Dans la géographie parisienne, le Congo-Brazzaville se situerait plutôt rive droite. Ainsi lorsqu’il vient à Paris, comme ce fut le cas début février, le Premier ministre, Clément Mouamba, loge dans un palace proche de l’Etoile, déjeune sur les Champs-Elysées, au Fouquet’s, avec Hervé de Charette, ancien ministre et actuel président de la chambre de commerce de Paris. Avant de se rendre non loin de la gare de Lyon, au siège de l’Agence française de développement (AFD), qui sur son site, se targue d’avoir investi près de 500 millions d’euros depuis 2010 dans ce petit pays d’Afrique centrale, gorgé de pétrole et de ressources naturelles.

En principe gâté par la nature, le Congo-Brazzaville a hélas plus que jamais besoin de ses amis : le FMI a réévalué sa dette à 110% du PIB, et refuse pour l’instant toute nouvelle aide, désormais conditionnée à plus de transparence et à des signes tangibles dans la lutte contre la corruption.

 

Hôtel particulier

Aïe, voilà des mots qui fâchent : toujours à Paris, et toujours rive droite, deux juges français traquent depuis quelques années le patrimoine immobilier des proches du Président, Denis Sassou-Nguesso. Dans cette affaire dite des «biens mal acquis», ils ont mis en examen l’an passé cinq proches du chef de l’Etat, qui cumulent plus de trente ans au pouvoir. Les neveux, belle-sœur, fille et gendre de l’inamovible président auraient notamment acquis à coups de millions d’euros plusieurs logements de rêve, comme cet hôtel particulier avec piscine intérieure dans les Hauts-de-Seine.

Des esprits mal intentionnés pourraient être tentés de faire le lien entre la ruine du pays et ses dépenses fastueuses. Ou bien de rappeler que depuis les dernières élections en mars 2016, les principaux opposants, et une centaine de leurs sympathisants, croupissent toujours en prison.

Mais vu de la rive droite de la Seine, le fleuve Congo poursuit son cours immuable loin des vicissitudes de l’époque. La Société générale a annoncé le 9 février avoir augmenté ses crédits destinés à ce pays, afin de «participer au développement malgré les moments difficiles».

 

Soutien de la banque Lazard

Et selon l’hebdomadaire Challenge, face au FMI, le régime est désormais conseillé par la banque Lazard, ce que ses représentants ont confirmé à Libération. Une banque qui vient ainsi «s’ajouter à la longue liste des bonnes fées françaises qui accourent au chevet de l’ancienne colonie, de Dominique Strauss-Kahn à Dominique de Villepin», notait encoreChallenge dans son édition du 4 janvier.

La banque Lazard est par ailleurs dirigée par Matthieu Pigasse, neveu de l’un des plus proches conseillers du président congolais. Lequel compte encore bien des soutiens à Paris, comme le prouve ce dîner de gala donné en son honneur début décembre au Crillon, célèbre palace situé évidemment rive droite.

La vidéo tournée à cette occasion permet de mesurer la popularité du maître de Brazzaville sur les rives de la Seine. On y voit un écrivain célèbre, Marek Halter, suggérer la création d’une «annexe de la Sorbonne» à l’université Sassou-Nguesso de Brazzaville, dont les travaux sont depuis longtemps en sursis. Vient ensuite le médiatique imam de Drancy, Hassen Chalghoumi, qui envisage carrément «l’organisation en 2018 d’une conférence de la paix» à Brazzaville. Avant que Christine Sauvagnac, grand maître d’une loge maçonnique, n’affirme «partager les mêmes valeurs» que l’homme fort de ce petit émirat pétrolier aujourd’hui ruiné. Lire la suite sur Libération.fr