militaires tombés entre les mains d'Al Shabaab. L'incident a soulevé des questions sur la question de savoir si le général s'était égaré volontairement pour tenter de continuer à soutenir le groupe extrémiste.
Le Daily Beast a rencontré Sheegow à Mogadiscio, où trois représentants du gouvernement affirment qu'il devait être réprimandé pour le nombre croissant de victimes civiles sous sa direction dans la partie de la Basse-Shabelle, dont sa brigade est responsable. Sheegow a nié ces allégations.
Selon Diblawe, lors de sa rencontre avec le général Sheegow, il expliqua que les Biyomal et les Habar Gidr s'étaient battus pour des terres dans la région de Sheegow et étaient maintenant responsables et suggéra au général soit de désarmer les deux groupes, soit de réconcilier les deux clans.
"Il nous a déclaré qu'il nous réconcilierait avec les Biyomal et qu'il n' y avait pas de quoi s'inquiéter", déclare Diblawe. De retour dans son village, il a informé les villageois de son accord avec Sheegow et leur a demandé de placer toutes leurs armes légères dans l'une des maisons en tôle ondulée du village, conformément aux instructions du général Sheegow.
Dans une interview avec The Daily Beast, Sheegow a nié avoir rencontré Diblawe avant l'opération, bien qu'immédiatement après l'incident, il ait dit aux médias locaux qu'il avait " parlé avec les agriculteurs de la région et leur avait demandé de mettre leurs armes dans leurs maisons pour éviter la confusion " au sujet de qui était et n'était pas Al Shabaab.
En attendant les prochaines étapes du processus de réconciliation, Diblawe et d'autres villageois sont retournés dans leurs champs, espérant entendre Sheegow dire quand les efforts de réconciliation commenceraient. Mais quelques jours plus tard, Diblawe et d'autres habitants du village ont remarqué quelque chose d'étrange sur leurs fermes, avec un bruit qui perçait le ciel autour d'eux. Regardant le ciel de l'extérieur de chez lui, Diblawe avait l'air d'une drôle de corneille encerclant le village. Mais le bourdonnement bruyant qui perça le paysage autrement paisible suggéra le contraire. Diblawe savait que ce n'était pas un oiseau. C'était un drone.
"Sheegow était un commandant d'Al Shabaab qui a rejoint les forces gouvernementales avec entre 50 et 100 de ses combattants."
"Il arrivait le matin, vers cinq ou six heures du matin et de nouveau vers cinq heures du soir ", a déclaré Diblawe. "Il était clair que les Etatsuniens avec Sheegow s'intéressaient à nous, c'est pourquoi ils utilisaient leur drone espion au-dessus de nous."
Diblawe revint auprès du général, suppliant Sheegow de le laisser parler directement aux Etatsuniens pour qu'il puisse clarifier qui étaient les villageois. Diblawe a suggéré à la force étrangère de fouiller leur ferme pour voir les armes légères et Diblawe a expliqué pourquoi les villageois étaient en leur possession. Encore une fois, Sheegow lui a dit d'être patient et que le processus de réconciliation commencerait bientôt. Diblawe retourna dans son village en se méfiant du général, et se sentant découragé de savoir que sans le soutien du général, il n'avait aucune chance d'essayer de communiquer directement avec les Etatsuniens.
Le lendemain, les villageois aperçurent de nouveau le drone planant au-dessus de leur tête. Les préoccupations de Diblawe s'aggravèrent. Il est retourné à Sheegow pour la troisième fois, implorant de parler aux Etatsuniens. Encore une fois, Sheegow l'a refusé.
Ce serait le dernier appel à l'aide de Diblawe. Le lendemain matin, des coups de feu ont déchiré son petit village et les craintes de Diblawe que les fermiers aient été confondus avec des combattants d'Al Shabaab se sont avérées vraies.
APRÈS S'ÊTRE RASSEMBLES avec une vingtaine d'autres villageois pour faire la prière du matin le vendredi, Diblawe avait regagné son lit en espérant se reposer un peu plus avant de commencer sa journée. Moins de 10 minutes plus tard, il entendit le bruit des coups de feu et sortit de son lit pour se rendre à sa porte, d'où il aperçut son voisin Ali-waay debout, les mains en l'air et des hommes en uniforme au loin. Diblawe a immédiatement commencé à courir vers la forêt derrière sa maison.
"J'étais pieds nus et il y avait beaucoup de balles qui sifflaient près de moi, mais je ne me suis pas arrêté une seconde, j'ai couru et j'ai commencé à me diriger vers la ville de Bariire, j'ai pensé que l'armée pourrait arrêter le tir", a-t-il dit.
Arrivé à Bariire, Diblawe a d'abord vu un lieutenant de l'ANS, Mohamed Mohamud Abor, et s'est précipité vers lui, demandant à voir Sheegow. Le lieutenant amena le fermier anéanti à l'avant-poste de Sheegow, où le regard du général dans les yeux de Diblawe fut envahi par un sentiment de désespoir et d'étonnement. Je lui ai demandé pourquoi tout cela se passait, nous l'avons laissé ici hier et nous lui avons fait part de nos préoccupations. "Je lui ai dit de sauver les gens qui sont encore en vie, voyons si on peut sauver ces gens."
De l'autre côté de la ferme, de la maison de Diblawe, Abdullahi et Goomey étaient escortés au centre du village par des soldats de l'Armée nationale somalienne. Allonger par terre, les deux hommes ne pouvaient guère croire le carnage qui les entourait. Dix de leurs amis ont été dispersés par terre. Certains comme Ali-waay - le même homme qui est allé en ville avec Diblawe la veille - étaient à peine vivants et appelaient faiblement à l'aide. Les soldats qui les entouraient n'écoutaient pas.
Environ trente minutes plus tôt, Goomey avait prié avec la plupart d'entre eux, et avait vu la théière qu'ils avaient commencé à brasser encore assis sur le sol, le corps d'un préadolescent en t-shirt brun et un jean bleu foncé étendu à côté. Il savait que les autres auraient attendu le thé quand la fusillade a commencé. The Daily Beast a des photos des villageois prises après l'attaque, bien que beaucoup soient trop violentes pour être publiées. Ils montrent la théière, un chauffe-eau noir et une grande marmite éparpillée autour du corps du garçon.
Près du garçon, Goomey a vu son ami Dangaweyne, qui avait voyagé avec lui de la ville voisine d'Afgoye à leur petit village la veille. Quelques mètres plus loin, un autre blessé, Abdullahi Abdullahi, criait faiblement "sauve-moi, sauve-moi" en direction de Goomey et Abdullahi Elmi. Un peu plus loin, Ali-waay, son thorax saignait, suppliant les hommes de l'aider, lui et un autre homme, en demandant si quelqu'un pouvait bouger sa jambe qui avait été tordue après qu'il soit tombé à terre d'une blessure par balle.
"Le corps d'un préadolescent avec un t-shirt marron et un jean bleu foncé s'étendait près de la casserole où il avait fait bouillir du thé."
Abdullahi a demandé aux soldats somaliens s'il pouvait aider les hommes. Le soldat somalien a regardé Abdullahi pendant un moment et a accepté. Mais quand il a commencé à se lever, un soldat étatsunien l'a arrêté. Le gars étatsunien s'est mis en colère et m'a demandé de m'allonger, alors je me suis couché la poitrine sur le sol et il a mis sa botte sur moi pour me garder là", a déclaré Abdullahi. Avec la tête inclinée sur le côté, Abdullahi pouvait voir les soldats somaliens entrer dans la maison où les fermiers avaient gardé leurs anciens AK-47.
Transportant les armes hors de la maison, les soldats somaliens les ont ensuite placées à côté des corps des autres villageois. Goomey et lui ont également vu trois des hommes étatsuniens, que Goomey décrit comme un homme grand avec deux hommes plus petits à côté de lui, prendre des photos des corps avec les armes placées à côté d'eux. L'un des hommes prenait une photo avec un petit appareil photo noir qui émettait un flash avec chaque photo prise, tandis que les deux autres prenaient des photos sur leur téléphone, dit Goomey. Un soldat de l'Armée nationale somalienne qui est arrivé plus tard sur les lieux a estimé qu'il y avait entre 10 et 13 opérateurs spéciaux étatsuniens dans le village qui, selon lui, étaient des SEALS de la marine.
Alors qu'ils prenaient des photos, Abdullahi a vu les Etatsuniens pointer les soldats somaliens vers une petite maison. Ils sont entrés dans le bidonville de fortune et sont sortis avec un homme d'environ 50 ans, Hassan "Dooro", dont le deuxième nom signifie "poulet" en Somalie, parce qu'il est un éleveur de poulets. Abdullahi apprit plus tard par Hassan que les soldats somaliens l'avaient trouvé étendu sous son lit, où il s'était caché lorsqu'il avait entendu le bruit des coups de feu.
De retour à Bariire, Sheegow avait accepté de donner à Diblawe un véhicule de soldats de l'ANS pour l'emmener à la ferme. Sheegow a d'abord dit qu'il informait les Etatsuniens de Bariire afin qu'ils puissent avertir leurs homologues de la ferme, et après environ 15 minutes Diblawe retourna en direction de son village. Lorsqu'ils arrivèrent sur les lieux, Diblawe eut du mal à croire ce qu'il voyait et, en regardant les soldats étatsuniens, il fut étonné de voir à quel point ils étaient bien équipés. Pendant que les soldats de l'ANS transportaient des AK-47, les Etatsuniens disposaient de mitrailleuses et de trois véhicules blindés bien équipés. Un soldat de l'Armée nationale somalienne à Bariire a par la suite décrit les armes étatsuniennes comme une version plus moderne et plus petite d'un M16 équipé de lunettes de visée et extensible à l'arrière. Goomey a aussi remarqué les voitures, qu'il décrit comme ayant "la couleur du thé quand on y ajoute du lait".
"Une fois que Diblawe est arrivé, les soldats somaliens qui sont venus avec lui ont également regardé avec horreur les lieux, certains d'entre eux disant qu'ils connaissaient ces hommes et savaient qu'ils étaient des civils. Les Somaliens qui sont venus plus tard pleuraient en regardant ces gens, l'un d'entre eux demandait pourquoi ils avaient tué ces gens et qu'il connaissait Ali-waay, pourquoi il avait été tué", explique Abdullahi. Quelques minutes plus tard, le soldat qui avait dit à Abdullahi et Goomey de s'allonger au sol a déclaré qu'ils avaient été relâchés et qu'ils étaient retournés dans leur voiture. Avec cela, les soldats somaliens et étatsuniens se sont entassés dans leurs véhicules et ont quitté les lieux, le message qu'il s'agissait de civils qui leur a finalement été transmis. Avec l'aide des soldats somaliens qui sont arrivés avec Diblawe et sont restés sur les lieux, ils ont commencé à ramasser les corps des morts, toujours sous le choc de ce qui venait de se passer.
Quand Abdullahi est finalement retourné dans sa petite maison, il a vu que l'argent sur son étagère avait disparu. Les soldats avaient tout pris.
IMMÉDIATEMENT APRÈS l'attaque, le ministère somalien de l'Information a d'abord annoncé que des soldats somaliens avaient tué huit combattants d'Al Shabaab lors d'une descente dans un village agricole près de la ville de Bariire et qu'"aucun civil n'avait été blessé ou tué au cours de cette opération".Mais lorsque les détails de l'opération ont été communiqués à Mogadiscio et que les anciens de la communauté Habargidir et les administrateurs locaux ont commencé à parler aux médias locaux des agriculteurs qui avaient été attaqués, les responsables somaliens ont commencé à raconter des histoires contradictoires sur les agriculteurs. Le président somalien, Mohamed Abdullahi Mohamed, a même publié un tweet présentant ses condoléances aux familles des personnes tuées à Bariire, qui a été enlevé quelques minutes plus tard. Au fur et à mesure que cette nouvelle se répandait, la colère du public envers le gouvernement fédéral somalien et ses homologues étatsuniens s'est répandue.
Diblawe et les autres fermiers ont refusé d'enterrer leurs morts jusqu'à ce que le gouvernement somalien rétracte officiellement leurs allégations selon lesquelles les fermiers étaient des militants d'Al Shabaab, amenant les corps à Mogadiscio pour qu'ils soient gardés dans un camion frigorifique et présentés aux responsables somaliens...
Au moment où les corps sont arrivés à Mogadiscio, ce qui aurait été un acte sans précédent pour les militants d'Al Shabaab, des dizaines de membres de la famille et d'anciens avaient pris la parole pour défendre les agriculteurs et presque personne dans la ville ne croyait encore que cela soit des extrémistes. En quelques jours, même le chef des forces de défense et le ministre de l'Information ont admis que des civils avaient été tués dans l'opération.
Avec l'éclatement de la colère du public, le gouvernement fédéral somalien a ouvert une enquête sur l'incident, au cours de laquelle des responsables gouvernementaux ont approché Diblawe et d'autres personnes pour recueillir des informations sur qui ils étaient, pourquoi ils avaient des armes et ce qui s'était passé pendant l'attaque. Mais à la grande surprise du public, le gouvernement fédéral n' a jamais rendu publics les résultats de cette enquête et le président somalien n'a jamais reconnu officiellement que des civils avaient été pris pour cible à tort au cours d'une opération terrestre.
Selon un représentant du gouvernement et un ancien responsable de la sécurité, le résultat de cette enquête a non seulement confirmé que les agriculteurs étaient des civils, mais aussi qu'ils avaient été enterrés sous la pression du gouvernement des États-Unis. D'après ces sources, les États-Unis ont d'abord tenté de faire pression sur les responsables somaliens pour qu'ils nient les allégations selon lesquelles les agriculteurs étaient des civils, mais en sachant que cela coûterait politiquement cher, le président somalien a refusé. Au lieu d'apaiser les familles des victimes, le gouvernement somalien les a ensuite payées entre 60 000 $ et 70 000 $ chacune, selon ces deux sources, dont l'une est fermement convaincue qu'elle a été payée par le gouvernement étatsunien.
"Les fermiers refusèrent d'enterrer leurs morts. Ils ont amené les corps à Mogadiscio."
Avec peu de reconnaissance publique des méfaits de la part du gouvernement national, un ancien fonctionnaire a alors commencé une enquête indépendante sur l'opération, au cours de laquelle il a recueilli les douilles d'obus dans la région dans les jours qui ont suivi l'attaque.
Le Daily Beast a vu des photos des obus pris sur les lieux ainsi que cinq douilles individuelles à Mogadiscio.
Selon de nombreux experts en armement consultés par The Daily Beast, les douilles sont un mélange de balles de 7,62 x 39 mm, provenant pour la plupart d'AK-47 comme celles utilisées par l'AMS, et des balles OTAN de 5,56 x 45 mm sur des liaisons de ceinture désintégrantes M27. Les balles de 5.56x45mm sont utilisées par les armes automatiques M249 Squad ou leurs versions plus légères, les mitrailleuses Mark 46 ou Mark 48, qui sont connues pour être utilisées par les forces spéciales étatsuniennes. Ces liens sont également estampillés "ALK", qui indique la fabrication à l'usine de Lake City Ammunition Plant, une installation appartenant au gouvernement étatsunien à Independence, Missouri, qui fabrique et teste des munitions de petit calibre pour l'armée étatsunienne.
L'Armée nationale somalienne n'est pas en possession d'armes qui pourraient effectuer de tels tirs. Selon un ancien haut responsable du renseignement, qui est aujourd'hui conseiller principal en matière de sécurité auprès du Gouvernement fédéral somalien, l'Armée nationale somalienne ne transporte que des AK-47, des PKM et quelques mitrailleuses DSHk montées à l'arrière des camionnettes, en raison de l'embargo de longue date sur les armes imposé par le Conseil de sécurité de l'ONU en janvier 1992.
De plus, Diblawe, Goomey et Abdullahi, tous témoins oculaires de ce qui s'est passé après l'attaque, ont noté que les soldats de l'Armée nationale somalienne présents transportaient au ceinturon des AK-47 qui n'incorporent pas le type de munitions de mitrailleuse qui composaient la majorité des douilles collectées à la ferme, tandis que les soldats étatsuniens transportaient ce qu'ils appelaient des mitrailleuses.
Ces preuves suggèrent fortement que l'équipe étatsunienne elle-même a tiré sur les fermiers et que les soldats servant sous le commandement des opérations spéciales étatsuniennes peuvent être tenus directement responsables de la mort de ces civils non armés.
LE 29 SEPTEMBRE, environ un mois après cette opération, les quatre avant-postes que les Etatsuniens avaient établis avec l'ANS autour de la ville de Bariire ont été attaqués par les forces d'Al Shabaab. Selon le commandant de l'UPDF, les Etatsuniens et les Somaliens avaient installé trois avant-postes à chaque coin de la ville, deux du côté nord de la ville avec Danab, qui avait été affecté à Bariire après l'incident de la ferme, et les forces de l'ANS et un du côté sud de l'autre côté de la Shabelle avec les forces de l'ANS du général Sheegow, avec un pont traversant la rivière qui les reliait. Tôt ce matin-là, Al Shabaab a fait exploser deux engins explosifs improvisés ou VBIED à Bariire, dont le premier a détruit le pont reliant l'avant-poste de Sheegow aux deux autres de l'autre côté de la rivière.
Après la destruction du pont, un autre VBIED a touché la base de Danab et les chasseurs d'Al Shabaab ont commencé à attaquer les avant-postes nord de Danab et de l'ANS. A la fin du siège qui a duré deux heures, au moins 40 soldats étaient morts, selon un membre de l'ANS, et au moins 10 de leurs véhicules et une grande partie de leur matériel avaient été saisis par Al Shabaab .
"Les Etatsuniens sont venus avec cette confiance excessive dans le fait qu'ils pouvaient tenir Bariire, mais même si vous avez de meilleures armes, vous devez connaître le terrain", a déclaré le Général Muhanga, qui a également noté que les Etatsuniens avaient visité les avant-postes la veille de leur débordement, mais qu'ils étaient partis pour retourner à Mogadiscio. "Je les avais prévenus que ces avant-postes seraient envahis, je les avais prévenus que ces garçons seraient tués."
La perte de la ville de Bariire a marqué la fin de la campagne militaire étatsunienne qui n' a pas réussi à reprendre et à retenir la zone d'Al Shabaab. Aujourd'hui, la ville est sous le contrôle d'Al Shabaab et Diblawe, Abdullahi et Goomey, qui ont perdu dix de leurs amis, sont à nouveau soumis au pouvoir extrémiste. d'Al Shabaab.
MISE À JOUR, 13 h 30, le 29 novembre 2017:
Dans une apparente hâte de devancer l'enquête du Daily Beast sur l'incident de Bariire, publiée plus tôt aujourd'hui, l'Africom a annoncé cet après-midi qu'elle avait conclu son enquête. Elle n'apporte aucune preuve pour corroborer ses conclusions. Voici son texte en intégralité :
Publication des résultats de l'évaluation des allégations de victimes civiles du 25 août
Après une évaluation approfondie de l'opération conduite par l'Armée nationale somalienne près de Bariire (Somalie) le 25 août 2017 et des allégations de victimes civiles qui y sont associées, le Commandement des opérations spéciales des États-Unis pour l'Afrique (SOCAF) a conclu que les seules victimes étaient des combattants armés ennemis.
Par U. S. AFRICA COMMAND PUBLIC AFFAIRS, United States Africa Command Stuttgart, Allemagne 29 nov. 2017
Après une évaluation approfondie de l'opération conduite par l'Armée nationale somalienne près de Bariire (Somalie) le 25 août 2017 et des allégations de victimes civiles qui y sont associées, le Commandement des opérations spéciales des États-Unis pour l'Afrique (SOCAF) a conclu que les seules victimes étaient des combattants armés ennemis.
Avant de mener des opérations avec les forces partenaires, la SOCAF effectue une planification et une coordination détaillées afin de réduire les risques de pertes civiles et d'assurer le respect du droit des conflits armés. Le Commandement des États-Unis pour l'Afrique et le Département de la défense prennent très au sérieux les allégations de pertes civiles.
Pour plus de détails sur l'opération du 25 août, visitez: http://www.africom.mil/media-room/pressrelease/29846/civilian-casualty-allegations-in-somalia
(A noter, ce lien conduit à la déclaration initiale de l'opération en août, qui ne fournit aucun détail :)
Allégations de victimes civiles en Somalie
Nous sommes au courant des allégations de victimes civiles présumées près de Bariire, en Somalie. Nous prenons au sérieux toute allégation de pertes civiles et, selon la norme, nous procédons à une évaluation de la situation afin de déterminer les faits sur le terrain.
Par U. S. AFRICA COMMAND PUBLIC AFFAIRS, United States Africa Command Stuttgart, Allemagne 25 août 2017
Nous sommes au courant des allégations de victimes civiles présumées près de Bariire, en Somalie. Nous prenons au sérieux toute allégation de pertes civiles et, selon la norme, nous procédons à une évaluation de la situation afin de déterminer les faits sur le terrain.
Nous pouvons confirmer que l'Armée nationale somalienne menait une opération de soutien dans la région avec les forces étatsuniennes.
Les forces étatsuniennes sont en Somalie à la demande du gouvernement fédéral somalien et elles sont déterminées à aider les forces somaliennes à neutraliser Al-Shabaab et à apporter la stabilité dans la région.