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Les Palestiniens rejettent la rencontre avec Trump alors que la colère monte au sujet de Jérusalem (The Guardian)

par Peter Beaumont 11 Décembre 2017, 07:15 Jerusalem Manifestations Palestiniens Israël Trump Netanyahu Intifada Colonialisme Articles de Sam La Touch

Les Palestiniens rejettent la rencontre avec Trump alors que la colère monte au sujet de Jérusalem
Article originel : Palestinians to reject meeting with Trump as anger over Jerusalem rises
Par Peter Beaumont
The Guardian


Traduction SLT

Les Palestiniens rejettent la rencontre avec Trump alors que la colère monte au sujet de Jérusalem (The Guardian)

Alors que le nombre de morts à Gaza augmente, la France et la Turquie veulent que le président étatsunien change d'avis sur la reconnaissance de Jérusalem en tant que capitale d'Israël.

Gaz lacrymogènes et canons à eau utilisés contre les manifestants pro-palestiniens au Liban - vidéo

Le président palestinien, Mahmoud Abbas, devrait rejeter une invitation à rencontrer Donald Trump à Washington, au milieu d'un fort consensus émergent parmi les conseillers clés sur le fait qu'il n'y a "aucune condition" au dialogue après la reconnaissance officielle par le président étatsunien de Jérusalem comme capitale d'Israël.

La question de savoir comment répondre au mieux à l'annonce de Trump est au centre d'une série de réunions d'urgence des hauts dirigeants palestiniens, qui ont commencé samedi. On s'attend à ce qu'ils se terminent au début de la semaine prochaine par une rare réunion du conseil central de l'OLP, et ils ont déjà conclu qu'Abbas ne devrait pas rencontrer le vice-président Mike Pence lorsqu'il visitera Israël et la Palestine juste avant Noël.

Confirmant la décision qu'Abbas ne rencontrerait pas Pence, le ministre palestinien des Affaires étrangères Riyad al-Maliki a déclaré que les Palestiniens demanderaient également des votes sur les résolutions au Conseil de sécurité des Nations Unies et à la Ligue arabe. Bien que les États-Unis disposent d'un droit de veto sur le Conseil de sécurité, l'appui à la rédaction d'une résolution serait perçu comme une pression exercée sur les États-Unis.

Les intenses délibérations palestiniennes - qui se déroulent au milieu d'une colère internationale et musulmane généralisée à l'encontre de la décision unilatérale de Trump, qui a rompu le consensus diplomatique international - sont survenues alors que des sources médicales palestiniennes ont confirmé que deux membres du Hamas avaient été tués lors d'une frappe aérienne israélienne à la suite d'un tir de missile de Gaza, portant à quatre le nombre de morts au cours des deux derniers jours.

Malgré la fureur généralisée, cependant, le dirigeant palestinien a été pris entre son anxiété d'éviter une escalade de la violence, au milieu des appels lancés par certains en faveur d'une nouvelle intifada - ou insurrection - et son besoin d'apporter une réponse significative.

Mais dans un élan pour Abbas, le Turc Recep Tayyip Erdogan et le Français Emmanuel Macron ont accepté de travailler ensemble pour tenter de persuader les Etats-Unis de reconsidérer leur décision, suite à un appel téléphonique centré sur les risques pour la stabilité dans la région.

La conversation entre Erdogan et Macron a suivi de près une réunion du Conseil de sécurité de l'ONU au cours de laquelle les États-Unis ont lutté pour défendre les accusations des pays européens selon lesquelles leur action violait les résolutions de l'ONU.

Au fur et à mesure que la crise diplomatique se poursuivait, un nombre croissant de voix s'interrogeaient sur ce que Trump avait réellement accompli, alors que les preuves de dommages causés aux Etats-Unis au Moyen-Orient et aux forums internationaux continuaient de s'accumuler.

S'il y avait un endroit au cours de la fin de semaine où il n' y avait aucun doute, c'était dans l'estimation de Trump de ce qu'il avait accompli. Jeudi, alors qu'il saluait ses invités à l'occasion de la nouvelle année juive, il s'est de nouveau livré à un moment de congratulations aux invités.

"Eh bien, je sais qu'il y a beaucoup de gens heureux dans cette pièce", a-t-il dit aux invités, avant d'ajouter suite à une vague d'applaudissements : "Jérusalem".

Alors que Trump s'est adonné à des autocongratulations et à l'admiration mutuelle de sa décision de mettre à mal des décennies de politique étrangère étatsuniennes en reconnaissant Jérusalem - une ville revendiquée à la fois par les Israéliens et les Palestiniens - comme la capitale israélienne, à travers les diplomates étatsuniennes du Moyen-Orient, leurs familles et d'autres citoyens appréhendaient les prochaines vacances dans une région soudainement plus hostile aux Etats-Unis.

En Jordanie et ailleurs - selon certaines informations - les enfants des diplomates ont été avisés de ne pas aller à l'école, d'autres mouvements ont été fortement limités et les réunions ont été annulées car la colère suscitée par le discours de 13 minutes de Trump a continué à entraîner des manifestations et des mises à feu de drapeaux US.

En Israël - au-delà de l'euphorie des élites politiques de droite - la décision fut accueillie avec un peu plus qu'un haussement d'épaules anxieux, les rues pluvieuses de Jérusalem-Ouest furent vides de célébrations, même après la déclaration de Trump.

Au lieu de cela, l'énergie émotionnelle a été concentrée presque exclusivement sur un seul côté - le sentiment d'indignation parmi les Palestiniens et la communauté musulmane au sens large que Trump avait cherché à donner quelque chose qui ne lui appartenait pas.

Il y a eu des condamnations, des déclarations et des menaces de groupes aussi divers que le Hezbollah, le Hamas, Al-Qaida et des milices irakiennes contre les États-Unis et Israël. Mais l'impact réel pour le moment est plus susceptible d'être ressenti à un niveau intense dans une ville où même les plus petits changements perçus de son statut ou du statut de ses sites religieux peuvent déclencher des explosions soudaines de violence.

Ces dernières années, il y a eu une vague d'attaques au couteau attribuées en partie à la crainte qu'Israël envisage de changer le statut du complexe Haram al-Charif/Temple Mount, et il y a eu deux semaines de manifestations de rue cet été après qu'Israël ait installé des détecteurs de métaux aux entrées du même site à la suite d'une attaque meurtrière dans le même complexe.

"Jérusalem est une bombe à retardement", a expliqué la semaine dernière, Hamdi Dyab, un activiste palestinien dans le camp de réfugiés de Shuafat, le seul camp à l'intérieur des limites municipales de la ville, le soir du discours de Trump.

"Il s'agit d'une escalade sans précédent de la part du président étatsunien et cela fera exploser une troisième intifada. L'histoire n'aura pas vu une telle intifada. Malheureusement, cela compromettra l'intérêt des États-Unis et la vie des Etats-Unis dans le monde entier s'il agit de la sorte".

"La déclaration a détruit le processus de paix et tous les accords qui ont été signés. Cela suscitera une vague de réactions publiques".

"Avant-hier, nous avons rencontré M. Abbas et nous lui avons dit, en tant que peuple de Jérusalem, que nous avions gagné les 14 jours de protestations contre la mosquée al-Aqsa [sur l'installation israélienne de détecteurs de métaux] et nous déclarons aux Etatsuniens que, en tant que peuple qui a organisé ces manifestations, Jérusalem restera toujours islamique avec son héritage et sa culture".

"Nous avons eu une rencontre entre toutes les factions palestiniennes à Ramallah, dirigée par le Fatah, et le Hamas aussi. Si Trump déclare Jérusalem capitale d'Israël, une intifada s'étendra sur toute la Cisjordanie, y compris la ligne verte."

Pour de nombreux Palestiniens la semaine dernière - déjà profondément désillusionnés par les politiques internationales des Abbas faibles et vieillissants -, le discours de Trump était considéré comme une preuve ultime d'échec.

Même ceux qui n'étaient pas critiques ont laissé entendre que le moment était venu d'adopter une nouvelle approche. "Abou Mazen [le surnom d'Abbas] a 83 ans, mais il est temps de prendre une décision courageuse et d'écrire son nom dans l'histoire. Ils ne lui ont pas laissé le choix. Tout ce qu'il peut faire, c'est diriger une troisième intifada", a déclaré Cheikh Abdullah al-Qam, coordinateur du comité de Jérusalem représentant les factions palestiniennes à Jérusalem-Est.

Et bien qu'Israël ne voit pas encore le risque que le parti du Fatah d'Abbas prenne le genre de rôle actif que l'on a vu pendant la seconde Intifada, il craint que le Hamas - qui a appelé à une Intifada la semaine dernière - cherche à exploiter la colère pour renforcer sa propre position.

Plus vraisemblablement encore,  les responsables de la sécurité, craignent un retour à la violence sporadique et meurtrière de la vague d'attaques au couteau, souvent lancées par des Palestiniens sans avertissement, qui ne s'est éteinte que récemment.

Une autre conséquence involontaire, et potentiellement plus grave, est la façon dont Trump affectera une région plus vaste où les alliés arabes sunnites se sont plaints du déclin de l'influence étatsunienne, alors même que la Russie et l'Iran ont rapidement étendu la leur. En dernière analyse, il n'y a qu'un seul bénéficiaire clair du discours controversé de Trump, comme l'affirmait Aluf Benn, rédacteur en chef du quotidien israélien libéral Haaretz, dans un commentaire de vendredi. Dans cet article, il a écrit que Trump avait aidé Benjamin Netanyahu à détourner l'attention d'une série d'enquêtes sur la corruption, et reflétait un changement d'orientation des États-Unis du Moyen-Orient vers l'Asie.

"Trump n' a rien donné en retour aux Palestiniens", écrit Benn, "et a même affaibli l'engagement des Etats-Unis envers l'établissement éventuel d'un État palestinien".

"Netanyahu sait que l'existence et la sécurité d'Israël dépendent du soutien des Etats-Unis, il craint donc un retrait étatsunien. Mais il sait aussi qu'Israël ne peut pas arrêter ce processus ni même le retarder, alors il essaie plutôt de l'exploiter pour trouver des occasions d'améliorer la position d'Israël dans son conflit intransigeant avec le mouvement national palestinien mourant. Le discours de Trump mercredi fut une telle opportunité."

Écrivant pour le site israélien Walla, Amir Oren était encore plus accablant, avertissant que la déclaration de Trump aurait un "coût en sang", soit sous la forme d'une "Trump intifada", soit dans une série d'attentats terroristes.

"Toute fatalité inutile qui suivra dans le sillage de ce caprice enfantin... sera la responsabilité de Trump, et indirectement celle de ceux qui l'ont encouragé, par l'action ou l'inaction."

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